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PIFFF 2024 : U Are the Universe, Strange Darling, The Assessement, The Rule of Jenny Pen, Ebony and Ivory

U Are The Universe (2024) de Pablo Ostrikov

Démarrons cette entrevue du PIFFF 2024 par le film qui a gagné l’Oeil d’Or (remis par le public), soit la récompense la plus prestigieuse du festival, et aussi le Prix Ciné+ Frisson, ce qui lui assure une diffusion TV : U Are The Universe !
Un premier long-métrage ukrainien dont la solide réputation s’est vite forgée depuis sa première au TIFFF, et qui étonne évidemment par le contexte de production qu’on imagine difficile, d’autant que l’acteur principal du film est actuellement sur le front avec la Russie ! 

Et le synopsis résonne en plus avec la situation actuelle, puisqu’on y suit un chauffeur spatial dont le métier consiste à acheminer des déchets nucléaires à l’autre bout du cosmos, dans des missions de quelques mois à bord de son vaisseau, seul avec une IA à bord.
Jusqu’au jour où une énorme explosion le sort de sa torpeur et pour cause : notre bonne vieille planète Terre n’est plus, et notre héros est le dernier être vivant dans l’univers !
Préparez-vous donc à passer une heure quarante enfermés avec lui dans sa boîte de conserve spatiale, dans une oeuvre qui bénéficie déjà d’une production et d’effets très soignés pour un film aussi modeste, ce qui permet d’asseoir tout du long son récit sans aucun soucis de crédibilité, ce qui n’est déjà pas une mince victoire.
Mais ce soin poussé sur la forme est au service d’un joli scénario, dont la froideur du personnage peut parfois surprendre, mais qui explore la dimension sociale de la race humaine et les sévices de la solitude extrême. On ne dira rien sur le fond de l’histoire pour ne pas révéler les nombreuses surprises du film, mais on peut quand même pointer du doigt certains rebondissements un peu téléphonés dans le genre, et pas franchement nécessaires,, d’autant que les influences se font grandement sentir, quand elles ne sont pas carrément revendiquées, en témoigne un hommage humoristique à 2001 l’Odyssée de l’Espace, ou la fameuse IA du film qui se déplace dans le vaisseau sur un rail avec un écran et rappelle fortement Gerty dans le Moon de Duncan Jones.

Malgré ces éléments, qui empêchent peut-être par moment Pablo Ostrikov de tirer pleinement son épingle du jeu, il en ressort pourtant un film plein de tendresse, remettant en perspective l’expérience humaine dans un contexte difficile, avec un très beau final qui résonne d’autant plus venant de l’Ukraine.
Une jolie réussite sur laquelle on espère une sortie prochaine.



Strange Darling (2024) de JT Mollner

Lui aussi précédé d’un bouche à oreilles élogieux depuis sa sortie américaine (même Kevin Bacon en dit du bien sur Twitter !), Strange Darling finira probablement sur une plateforme ou en DVD chez nous, et le PIFFF était l’occasion de rattraper cet exercice de style sur grand écran.
Un film qui se présente comme tel, en témoigne des cartons de chapitres tout du long, et le fait que le film commence par le chapitre 3, où une jeune femme est pourchassée par un type armé qui visiblement n’est pas là pour abattre un lapin. Chapitre 3 vous dites ? Hmm…
Évidemment, le procédé narratif retors du film, qui va vous présenter l’histoire dans le désordre, sert uniquement à tordre la perspective que l’on a sur celle-çi pour mieux vous surprendre, et ménager le suspense. On n’en dira là encore pas beaucoup plus pour ne pas “divulgâcher”, mais sachez juste que ce procédé un peu grossier vend déjà la mèche sur la nature twistée de cette histoire, et que la remise dans l’ordre de la trame en diminuerait grandement l’intérêt, tant Strange Darling n’a pas grand chose à proposer de notable en terme de mise en scène et de scénario passé son tour de passe-passe sur le point de vue.

Bref, ce coup-çi, le flacon a pris le pas sur l’ivresse.

The Assessment (2024) de Fleur Fortuné

Le nom de Fleur Fortuné ne vous parle sans doute pas, et pourtant vous avez peut-être déjà vu son travail, cette française ayant réalisé des clips pour M83 (Midnight City, c’était elle), Drake ou Travis Scott.
Elle franchit un cap dans sa carrière avec ce premier long-métrage au casting prestigieux, puisque The Assessment présente Elizabeth Olsen et Himesh Patel en couple dans un futur ravagé par le réchauffement climatique, où il faut passer un entretien pour avoir un enfant !
L’entretien en question va être mené par Alicia Vikander, qui joue une enquêtrice un peu spéciale s’installant pendant une semaine chez l’habitant pour mener à bien sa mission.
Et si ses questions étranges le premier jour perturbent déjà un peu nos parents potentiels, la situation va prendre une tournure toute autre quand la dame commencera à se comporter comme un enfant le lendemain…
Confrontant aussi bien le désir d’enfanter à une partie de la dure réalité de la parentalité tout en adressant en retour les questions d’eugénisme, de lutte des classes et du contrôle de la population, le concept de The Assessment parvient à couvrir une large partie des thèmes qui en découlent, tout en offrant un jeu du chat et de la souris aussi amusant que perturbant.
Vikander est d’une justesse de tous les instants, et offre une performance dense pour le moins spectaculaire, son personnage restant insaisissable du début à la fin, et permettant au récit d’être bourré de surprises, sans pour autant tomber dans les effets faciles, d’autant que le scénario a la bonne idée de creuser l’humain derrière la fonction.
Avec une direction artistique assez épurée, Fleur Fortuné esquisse un futur meurtri avec subtilité, et enferme via ses cadres très composés et rigides ses personnages dans une maison design, pour mieux laisser sa caméra s’exprimer en extérieur ou durant certains passages, et globalement il faut saluer à quel point le tout forme un long-métrage cohérent, tout en nuances, qui sait se faire pertinent sur chacun des aspects qu’il aborde, aussi bien la complexité de la parentalité, et les fantasmes parfois aberrants qu’elle comporte, tout comme la violence de la société sur le corps des femmes.
Le film rappelle d’ailleurs le récent Pod Generation, mais en allant beaucoup plus loin que celui-çi avec une peinture du monde pourtant plus symbolique.
Une vraie et belle réussite donc, achetée par Amazon pour une exploitation pour l’instant incertaine.
On espère que ça finira au cinéma, mais ça le mérite grandement.


