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Critique : Zero Theorem
Le nouveau film de Terry Gilliam, Zero Theorem, est en salles depuis mercredi après une longue gestation.
Le scénario est en effet arrivé sur le bureau du producteur Richard D. Zanuck il y a quelques années, lequel voulait Ewan McGregor dans le rôle. Une fois Gilliam aux commandes, le réalisateur a ensuite approché Billy Bob Thornton, Jessica Biel et Al Pacino. Mais le tournage a été repoussé, Gilliam devant alors retravailler Docteur Parnassus suite au décès de Heath Ledger. Finalement tout s’est remis en route courant 2012.
Avec l’excellent Christoph Waltz dans le rôle principal.
Chaque long-métrage de Terry Gilliam est un phénomène en soi tant le réalisateur est connu aussi bien pour ses univers délirants que pour ses problèmes de production. Et plus le temps passe, plus il a bien du mal à sortir des films que les distributeurs ne savent pas vendre. Huit ans après Tideland, que personne n’a vu, le Monty Python revient avec une histoire particulière pour lui puisqu’il n’en est pas le scénariste. On doit en effet l’histoire au débutant Pat Rushin qui dit s’être inspiré de l’Ecclesiaste, un livre de la Bible dans lequel le personnage de Qohelet s’intéresse au sens de la vie. Sachant qu’à l’écriture, Rushin s’est inspiré de Brazil, il semblait tout naturel de se tourner vers Gilliam pour la mise en scène.
L’histoire se déroule donc dans un futur ultra-connecté. Qohen (sans U, c’est important) travaille pour Management sur des données désormais contenues dans des sortes de tube à essais. Il doit travailler vite pour éviter que la courbe du chômage ne monte. Mais dans un univers où il y a des écrans partout, où tout est fluo et coloré et où tout le monde est plutôt bizarre, Qohen n’aspire qu’à une chose : rentrer chez lui pour éviter les gens et passer de cet univers multicolore à l’obscurité de l’ancienne église qu’il occupe. Lors d’une soirée où il fait aussi la connaissance de Mélanie Thierry, Christoph Waltz (absolument parfait en Qohen) se voit confier une mission par Management : trouver la solution au Zero Theorem et travailler depuis chez lui pour cela.

A l’image de Brazil, Terry Gilliam évoque dans son film les défauts d’une société ultra-connectée où les gens écoutent leur propre musique en soirée tout en se filmant en mode selfie, où l’informatique est absolument partout et tout est contrôlé, dirigé, et surveillé. Mais s’il y a une réelle volonté de dénonciation, on sent quand même un certain retard de la part du réalisateur. Bien que présent sur les réseaux sociaux et à 73 ans, le réalisateur prend la poussière quand il évoque un sujet qu’il ne maitrise pas totalement. Non, être connecté en permanence n’est pas forcément un problème.
Le personnage de Qohen -l’allusion biblique est énorme, puisqu’il s’appelle presque comme l’Ecclesiaste et vit dans une église- va néanmoins perdre son âme au fur et à mesure que l’histoire avance et qu’il s’enfonce dans la « solitude » (avec des guillemets puisque plusieurs personnages passeront régulièrement le voir). Plus il travaillera, hyper connecté, sur le théorème zéro plus il perdra son humanité devenant « informatique ». C’est d’autant plus le cas que s’il refuse le moindre contact physique avec Mélanie Thierry, il ne résistera pas longtemps à la rejoindre dans l’univers virtuel du cybersexe.
Tout cela est intéressant, la mise en scène est soignée et l’univers futuriste particulièrement réussi. Malheureusement, Gilliam tire son sujet en longueur et perd le spectateur en route. Il le perd d’autant plus que la fin aurait mérité plus d’explication. On en ressort avec une grosse sensation de « et si tout ça n’avait aucun sens ? »

Au final, si le scénario de Pat Rushin sied parfaitement à Terry Gilliam, et si on sent que le réalisateur a encore des choses à dire en ce qui concerne notre avenir et les environnements à Brazil, on ne peut que déplorer un manque de rythme et une fin dont on n’a pas toutes les clefs pour la comprendre. Un peu dommage. Il est maintenant temps pour Gilliam de passer à autre chose. Comme filmer un chevalier combattant des moulins à vent.
Zero Theorem – Sortie le 25 juin 2014
Réalisé par Terry Gilliam
Avec Christoph Waltz, David Thewlis, Mélanie Thierry
Londres, dans un avenir proche. Les avancées technologiques ont placé le monde sous la surveillance d’une autorité invisible et toute-puissante : Management. Qohen Leth, génie de l’informatique, vit en reclus dans une chapelle abandonnée où il attend désespérément l’appel téléphonique qui lui apportera les réponses à toutes les questions qu’il se pose. Management le fait travailler sur un projet secret visant à décrypter le but de l’Existence – ou son absence de finalité – une bonne fois pour toutes. La solitude de Qohen est interrompue par les visites des émissaires de Management : Bob, le fils prodige de Management et Bainsley, une jeune femme mystérieuse qui tente de le séduire. Malgré toute sa science, ce n’est que lorsqu’il aura éprouvé la force du sentiment amoureux et du désir que Qohen pourra enfin comprendre le sens de la vie…
3 commentaire
par rezga
Je l’ai vu hier… et je vous avouerais que j’ai pas compris grand chose… un peu comme il est dit dans la critique quel est le sens de tout ça au final…
[SPOILER]
à quoi sert Bob ?
Qui sont exactement les deux malabars ?
Q travaille il pour Management ou management s’en sert il comme d’une expérience ?
Bref c’est esthétiquement très intéressant comme toujours avec Gilliam mais le film en lui même me laisse perplexe :/
par Le Marginal Magnifique
Décidément Gilliam me déçoit ! Ce film ne vaut pas grand chose…
par Franfran
Je viens de voir ce film.
Etant plutôt alambiqué, j’ai recherché quelques critiques sur ce film.
Ainsi, après avoir lu cette chronique, je pense que plus que les problèmes d’une société ultra connectée, que vous ne devez voir que par le filtre d’une connexion internet nécessaire au site et à la communication internet, ce film représente la principale question de l’humanité : Pourquoi existons nous ?
En effet, plusieurs livres/recueils/ouvrages/films etc ont essayé d’aborder la question, et après réflexion, je pense que ce film est la manière la plus simple d’aborder cette question, et celle qui y répond de la manière la plus claire possible : Votre existence n’a de sens que celle que vous lui donnez. Peu importe ce que vous faites, si vous n’y croyez pas, votre existence n’aura aucun but.
Je dois admettre que cette vision du film ne m’est arrivée que sur la fin, après la fin d’une bouteille de vin, ce qui me fait penser que le film entier n’est qu’une illusion pour montrer seulement la scène finale, qui permet de se rendre compte que l’existence de l’homme n’est conditionnée qu’à sa propre perception des choses.
Et pour finir, j’ai aimé ce film, j’ai détesté le personnage principal, effet volontaire de Mr Monthy Python.
Certes, comme la plupart des ouvrages de Terry gilliam, ce film est à consommer avec une certaine quantité d’alcool pour être compris dans son ensemble.
J’espère que vous aurez l’occasion de le voir dans le même état que moi !