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Critique : Légitime Défense

On aura beau se plaindre de la platitude de notre cinéma national, force est de constater que celui ci se bouge quelque peu ces derniers temps, notamment en matière de polar.

Les représentants défilent de plus en plus nombreux et nous avons eu ici même l’occasion de parler de certains, le résultat allant du grand n’importe quoi (L’Immortel) au fort plaisant (A Bout Portant).
L’année 2011 semble ne pas vouloir déroger à la règle puisque plusieurs nouveaux prétendants vont faire leur apparition prochainement sur les écrans, dont Légitime Défense, premier film de Pierre Lacan.

Et un polar en premier long métrage, c’est déjà suffisant pour titiller notre curiosité…

 

Légitime Défense – Sortie le 16 mars 2011
Réalisé par Pierre Lacan
Avec Jean-Paul Rouve, Claude Brasseur, Olivier Gourmet
Benoît, jeune père de famille, mène une vie heureuse et sans histoire. Un jour, son père détective privé, disparaît mystérieusement. Benoît va découvrir la part d’ombre d’un père qu’il pensait connaître. Et pour la première fois, il va devoir se battre pour sauver sa peau et protéger les siens.

 

Pierre Lacan a le mérite d’interpeler par son parcours car si il est question de son premier long, il a déjà réalisé 4 courts métrages et a une carrière d’acteur derrière lui, ce qui est toujours bon signe concernant la direction de comédiens devant la caméra.
Et en parlant de ces derniers, le casting n’a par ailleurs rien d’honteux avec notamment Olivier Gourmet et Claude Brasseur en seconds rôles pour épauler un Jean-Paul Rouve qu’on attendait pas vraiment dans ce registre mais dont l’humanité dégagée dans certains de ses rôles par le passé pouvait trouver ici un écho certain.
Histoire de mettre toutes les chances de son côté, le réalisateur a opéré un choix plutôt original pour l’histoire : si le film est adapté du roman Terminus Plage d’Alain Wagneur, il en suit en réalité seulement une des nombreuses intrigues qui parsème le livre.
Une adaptation libre donc, avec cette histoire d’un homme devant partir à la recherche d’un père disparu et au passé plus mystérieux et lourd qu’il n’y paraît.
Avec ces cartes en main, Pierre Lacan semblait bien parti pour livrer un polar efficace.
Pourtant, le résultat s’avère pour le moins décousu…

Le réalisateur fait globalement face à des problématiques qui vont de paire avec les choix opérés pour son film. La volonté de poser son polar au sein d’un univers tout à fait commun et de prendre comme héros un personnage comme vous et moi, un monsieur tout le monde, ne date pas d’hier. La formule a déjà fait ses preuves même et se révèle symptomatique des grandes forces du genre : interroger l’humain sur sa capacité à réagir à des situations extrêmes et faire appel au spectateur pour lui poser les mêmes questions, voir jusqu’où il serait près à aller pour sauver sa peau et celles des siens.
C’est aussi face au succès de cette recette, pour le moins éculée, que Pierre Lacan semble démuni tant il rentre tête baissée dans le genre, quitte à embarquer tous les clichés en passant.
Ainsi, l’histoire donne très rapidement la désagréable impression de déjà-vu tant il faut bien avouer qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil là dedans alors que chaque situation et chaque personnage répond à une logique ou à une mécanique récurrente du polar.

Le problème étant que le réalisateur peine à se détacher de ces rouages connus et par là même n’arrive pas à donner vie à ses personnages qui jouent aux voleurs et aux gendarmes devant la caméra sans que jamais nous n’arrivions à vraiment rentrer dans le film et à simplement être avec eux.
Peut être même conscient de certaines faiblesses de son film et de son rythme pour le moins bordélique comme le montre une première demi-heure montée en accélérée et s’amusant à envoyer le plus d’informations possible à chaque seconde, le réalisateur va tenter un effet de style qui s’avèreront être un véritable échec.
Histoire de donner de la tension rapidement à son récit et durant l’exposition, Lacan a intercalé certains plans d’une scène avec Rouve en difficulté durant la première demi heure, scène qui a précisément lieu après ce premier tiers de film.
La volonté de placer ces flash-forward pour nous mettre dans l’expectative peut sembler légitime sur le papier mais l’exercice à l’image fait sortir le spectateur du film à chaque fois tant il tranche par son ambiance avec les autres scènes, ne serait ce qu’avec la musique qui apparaît et disparaît aussitôt dans le montage cut.

Si on s’attarde autant sur ce point là qui à priori ne semble qu’être un détail dans le film, c’est parce qu’il représente parfaitement le reste du long métrage : les intentions sont bonnes mais la sauce ne prend pas et irait même jusqu’à produire l’inverse.
Alors attention, tout n’est pas mauvais et on sent un réel désir de cinéma, ne serait ce qu’avec une violence montrée sans détour et sans en faire des caisses, tout comme une mise en scène qui s’en sort pas trop mal avec certains passages inévitables tels les quelques poursuites qui parsèment l’aventure.
Il en est de même chez les acteurs qui, sans être tous très bons, tentent de s’impliquer dans un scénario dont on imagine aisément les faiblesses d’écriture, donnant trop peu de matière aux comédiens pour élever leurs rôles.
Nous pourrions même appliquer le raisonnement à tout le film mais toujours est t’il que vous avez compris ou nous voulions en venir.

Légitime Défense est l’exemple même du film qu’il est très facile de descendre malgré ses velléités et une véritable envie de bien faire. Ne tirons pas sur l’ambulance (d’autres le feront à notre place), celle ci n’est pas déshonorable mais simplement trop peu expérimentée, ce que l’on ressent constamment dans ce film à l’écriture trop aléatoire et quelconque pour que le public s’en souvienne.

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