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PIFFF 2021 : V/H/S 94, See For Me

Le Paris International Fantastic Film Festival s’est terminé ce 7 décembre au Max Linder Panorama, couronnant Bull de Paul Andrew William de l’Oeil d’Or et du Prix Ciné Frissons. De notre coté on a retenu trois films : V/H/S 94, See For Me et le classique Ebola Syndrome mais aussi The Sadness (prochainement en DVD en France) et In The Earth de Ben Wheatley, qu’on avait vu à Neuchâtel et qui a fait ici office de film de clôture.

V/H/S 94 (2021) de Simon Barrett, Steven Kostanski, Chloe Okuno, Ryan Prows, Jennifer Reeder & Timo Tjahjanto

On avait déjà croisé le chemin de la franchise V/H/S en festival pour le deuxième épisode, et après un troisième opus intitulé Viral, voilà que les folles cassettes remettent le couvert en s’adaptant au monde d’après.
Et oui, VHS ne sort plus en DVD (!) mais directement en streaming, cette nouvelle fournée étant produite par la plateforme américaine Shudder dédiée au cinéma d’horreur.

A part ça, le concept est sensiblement le même, avec un pitch prétexte pour enchaîner les courts métrages horrifiques. Ici un raid commando sur un hangar étrange, où les membres du SWAT vont petit à petit découvrir des salles jonchées de cadavres aux yeux arrachés devant des écrans de toute sorte, qui serviront d’autant de transitions pour lancer les diverses joyeusetés de ce V/H/S 94.

Et vous connaissez trop la formule : qui dit film à sketches dit buffet avec à boire et à manger, même si cette fournée s’avère assez satisfaisante. Il faut dire que la franchise a toujours été un laboratoire à conneries gores, qui jongle entre les récits essayant de faire montrer le trouillomètre à l’excès et les feux d’artifices d’hémoglobine. On passera sur une histoire lors d’une veillée mortuaire qui est sans doute la plus anodine, mais on appréciera en revanche un reportage pour un JT d’information où la journaliste et son caméraman, venus enquêtes sur la légende urbaine de l’homme-rat, vont s’aventurer un peu trop loin dans les égouts. Célébrant le principe du creepy pasta, ce segment réussit assez humblement à faire monter la pression, en utilisant certes tous les trucs et astuces de la mise en scène found-footage, mais avec un dispositif qui fonctionne parfaitement le court temps du sujet. Dans un tout autre délire, il faut saluer un détour chez une bande de rednecks complètement débiles qui veulent utiliser un homme mystérieux qui ressuscite chaque matin malgré sa mise à mort quotidienne pour faire un attentat. Allant piocher allègrement dans l’imagerie militaire des groupes complotistes armés américains, adeptes de Trump avec un peu trop de testostérone à la place des neurones, cette partie là se moque allégrement de ce genre de couillons en cultivant un certain malaise face à leur bêtise crasse et leur amateurisme total, qui jure totalement avec leur projet révolutionnaire de grande ampleur, et leur foi inébranlable dans Jésus Christ.

Mais le top des réjouissances, c’est surtout le retour de Timo Tjahjanto, le réalisateur indonésien complètement zinzin derrière The Night Comes for Us, qui avait déjà officié sur le meilleur segment de V/H/S 2 en compagnie de Gareth Evans, le papa de The Raid.
De retour seul aux commandes, il livre un segment d’abord étrange puis réjouissant, avec un docteur fou dans son laboratoire crasseux qui mène des expériences sur des gens kidnappés pour modifier leur corps à grand coup de technologie old-school et archaïque.
Très vite, on passe du point de vue d’une des victimes, qui va se retourner contre son bourreau durant un assaut des forces de l’ordre.
Excessif, super bourrin et proposant un imaginaire analogique, comme si le cyberpunk et le transhumanisme n’avaient jamais dépassés les années 90, c’est un gros bordel généreux malgré une facture un peu cheap par moment, ce qui est contrebalancé par des explosions de tripaille en pagaille et un crescendo assez jubilatoire.

