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Et pour vous, Monsieur Nolan, c’est quoi Batman ?
Aujourd’hui, à la place d’Un Dimanche, Une Critique qui revient la semaine prochaine, CloneWeb arbore fièrement sa devise « L’actualité des héros ».
Dans une période d’accalmie des grosses sorties super-héroïques, c’est l’occasion de s’évader à Gotham pendant quelques instants, et de revenir sur près de 70 ans de carrière du Chevalier Noir à l’écran. L’occasion, aussi, de faire le bilan sur ce qu’est devenu notre super-héros préféré.
Bonne lecture, et n’oubliez pas de tourner les pages…
Rares sont ceux qui, en occident, n’ont jamais vu un film sur Batman. Bah oui, Batman. Vous savez, le beau gosse millionnaire un peu fadasse qui se déguise en chauve-souris géante la nuit pour aller jouer au gendarme et au voleur avec les méchants sous prétexte que papa et maman se sont faits dézinguer par l’un d’eux y a des années. Nous, si ça nous était arrivé, on serait surement devenu fou, ou schizo, ou méchant… ou les trois?! On aurait peut-être intégré la police, ou l’armée. On aurait peut-être passé notre héritage à faire construire des prisons, des armes et des uniformes. Ou on se serait peut-être suicidé! Mais pas Bruce Wayne, non, pas lui. Lui, il a plutôt choisi d’enfiler des collants et des bottes, et de vivre la nuit. Mais c’est normal, c’est un tricheur. Lui, il est pas comme nous, parce que lui, il vient d’une BD.
Bien sûr, ça l’a pas empêché de sortir de ses cases et d’envahir l’écran. Et à chaque génération son Batman! La différence, avec le Batman des années 2000, c’est que ça faisait quelques temps qu’il avait disparu des cinémas. La raison? Boarf… délais, fatigue, indécisions, peur de décevoir son public après l’indétrônable Batman & Robin. Pour le 21e siècle, il fallait un nouveau Batman, il fallait repartir sur des bases saines, neuves, solides. Pour ce faire, il fallait que Batman trouve un ami qui saurait lui rendre hommage et le mettre au goût du jour. Après quelques essais infructueux, comme Batman Beyond, ou Batman Year One de Miller et Aronofsky, Bruce se décide à donner sa confiance à un jeune réalisateur de films fort prometteur… et connaisseur, qui plus est! En effet, dès son premier long-métrage, Following, Christopher Nolan avait subtilement glissé sa lettre de motivation à Wayne Enterprises! Voyez vous-même:

Ajoutons à ce fait pour le moins étrange que le deuxième serial de Batman, diffusé chaque semaine sur les grands écrans états-uniens durant l’année 1949, mettait en scène un personnage nommé Nolan, homme de main pour le moins incompétent du terrible Wizard, et nous avons la certitude que le jeune britannique était destiné à prendre les rênes de la Batmobile.
S’en suivent donc plusieurs années de collaboration qui aboutissent en 2005 à un Batman Begins qui séduit honorablement la population, mais aussi et surtout, en 2008, à un The Dark Knight qui explose littéralement le box-office, devenant alors un des plus gros succès de tous les temps (depuis dépassé par Avatar). À première vue, les Nolaneries passeraient presque pour de petits films inconséquents sur un mec en slip (oops pardon, en armure), or ils sont bien plus que cela. En effet, Christopher Nolan semble, pour ses Batman, avoir totalement laché ses petits effets d’esbroufe de mise en scène et de scénario (Following et Memento) au profit d’un nouveau standard d’écriture, de réalisation et d’intertextualité inédit! Les raisons du succès et du statut déjà culte de la nouvelle saga Batman s’expliquent selon de multiples critères. D’abord, nous verrons rapidement que les films jouissent d’une écriture extraordinairement irréprochable, et ensuite, que Nolan réussit l’exploit d’à la fois livrer une lettre d’amour aux précédents Batmen, et de réinterpréter et réactualiser le personnage pour la société contemporaine.
Quand, à la sortie de la projection de The Dark Knight, le petit geek tout ébouriffé par la somme colossale des paroles, des images et des thèmes symphoniques virtuoses qu’il s’est vu absorber, essaie de tout remettre en ordre dans son esprit désorienté incapable d’envoyer d’autre information que « tu viens de voir l’ultime film de super-héros, tu viens de voir l’ultime film de super-héros, et blablablabla, etc. », la première chose qu’il arrive à extraire de cette délicieuse moussaka thématique est probablement l’incomparable qualité d’écriture du film (mais aussi celle du premier opus). C’est vrai quoi, citez-moi un seul autre film aussi bien articulé au niveau du scénario? Alors? Haha! Voyez, impossible.
