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Critique : Madre

C’était d’abord un court métrage qui a valu à son réalisateur un Goya en 2017. C’est désormais un long : Rodrigo Sorogoyen a décidé de raconter l’histoire se déroulant après le court. Madre sort dans les salles ce 22 juillet.

 

LA CRITIQUE

L’année dernière, le réalisateur espagnol Rodrigo Sorogoyen  se faisait remarquer avec l’excellent thriller politique El Reino et ses sept Goya dont Meilleur Réalisateur et Meilleur Scénario. Même sans rien connaitre aux partis qui gouvernent l’Espagne, on se faisait happer par les personnages, l’intrigue et le rythme insufflé par le metteur en scène. Aujourd’hui, Sorogoyen revient avec un nouveau long métrage tourné dans le Sud de la France et qui, s’il est bien différent, nous confirme tout le bien qu’on pensait de lui.

Madre s’ouvre sur un impressionnant plan-séquence d’une douzaine de minutes révélant tout le talent de Marta Nieto, plan séquence qui est en réalité le court métrage initial. Au téléphone dans son appartement espagnol, elle va parler à son jeune fils juste avant qu’il ne disparaisse. La mise en scène de Sorogoyen  et le jeu de la comédienne en font une séquence rythmée, poisseuse, glaçante. Puis un fondu au noir vient nous expliquer que le reste de l’intrigue se passe dix ans plus tard. On retrouve alors la mère sur la cote française où son fils a disparu une décennie auparavant. Elle travaille dans un petit resto local, tentant tant bien que mal de mener une barque qui va être bousculée par l’arrivée d’un jeune homme qui lui fait penser à son fils.

On pouvait s’attendre à ce que Madre soit un thriller, que le doute sur l’identité du jeune homme que l’héroïne se met à suivre soit permis. Mais Rodrigo Sorogoyen  prend le spectateur à rebrousse poil pour lui proposer un drame intimiste sur le deuil d’une mère. Il oppose d’un coup le rythme effréné du plan séquence d’introduction à la lenteur de l’été, l’étroitesse de l’appartement espagnol aux grands espaces des plages françaises. Et il alterne plans très larges (les acteurs sont souvent filmés de loin, comme pour ne pas les déranger) avec des gros plans en courte focale déformant presque l’image.

La relation entre la mère et le jeune garçon, impeccable Jules Porier, est toute aussi surprenante. Elle a perdu son fils et lui a des difficultés parentales. On aurait donc pu s’attendre à ce qu’ils se trouvent un parent de substitution. Mais Sorogoyen  brouille les pistes et, avec elles, les émotions. Leur histoire va virer à quelque chose de plus personnel, de plus intime, de plus fort aussi mais sans jamais sombre ni dans le pathos ni dans la facilité. Ce sont deux personnes à qui il manque quelque chose mais aussi deux adultes très seuls. Alors, le réalisateur sème le doute avec quelques plans, quelques instants fugaces, où tout finit par se mélanger.

Même si l’issue de leur relation, et donc du film, est prévisible, difficile de ne pas passer tout le long métrage à se faire surprendre par un très grand réalisateur.

Madre, de Rodrigo Sorogoyen – Sortie le 22 juillet 2020

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