Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

Critique : As Bestas

Rodrigo Sorogoyen sait-il tout raconter ? A seulement 40 ans et en une poignée de longs métrages, le réalisateur espagnol a montré qu’il était une bête de metteur en scène, capable d’un thriller politique (El Reino), un drame familial (Madre) ou même une série policière (la formidable Antidisturbios). Pour son nouveau long, As Bestas, il a embauché Denis Menochet et Marina Foïs et les a emmener tourner en Galice et en Espagnol.

Antoine et Olga, deux Français, sont installés dans les montagnes de Galice. Ils y cultivent des légumes en bio et retapent comme ils peuvent les maisons d’un village qui se dépeuple. Peu appréciés car étrangers, ils vont s’opposer à l’installation d’éoliennes, et déclencher les foudres de leurs voisins, deux frères qui vivent chez leur mère à cinquante balais.

Le film s’ouvre sur un ballet d' »aloitadores », des hommes immobilisant un cheval pour lui couper la crinière et le marquer, sorte de chorégraphie à la fois belle et douloureuse qui servira de métaphore à la suite, dans ce qui serait résumé trop simplement comme un conflit de voisinage. Pendant plus d’une heure, Rodrigo Sorogoyen va nous montrer la campagne galicienne, les villages abandonnés, la pauvreté et ceux qui tentent de s’en sortir. La situation aurait pu être filmée de l’autre coté des Pyrénnées tant la désertification de certaines campagnes est toujours un sujet. On y découvre l’opposition entre les vieux natifs installés depuis longtemps et ceux qui viennent s’y installer.

Doucement mais surement, le réalisateur va nous montrer la montée en puissance qui oppose deux voisins, en jouant sur la longueur de son récit et les saisons qui passent mais pour mieux donner de l’ampleur à un sujet en apparence anodin mais en réalité très important pour ceux qui le vivent. Denis Menochet et Marina Foïs sont tous les deux impeccables mais citons surtout Luis Zahera et Diego Anido, les deux frères espagnols, absolument remarquables.

En mettant sa réalisation au service de l’histoire, Sorogoyen va livrer quelques séquences incroyables de tension, dont un face à face en plan séquence fixe de pratiquement dix minutes, pivot du film, pendant lesquels les deux opposés vont tenter de discuter. Il réitérera la prouesse dans le dernier acte du récit, où la fille des deux Français, jouée par l’ébouriffante Marie Colomb, viendra ajouter sa pièce à l’histoire. On pense encore à son face à face avec Marina Fois, plusieurs jours après avoir vu le film.

Le dernier acte, d’ailleurs, prend le spectateur a rebrousse-poil. En basculant le point de vue principal, le réalisateur offre un virage inattendu et on se fait cueillir par la surprise. Difficile d’en dire plus sans spoiler ouvertement la résolution du conflit mais ce changement offre un nouveau souffle à une intrigue déjà bien tendue et oppressante.

Avec ce nouveau long, Rodrigo Sorogoyen confirme que son début de carrière n’était pas un accident. As Bestas est un thriller nerveux, oppressant qui prend son spectateur à la gorge pour mieux lui montrer la dureté d’une réalité. Immanquable.

As Bestas, de Rodrigo Sorogoyen – Sortie en salles le 20 juillet

Voir les commentairesFermer

Laisser un commentaire