Respectueux comme jamais de son public, Nolan adopte des postulats et formule des caractéristiques qui se tiennent de bout en bout. Ainsi, il est on ne peut plus logique de voir, dans Begins, Bruce apprendre assidument l’art et la manière de la dis-cré-tion du ninja pour qu’ensuite il propose à ses camarades de jeu policiers une sympathique course-poursuite en tank sur les toits de Gotham. Après tout, on est fan de James Bond ou on l’est pas (et puis c’est l’occasion d’avoir, enfin, une scène qui surpasse en classe Pierce Brosnan arpentant tranquillement St-Petersburg en char d’assaut). The Dark Knight n’est bien sûr pas en reste, et dans son optique de tout expliquer au public de A à Z en passant par Q (ou pas – nous y reviendrons), Christopher offre à son film une cohérence interne inattaquable. En effet, quelle personne saine d’esprit irait lui reprocher d’avoir recours à des raccourcis scénaristiques gros comme l’explosion du temple ninja? Personne ne s’est jamais demandé comment le Joker était allé placer le corps du faux Batman sur le toit de l’Hôtel de Ville, ou comment il s’enfuit du penthouse de Wayne, ou comment Batman trouve Harvey Dent lorsque celui-ci interroge le schizophrène échappé d’Arkham, ou pourquoi diable Batman ne peut-il soudain plus prévenir Gordon par SMS de la situation des otages et préfère faire mumuse avec une division entière de S.W.A.T (alors qu’il l’avait fait pour donner les noms des flics susceptibles de tuer Reese). Le tout filmé et monté de la façon la plus illisible et statique qui soit, parce que nous pauvres mortels, ne pouvons parfaitement appréhender toute la maestria combattante de Batman, qui a tout appris des ninjas tibétains.
Ensuite, afin de cimenter une fois pour toutes la cohérence interne de son film, Nolan fait habilement comprendre, à plusieurs reprises, que son héros a une règle d’or qu’il ne violerait pour rien au monde, puis -surprise- il lui fait faire tout l’inverse dans un final qui prive Batman de tous ses artifices et gadgets super-technologiques qu’il a quand même mis deux putains de films à acquérir – si ça c’est pas un peu frustrant sur les bords. Et évidemment, cette inaltérable règle d’or s’installe tranquillement après un premier film où Bruce fait exploser un chalet de vacances rempli de cosplayers ninjas et provoque volontairement la mort du grand méchant Ra’s (mais c’pas grave, c’est le vilain de l’histoire). Les voies de Nolan sont impénétrables.
Enfin, dernier détail qui fait toute la différence entre les chefs d’œuvre et les OCNI (Objets Cinématographiques Narcissiques et Indigestes), c’est le talent avec lequel les différentes problématiques sont intégrées à l’intrigue. Dans ceux-là, la puissance évocatrice de l’image est si percutante et maîtrisée qu’elle ne requiert aucun dialogue d’explication ou presque pour être développée, mais se développe plutôt d’elle-même, comme un organe existant en symbiose avec le reste du film. Dans ceux-ci, les questions et les thématiques sont soulevées à grands coups d’exposés et de dialogues, voire de monologues, s’adressant directement au public bien trop amorphe pour faire lui-même les connexions. Toute la différence entre Batman Contre le Fantôme Masqué et The Dark Knight, ou l’art d’en dire à peu près autant sur le mythe en deux fois moins de temps (littéralement) et de dialogues pleins d’air. Mais j’vais vous dire, on s’en fout parce que nous, on s’intéresse à The Dark Knight, un film dont tout le monde s’accorde à dire qu’il est très intelligent et sérieux et sombre et post-11 septembre.
Les incomparables qualités d’écriture de la nouvelle saga ne sont cependant pas son meilleur atout car en effet, aucune des précédentes adaptations ne peut se targuer d’offrir aux fans un tel mélange d’influences Batmaniennes. Des années 1940 aux années 1990, Nolan connait ses classiques, les aime, et nous le prouve.
19 commentaire
par The_Geek59
Eh ben ça en fait du boulot juste pour démonter les batman de Nolan!
par Kaleendah
Tout bonnement excellent. ^^ (Ça me donne pas envie du tout de voir Superman soit dit en passant…)
par rafa-07
Si il y a bien deux versions ridicules auxquelles il faillait s’acharner ce sont bien celles de Joel Schumacher et non celle de Nolan.