The Rule of Jenny Pen (2024) de James Ashcroft

La vieillesse est paraît-il un naufrage, et ce n’est pas James Ashcroft qui va nous dire le contraire avec The Rule of Jenny Pen, dans lequel un juge fait une crise cardiaque en plein procès et finit dans une maison de retraite. Et bien qu’il pense en sortir très vite, sa peine va durer et s’accroître d’autant plus qu’il va tomber dans le giron d’un patient un peu spécial qui s’amuse la nuit à perturber ses camarades à l’aide d’une poupée de bébé… La chose va prendre des proportions délirantes, et le tout est l’occasion de mettre en opposition deux acteurs de premier choix, avec Geoffrey Rush dans le premier rôle (Barbossa dans Pirates des Caraïbes !) face à John Lithgow, qui continue de traîner la rengaine de fieffé salopard qui a fait sa carrière, de l’Esprit de Caïn à Dexter en passant par le tout récent Conclave.
Bon, on ne va pas y aller par 4 chemins, le résultat est bien décevant et repose intégralement sur la présence de comédiens aussi prestigieux, qui se traînent malheureusement un script bateau et longuet, qui se perd en circonvolutions narratives grotesques auxquelles il est difficile de croire, les employés du lieu étant visiblement aveugles, et les autres résidents semblant bien muets face à ce qui leur arrive.
Ca pourrait être un des éléments intéressants du film, sur le pouvoir de soumission d’une présence aussi toxique, mais The Rule of Jenny Pen peine à créer de la tension tant Lithgow est en roue libre, sans pour autant rendre le film vraiment drôle tant il ne trouve jamais sa voix et son juste ton.
Reste donc une série B horrifique longuette, sans rien de spécial à proposer.


Ebony and Ivory (2024) de Jim Hosking

Après la déception An Evening with Beverly Luff Linn, on espérait que Jim Hosking retrouverait vite son côté sale gosse et le mauvais goût extrême qui font le génie de The Greasy Strangler.
C’est presque chose faite avec Ebony and Ivory, qui imagine à sa sauce comment aurait pu se passer l’enregistrement de la chanson du même nom entre Stevie Wonder et Paul McCartney.

Bon, ici les superstars sont remplacées par des versions fictives, où une légende de la chanson noire américaine se rend sur la petite île écossaise de son comparse pour enregistrer, et les deux bougres vont passer le film à s’apprivoiser. N’attendez pas la moindre scène dans un studio avec des instruments, ici Jim Hosking reprend l’humour ultra absurde de Greasy Strangler, et plus particulièrement de la fameuse scène du “Porto !”, à savoir prendre une situation foireuse, avec un quiproquo ou des personnages qui ne se comprennent pas, et tiiiiiiiiirer le plus longtemps possible dessus.
Par exemple lorsque notre chanteur british, joué par son acteur fétiche Sky Elobar, propose de la marijuana à son invité, en lui demandant le petit nom qu’il a donné à la drogue, à savoir la “Dooby wooby”.
Et c’est parti pour 5 bonnes minutes de dialogues à tourner autour du nom en question (Booby Wooby ? Fooby Wooby ? X-Looby Wooby ?!), chaque partie du duo n’en démordant pas.

Vous trouvez ça hilarant ? Tant mieux ?
Insupportable ? Vous êtes mal barrés.

A vrai dire, chaque scène du film repose à peu près sur ce principe comique, étiré à l’extrême, et le tout donne l’impression de tomber tête la première dans la stupidité pure et grasse, les 2 bonhommes étant évidemment d’un égo délirant, et tenant tous les deux à avoir toujours raison, tout en étant en désaccord permanent.
Un vrai huis-clos chez les zinzins, qui possède de petites trouvailles ça et là d’univers plutôt fendardes (notamment une marque alimentaire déclinée à l’infini, ou alors la prononciation bien forcée sur certains mots, comme SCO-TTISH CO-TTAGE !!!!), mais qui prouve aussi ses limites quasiment instantanément, la faute à une absence d’intrigue de fond, le film consistant juste à aligner les scènes du même genre, sauf quand il opère quelques variations du genre “personnages qui dansent tout nus sur la plage sur une musique électro”. On est jamais loin du stoner movie, et le tout revendique fièrement la bêtise pure, ce qui peut provoquer une forme d’admiration, mais les abysses sont proches, et Ebony and Ivory se revendique fièrement comme un brain fart, un petit truc d’une connerie sans limites, réservée à ceux qui sont prêts à réellement mettre le cerveau sur OFF pour se gausser des engueulades redondantes de deux teubés finis.

Clairement, si vous trouvez que les meilleures blagues sont les plus courtes, fuyez.
Pour les autres, accrochez-vous !

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