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Dead Reckoning est le terme anglais pour la navigation à l’estime, une technique qui consiste à déduire la position d’un véhicule dans l’aide d’instruments électroniques. A l’ancienne. Un sujet, derrière ce terme obscur, au coeur de la troisième collaboration entre Christopher McQuarrie et Tom Cruise, qui renfile une nouvelle fois le costume d’Ethan Hunt dans ce qui est désormais la meilleure franchise d’action actuelle.
Oubliez John Wick, Tyler Rake et autre Dom Torreto. Le héros du cinéma d’action, c’est Tom Cruise. Point. Un héros qui cette fois va se retrouver confronté à un ennemi aussi inattendu que d’actualité : une intelligence artificielle capable de tout contrôler, un genre de Skynet qui a toujours un coup d’avance sur tout le monde et qui va attirer toutes les convoitises. L’enjeu est de récupérer les deux parties d’une clef capable, probablement, d’arrêter la machine. Pour cela, Hunt et son équipe de l’IMF vont d’abord s’attaquer aux agences américaines puis au reste du monde. Personne ne doit mettre la main sur une IA, ni un gouvernement ni un autre.
Alors, forcément, il va se retrouver avec tout un tas de méchants et de flics aux fesses à travers 2h30 qu’on ne voit pas pas passer de jeu de chat et de souris. N’oubliant jamais la série à l’origine des films, Christopher McQuarrie livre un monument d’action où certaines missions semblent sortie d’un épisode original quand d’autres sont des « set pieces » bluffants. Mais le réalisateur prend aussi le spectateur par surprise en citant ouvertement Lupin III dans une folle course-poursuite à travers Rome mais aussi via un nouveau personnage incarné par Shea Wingham, un flic qui a toujours un train de retard sur nos gentils voleurs. Il reboucle aussi avec le premier volet, sorti il y a 28 ans, puisqu’il remet en avant le personnage de Eugene Kittridge, le chef de l’IMF dans le film de Brian de Palma.
Evidemment, un épisode de Mission Impossible ressemble à un autre. Hunt court partout, se faire trahir, tabasser et se lance dans des cascades cinglées. De fait, la chute en moto que vous avez vue dans la promo est impressionnante mais McQuarrie a d’autres cartes en manche dont un final à bord d’un train semblant tout droit sorti du jeu vidéo Uncharted et pour lequel la production a littéralement fait exploser un pont dans les montagnes polonaises. Et pourtant, McQuarrie et Cruise parviennent à se renouveler. En cherchant à être plus fidèle par certains aspects à la série d’origine (c’est le grand retour des masques !) ou en fabricant un méchant humain plus intéressant que par le passé (qui se souvient du bad guys de Ghost Protocol ?).
Enfin, et contrairement aux films coupés en deux récents, Dead Reckoning ne se termine pas sur un insupportable cliffhanger, mais sur une vraie film aux portes ouvertes.
Si cet épisode avait été écrit il y a quelques années, on aurait crié à la science fiction. Mais l’utilisation de l’intelligence artificielle résonne ici froidement avec l’actualité. Et difficile de ne pas y voir un aspect meta. A l’inverse d’un Fast and Furious ou d’un John Wick multipliant les fonds verts (et ne parlons pas de The Flash), Dead Reckoning a le plus souvent possible été tourné dans des décors réels, avec des acteurs faisant vraiment leurs cascades. Du tournage à l’ancienne, de l’analogique face à la montée en puissance incontrôlable du numérique. A travers son travail, McQuarrie rappelle que c’est sa méthode qui fait des entrées à Hollywood et se pose en efficace gardien d’une méthode trop vite jetée aux oubliettes.
On vous rabâche les oreilles sur tous ces blockbusters sortis d’Hollywood et dont on a l’impression qu’ils ont été écrits par des IA (!), de Transformers Rise of the Beasts à The Flash en passant par les Chevaliers du Zodiaque. Avec Dead Reckoning, Cruise et McQuarrie font tout l’inverse, livrant un film intelligent, ultra dense, super rythmé et porté par les meilleurs scènes d’actions de ses derniers mois. Cruise avait sauvé le cul d’Hollywood. Il continue à ne pas naviguer à vue.
Mission Impossible Dead Reckoning Part I, de Christopher McQuarrie – Sortie en salles le 12 juillet 2023