Le personnage est noir, torturé et violent dans les comics alors je ne vois pas ce qu’on peut reprocher à ces versions qui ont sauvé et remit au goût du jour le chevalier noir.
Et pour ma part Robin n’a pas sa place dans les derniers batman on a bien vu ce que cela à donner dans Batman et Robin: des disputes enfantines faisant passer batman pour un enfant de coeur, le plus horrible film du chevalier et une honte pour le cinéma
par Tom
faut arrêter de tout intellectualiser…
par Xidius
C’est vrai les gars, merde quoi Tom a raison !
Le cinéma, ça ne se pense pas, c’est instinctif !
Tout le monde sait ça, les grands réalisateurs ils prennent un décor, ils posent leur caméra au hasard et avant que les acteurs récitent leurs textes, on appuie sur le bouton Rec ! Puis alors penser un scénario, c’est n’importe quoi…
par The Walrus
Pathétique article pseudo intellectualisé à travers des rapprochements tirés par les cheveux et une méticulosité totalement inutile (on parle de films, d’adaptation de comics, fais une critique de comics, tu verras que Batman n’est pas plus parfais et cohérent dedans, si tu as encore du temps à perdre) qui sent à plein nez le geek encore puceau qui cherche à se faire mousser en démolissant un succès populaire, parce que c’est à la mode (quand ce n’est pas pour faire son démago bobo), qui plus est quand cela touche une icône geek.
Quand on voit la carrière de Nolan faut vraiment rien d’autre avoir à faire pour descendre des batman qui arrivent à se hisser hors du cadre un peu cucu du super héroïsme de base et des trompettes qui vont avec. Il y a le cinéma intello d’un côté (appréciable quand bien fait et destiné à être discuté) et qui est voulu pour, là on parle d’un Blockbuster. Et pour des blockbusters les derniers Nolan (je met inception avec les deux batman, car c’est avant tout un gros blockbuster également) sont quand même au dessus du lot. Parce qu’ils remplissent leurs fonction de Blockbuster et en bonus ont un minimum d’intelligence (et de référence dans le cas des Batman). Le reste c’est de la masturbation intellectuelle.
par The Walrus
Et désolé pour les quelques fautes c’est sans relecture ce soir. Prétexte pour rajouter qu’il faut vous trouver une fille les gars. ça urge, il faut sortir, ça vous évitera d’attendre d’un film de super héros un potentiel chef d’œuvre du cinéma. Je dis ça et pourtant je suis lecteur assidu de comics… il faut savoir profiter de ce que l’on nous propose (car c’est un genre à part), sans occulter son sens critique bien entendu, mais de là à aller rapporter les ragots les plus entendus sur ce film (je parle deThe Dark Knight, et de son prétendu caractère de film « républicain » [merci les gars j’ai ri à ce passage] )… c’est désolant.
Entre Nolan et Shumi…
Voilà mon post annuel, le plus triste c’est qu’en vous lisant j’ai également eu l’envie de perdre mon temps à commenter sur un sujet qui ne sert à rien. C’était ma minute de compassion pour vous, rédacteur de cet « article ».
par Mike
ça ressemble à ce qui se fait sur certains sites, on « casse » quelqu’un ou ici quelque chose de sorte à obtenir des réactions et faire « buzzer » (voir bien bien bien pour un article là dessus… le ton de mépris de l’auteur doit y être pour quelque chose dans cette impression). Par particulièrement le genre de choses auxquelles on est habitué sur ce site.
Cela dit, je respecte l’opinion de l’auteur, même si on a un peu l’impression que pour lui c’est le premier film qu’on peut démonter si on observe tout à la loupe…
Au final je regretterai la critique du dimanche, qui m’a plus amené à m’intéresser à des films qui m’avaient échappés et donc plus constructive (bien sûr, une critique négative d’un film qui sort au ciné peut l’être, surtout si ça me fait économiser une place).
par Arkaron
Oh, je ne nie pas le fait que Nolan avait des impératifs pour faire ses films, j’expose simplement le fait que son interprétation du personnage ne me plait pas, et j’explique pourquoi (c’est encore autorisé par la loi, n’est-ce pas?). Avec ironie, et avouons-le, mais c’est visible à la lecture, du capilotractage assumé, notamment dans la deuxième page (de l’humour, les mecs, de l’humour ; ça sauvera le monde un jour).
