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Critique : Birdman
La cérémonie des Oscars se tiendra ce dimanche aux Etats-Unis.
Les grands nommés déjà évoqués sur CloneWeb sont The Grand Budapest Hotel (9 statuettes potentielles), The Imitation Game (8 nominations), American Sniper (6), Boyhood (6), Une Merveille Histoire de Temps (5) et Whiplash (5). Il en manquait un, le fameux Birdman du non moins excellent Alejandro González Iñárritu en tête des pronostiques à égalité avec le film de Wes Anderson.
Birdman prendra son envol dans le mercredi 25 février prochain.
LA CRITIQUE
Comme il l’explique en plein tournage de The Revenant avec Leonardo di Caprio, Alejandro González Iñárritu est un cinéaste aimant les défis et repousser les limites de son art. Après le film-puzzle (21 Grammes) ou le récit choral (Babel), il revient donc avec un long-métrage tourné en un seul plan-séquence (truqué, on y reviendra) évoquant le cinéma lui-même. Un sujet riche que le réalisateur a subjugué en s’entourant des meilleurs. Birdman est l’une des premières grosses claques de 2015.
Le film raconte l’histoire de Riggan Thomson, incarné par Michael Keaton. Il a joué le super-héros Birdman au cinéma. Le troisième film fut la suite de trop et sa carrière s’est effondrée. Aujourd’hui, il essaye de monter une pièce de théâtre à Broadway dans laquelle il tient le rôle principal. Le métrage s’ouvre donc, après un plan sur une météorite (!), sur Keaton dans les coulisses de sa pièce. La caméra va le suivre s’habillant pour rejoindre les répétitions et ne plus le lacher pendant deux heures de haute volée.
Techniquement, le seul film comparable avec Birdman est Gravity. Ca tombe bien, les deux réalisations partagent un point commun, le génial directeur de la photographie Emmanuel Lubezki, véritable artisan de l’image qui fait ici de de nouvelles prouesses. Les deux films vont chercher à immerger le spectateur au plus près de l’action, à travers de très longs plans séquences. Birdman, d’ailleurs, ne cherche qu’à être un seul et unique plan. Je sais qu’il y a forcément eu des coupes, mais on a bien du mal à les repérer. C’est une certitude : Iñárritu a tourné de très longues séquences avec ses acteurs, les poussant à être vraiment exceptionnels (même Zach Galifianakis, c’est dire). Les nominations du film sont donc pleinement justifiés, surtout pour Michael Keaton totalement au dessus de la mêlée.
Aurait-il pu se sentir inspiré ? On ne peut s’empêcher de voir un parallèle entre la carrière de l’acteur (qui a incarné la meilleure version « live » de Batman, faut-il le rappeler ?) et celle de son personnage, Keaton n’ayant pas tourné grand chose de palpitant depuis son passage devant la caméra de Tim Burton et ne remontant sur le devant de la scène que grâce à Birdman.
Au delà, Iñárritu parle de cinéma. A travers un récit qui se complexifie au fil du temps, jouant avec la mise en abime, parfois « meta », Iñárritu évoque de long en large les acteurs, leurs métiers, la difficulté des productions indépendantes actuelles et l’envie de buzz des gros studios aux dépends de la qualité. Je retiendrai notamment une scène fantasmée où des acteurs costumés en Iron Man, Bumblebee et Spider-Man s’affrontent sur la scène du théâtre, histoire de tacler les grosses franchises qui ne laissent que peu de places à la concurrence. Je n’oublierai pas non plus des lignes de dialogues finement ciselées entre le personnage de Keaton et une critique, celui-ci lui reprochant de faire de grandes et belles phrases et des comparaisons qui n’ont pas de sens au lieu de s’intéresser à l’histoire et à la technique. Grâce au parcours du héros, Iñárritu parle donc de ce qu’il connait, de là à faire un film légèrement nombriliste et qui pourrait perdre en route quelques spectateurs, de par sa construction mêlant rêves et réalités et par des propos tenus qui peuvent désarçonner les non-spécialistes.
Néanmoins, et même s’il lui manque un petit quelque chose pour m’apporter des frissons ou me donner envie de pleurer, plusieurs jours après la projection et alors que ces lignes sont écrites, des scènes de Birdman me restent encore en tête, le film continue de me hanter. Je repense à cette scène, où la caméra se fixe sur un immeuble pour montrer que le temps passe et que le plan-séquence va reprendre. Iñárritu change l’angle de sa caméra pour donner l’impression qu’un mur d’immeuble sort du sol à la manière d’un décor de théâtre que l’on déplace. Je songe aussi à ces plans où des personnages qu’on vient de croiser dans la séquence coté coulisses se retrouvent immédiatement sur scène, nous perdant dans l’espace et le temps, mais rappelant que tout est possible une fois le rideau levé.
Globalement, je pense encore à la gestion du plan-séquence, à ses raccords parfaitement utilisés et à son utilisation totalement au service de la narration.
Je n’oublierai pas non plus de mentionner la musique du film composée par Antonio Sanchez et qui se compose majoritairement d’une batterie. Oui, une seule batterie dont les notes résonnent en rythme avec l’action et sont parfois remplacées par un violon.
Grâce à au traitement de son sujet, au talent de ses acteurs et la virtuosité de sa mise en scène Birdman reste longtemps en tête. C’est ça le grand cinéma.
Birdman – Sortie le 25 février 2015
Réalisé par Alejandro González Iñárritu
Avec Michael Keaton, Zach Galifianakis, Edward Norton
À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego…
S’il s’en sort, le rideau a une chance de s’ouvrir…
1 commentaire
par Bruce Wayne
Une de tes meilleures critiques Marc. C’est bon de sentir le ressenti de l’auteur dans un article.