Quant au dernier argument, cela dépend évidemment de la grille de lecture adoptée par le spectateur; seulement nier le rapprochement avec la politique Bushiste …
par cloneweb
Je vais partiellement répondre, même si c’est plutôt l’auteur de l’article qui s’en chargera.
Pas de buzz ici, on n’a vraiment pas besoin de ça, mais bien l’envie de démontrer que le film n’est pas aussi parfait qu’on le croit.
La qualité de The Dark Knight, c’est d’avoir un rythme, une tension et d’être prenant. On est vite happé et on passe donc à coté d’un tas de choses qui ne vont pas, sur lesquels il nous a semblé intéressant de revenir.
par Mike
Bien noté, ma remarque est alors assez malvenue, bien que d’autres pourraient y penser. Ne garder que le dernier paragraphe (après tout, on commente pour donner un avis aussi :) ).
par Docteur Danny
Je crois qu’ Arkaron a oublié un détail, volontairement peut-être, sur la personnalité de Batman. C’ est sa capacité à croire en la rédemption et sa compassion ( qu’ il peut avoir aussi pour ses ennemis ).
Je ne me souviens plus très bien de tous les films sur Batman ni de toutes les adaptations, mais il me semble que Batman et Robin avait au moins le mérite, malgré tout ce qu’ on peut lui reprocher, de montrer un Batman capable de pardonner ou de donner une seconde chance ( la scène finale avec Mr. Freeze ).
Idem pour le DA de Bruce TImm, Batman veut sauver Harvey Dent parce qu’ il pète littéralement un câble, qui est une victime de la situation et risque de devenir irrécupérable, et pas parce que c’ est le héros de Gotham. Ce qui, à mon sens, lui donne plus d’ humanité et le rend moins « calculateur ».
Et je ne parle pas des épisodes de Batman TAS ou de The Batman montrant un Bruce Wayne donnant un boulot au Ventriloque sorti de prison, ou à Clayface qui cherche à se racheter.
par Shonen "YoX" Bato
c’est fou ce qu’on peut lire:
« quand ce n’est pas pour faire son démago bobo »,alors que justement the dark knight est vraiment LE batman bobo, et là, j’ai vraiment pas besoin de me justifier….
« on parle de films, d’adaptation de comics, fais une critique de comics, tu verras que Batman n’est pas plus parfais et cohérent dedans, si tu as encore du temps à perdre »,je n’ai lu a aucun moment que le les Comics batman était tous bon, Arkaron citant TAS comme référence de ce qui a été le mieux fait, bon courage a ceux qui souhaite le contre dire.
« y a le cinéma intello d’un côté (appréciable quand bien fait et destiné à être discuté) et qui est voulu pour, là on parle d’un Blockbuster. » le problème ici c’est que le Batman de Nolan ce veut intello, avec une soit disant profondeur et une espèce de « Darkitude » outrancière, alors que, par exemple, le Batman de Bruce Timm, est selon moi bien plus intelligent, profond, et sombre parceque justement il montre, au lieu d’expliquer.
Bref je félicite Arkaron, c’est vraiment le meilleur article sur ce film que j’ai lu, je suis sur que si tu as passé beaucoup de temps sur cet article, c’est parceque justement tu aime batman, et que tu souhaite le partager « a son meilleur ».
par chewbee
d’accord avec ceux qui trouvent que cet article est un pamphlet anti nolan emplit d’une mauvaise foi tout a fait impressionante…
une argumentation repose sur des concessions, suivies d’attaques… or ici on ne concede rien on attaque purement et simplement sur le postulat que » les batman de nolan sont vraiments nuls, seuls les élus détenteurs de la culture batman/comics peuvent le savoir » …
Il faut avouer qu’a force de réalisme on perd une dimension symbolistique, un peu de ce rêve autrefois vendu par les comics. Mais toute la partie » TDK= programme républicain, Batman=bush; Nolan=imposteur… en fait tout le reste de cet article » me laisse dubitatif. Mouais quoi.
par Oceanlook
Plaidoyer de The Dark Knight par le réquisitoire des films de super-héros.
J’ai toujours eu une forme de tendresse envers les passionnés, parce que, c’est vrai, c’est toujours formidable de se trouver en face de quelqu’un qui a le savoir de ce qu’il parle, et même plus, l’amour de ce qu’il évoque. Et c’est tout à fait ce qu’on peut dire de l’auteur de cet article qui a fourni un travail conséquent, qui développe une argumentation convaincante, dans un style irréprochable.
On connait tous l’exigence, voire l’intransigeance que peut nourrir le fan « ultime » à l’égard du domaine qui l’occupe. Arkaron est visiblement à la fois un lecteur exigeant des Comics de Batman et un spectateur avisé des films qui traitent de ce personnage. C’est extrêmement respectable.
Mais n’aurait-il pas poussé son exigence dans des extrémités qu’un film comme The Dark Knight ne pourra jamais atteindre?
Si je devais livrer mon sentiment, je dirais que Nolan doit être un excellent lecteur de Batman et observateur de tout le « monde » qui l’entoure. Mais soyons sérieux: au delà de ces considérations, il doit avant tout créer de toutes pièces un film, qui est donc d’une part le reflet de son travail de recherche et de sa vision des choses, et d’autre part de l’histoire qu’il a envie de créer autour de tous les éléments qu’il aura noté. Et Dieu sait si les interprétations d’une oeuvre varient d’un lecteur à un autre, et qu’aucune adaptation d’une oeuvre déjà existante sous un autre format qu’un film ne saura convaincre l’entièreté de ceux qui appréciaient déjà l’oeuvre sous cet autre format.
N’oublions pas non plus les éternelles contraintes de production: elles sont conséquentes, titanesques. Entre la poignée d’Aficionados réellement connaisseurs-à la limite de l’expertise-de l’univers Batman et l’énorme masse d’un public assez jeune et relativement intéressé par l’univers du Comic Book, qui Nolan cherchera-t’il à séduire? N’oublions pas, même si nous pouvons le regretter, qu’un film de ce genre, avant d’être un objet de réflexion, de retour sur une quasi-mythologie, est un objet de marketing qui doit être vendeur. Et Nolan a trouvé son fil d’or.
Mais essayons de dépasser l’aspect de l’adaptation d’un Comic Book en film, et regardons The Dark Knight comme ce qu’il est avant tout: un film de super-héros. Ou plutôt regardons ce qu’on nous offre en pâture habituellement dans ce genre-là: des scénarios prévisibles dès la vision de la bande-annonce, des schémas de construction de film pré-établis et donc parfaitement stéréotypés, des acteurs pour la plupart d’entre eux totalement en perdition ou bien à cause de la médiocrité de leur talent, ou bien à cause de la médiocrité de celui qui les dirige, des personnages grotesques, tirés dans des caricatures insupportables, qui débitent des dialogues écrits dans des chiottes de McDo, des morales manichéennes dignes de figurer dans les épisodes des Oui-Oui ou autres Franklin. Quelques scènes d’action bien senties, quelques situations loquaces peinent à sauver un ensemble carrément minable. (Et je ne dis pas que je ne vais pas les voir, ça a le mérite de détendre, pas de faire réfléchir, bien justement).
Regardons The Dark Knight à présent: oui c’est vrai il y a des passerelles dans le scénario assez grossières, mais c’est un film, et le réalisateur ne peut pas toujours
te prendre par la main, et ajouter 50 minutes à son film pour tout t’expliquer (on se ferait chier non?). Quel film n’en a pas? Même les plus grands romans, où on prend pourtant plus le temps, contiennent ce genre de passerelles. Et puis tiens, retournons voir nos habituels films de super-héros, il n’y en a pas peut-être? A ce niveau-là en revanche, on ne parle plus de passerelles, mais de viaducs…
L’auteur de l’article pourra toujours me le contester, mais encore une fois, à la vue de ce qui se fait habituellement, les situations pitoyables de romance à deux balles envoyées au public ado nous ont été, Dieu merci, épargnées, et même si le thème n’est pas absent, il ne dégouline pas comme d’ordinaire et transmet une émotion sincère, non sur-jouée.
Merci de constater aussi que l’histoire ne verse pas trop dans le manichéisme à outrance, une tare des films de super-héros, et qu’au moins, pour une fois, on pourra se gratter la tête deux secondes sur des histoires de morale, et de frontières entre le bien et le mal (pas trop quand même, ça n’est qu’un Blockbuster).
En gros, je comprends tout à fait qu’un passionné aussi impliqué qu’Arkaron ne puisse se satisfaire d’un film comme The Dark Knight, mais reconnaissons qu’il a le mérite d’essayer de mettre en place des thèmes, des schémas, des situations ni trop manichéens, ni trop prévisibles, ni trop niais, comparativement à la soupe qu’on nous sert habituellement. Accordons à Nolan un crédit d’indulgence, car il aurait pu faire de ces Batman purement et simplement des produits commerciaux, comme l’ont fait ses confrères avec d’autres franchises, alors qu’il a tenté, en multipliant les références, les clins d’oeil, de faire plaisir à un public connaisseur, ce qui, dans sa position, est déjà une tentative courageuse et appréciable.
M
par Basile
Ça n’est pas tant une question de passionnés. Je pense que l’immense majorité des fanboys de Batman ont adoré les films de Nolan, justement parce que les fans aimeront peu ou prou tout ce qui est estampillé du nom de leur héros préféré. Et si en plus on ajoute un vernis « intello/adulte/respectable »…
Le problème c’est que Nolan n’a pas la rigueur ni le courage pour faire vivre cette vision réaliste qu’il envisage. Il ne sait pas exploiter son concept autrement que par des procédés superficiels, il ne structure pas son histoire autour de son idée.
Confronter super héros et réalisme, c’est possible, mais il faut aller jusqu’au bout et montrer que les deux notions sont antagonistes. C’est ce qu’a fait Moore dans Watchmen, en franchissant un point de non-retour. Tout le contraire de Nolan avec The dark Knight où il réhabilite tant bien que mal son « héros » à la toute fin.
Et enfin, d’un pur point de vue cinématographique, The Dark Knight c’est bien fadasse.
par Oceanlook
Si The Dark Knight est fadasse d’un point de vue cinématographique, alors Iron Man II nous offre la gerbe assurément.
par Basile
Oh je les mettrais sur le même plan, assurément Favreau s’est bien planté sur son deuxième volet.
par Arkaron
@chewbee: ah oui, une part de mauvaise foi était indispensable pour faire ressentir au lecteur exactement ce que j’ai ressenti à la vision (ou plutôt re-vision) du deuxième opus de Nolan. Comme m’avait dit mon ami Basile autrefois, cet article n’a pas à rester le plus objectif possible (notion d’ailleurs tout à fait illusoire), puisque ça n’est pas une dissertation ni un travail universitaire. Je me suis donc permis beaucoup de second degré, sans quoi je n’aurais pu construire la partie sur les analogies avec les films les plus anciens, qui a pour but de faire gonfler l’argumentaire, de la même manière que le scénariste gonfle son film avec des dialogues n’ayant pour eux qu’une épaisseur d’apparence. Et précisons enfin que la partie se penchant sur la fin du film est minime, hein… personne ne réagit sur le traitement de Bruce Wayne, celui des personnages féminins, ou l’utilisation de la mythologie de Batman…
@Oceanlook: tout d’abord, merci pour ton commentaire, développé et intéressant.
Ensuite, je suis bien conscient, et même content, qu’aucune adaptation, qu’aucune oeuvre indépendante, ne sera jamais le travail « définitif » sur Batman, et que jamais, ô grand jamais, une oeuvre pourrait mettre tout le monde d’accord. Quel ennui ce serait! Non, je suis bien content que différents artistes se penchent sur le personnage, seulement voilà: ce que propose Nolan, ça ne me plait pas, et j’explique pourquoi. Suis-je trop exigent? Peut-être, mais je préfère niveler par le haut.
Concernant la question du public visé, je ne suis pas bien sûr que le débat soit nécessaire. Après tout, le film de Batman que je trouve le plus réussi est un film d’animation dont la première cible commerciale est le public 6-12 ans. Réussir à rendre ce film agréable à tous les spectateurs, sans sortir de la définition du personnage, c’est là tout le talent de l’équipe de Mask of the Phantasm.
Tu as raison sur le fait que beaucoup de films super-héroïques sont de peu d’intérêt, mais il y en a une poignée qui se situe dans le haut du panier. Pour rester dans le réalisme, Unbreakable propose quelque chose de totalement différent et sait développer une mythologie qui lui est propre. The Incredibles et The Iron Giant sont des films d’animation magnifiques qui réussissent le pari de « rafraichir » les poncifs du genre grâce à une gestion maîtrisée de leur diégèse. Tu me diras que ces films sont des projets originaux, certes, mais des films comme Batman Returns, X-Men 2 ou Spider-Man 1 & 2 sont de vraies réussites sur le thème du super-héros (pour des raisons tout à fait différentes, certes). Tout ça pour dire que selon moi, essayer de faire quelque chose qui sort des sentiers battus, c’est (très) bien. Encore faut-il savoir tenir en équilibre sur la définition du personnage manipulé, et rendre son scénario organique, et non artificiel…