Au final, la formule V/H/S se porte toujours bien, donnant l’impression de voir un mini festival de genre le temps d’un film, avec des essais d’une nouvelle garde du cinéma d’horreur qui a ici les mains libres pour expérimenter, pourvu que l’image soit un peu dégueu comme si elle sortait bel et bien d’une cassette vidéo. Le résultat est loin d’être finaud, mais son caractère hautement récréatif et carnavalesque fait amplement le boulot.


Ebola Syndrome (1996) de Herman Yau

Dans la liste des films qui se traînent de sacrées réputations d’objets nocifs, Ebola Syndrome a toujours porté une place de choix, particulièrement chez les fans de nanars dégueux.
Vous savez, le genre de long-métrage ultra borderline, qui ne respecte rien ni personne, et qui dépasse toutes les bornes.
Et pour cause, puisque le « héros », si on peut l’appeler ainsi, est une ordure de premier choix. Pas juste un doux salopard qui a quelques casseroles à son actif, non, non.
Une merde sans nom. Un véritable déchet humain. Le genre de mec qui vous fait reconsidérer la question de l’utilité de l’humain !

Pourquoi ? Et bien parce que Kaï, c’est son nom, commence le film en se faisant prendre sur le fait par son boss alors qu’il s’envoie en l’air avec la femme de ce dernier.
Jusqu’ici, tout va bien, sauf que la situation va dégénérer, et le type va donc tuer son patron, et couper la langue de la pauvre femme. Et pourtant, ce n’est que le début.
Kaï passe ainsi dire le film à injurier tout ce qui bouge, à violer dès qu’il peut et à souiller tout ce qu’il touche, à tel point qu’il va finir lors d’une visite professionnelle dans un village indigène en Afrique du Sud par violer une femme croisée au bord d’un lac.
Sauf que celle-ci est atteinte d’Ebola et va donc le refiler à notre champion, qui rentre dans l’extrêmement rare catégorie des porteurs sains.
Ainsi notre connard de service va répandre la maladie partout où il va passer au fil de ses frasques atroces, où absolument tout le monde peut en prendre pour son grade, y compris les enfants !

Le film suit donc les frasques absurdes de cet enfoiré numéro 1 et l’enquête qui court après les victimes d’Ebola pour retrouver la cause, à mesure que la pandémie se répand…

Soyons honnêtes : si Ebola Syndrome n’a jamais été un grand film, s’avère trop long et finit par tourner en rond, il reste cet objet singulier, complètement flingué du bulbe, qui revendique le droit de briser tous les tabous, de se vautrer dans le mauvais goût le plus total et de rire des pires horreurs imaginables. Même le public du PIFFF, pourtant client de ce genre de spécimen, semblait parfois estomaqué devant le niveau de connerie ambiant, et on sentait bien que la vague #MeToo était passée par là, l’avalanche de viols peinant parfois à faire rire, même si certaines vannes ultra noires font toujours leur effet. Toujours est-il qu’on tient là un vrai OVNI qui ravira tous les amateurs de pellicule déviante, et qui risque de provoquer toujours autant d’hallucination devant les atrocités qui s’y déroulent en toute décontraction, la morale la plus simple étant bafouée dès la première scène, avant d’être rouée de coups, écrasée, tailladée en petits morceaux ensuite hachés puis cramés, avant d’être enterrée, déterrée, recomposée puis ressuscitée pour mieux recommencer !

Un vrai délire complètement taré, que nos amis de chez Spectrum Films se feront un honneur de ressortir en blu-ray l’année prochaine dans une copie flamboyante…

See for Me (2021) de Randall Okita

Le PIFFF nous avait déjà fait le coup de la bonne petite série B sortie de nulle part en 2019 avec I See You. Sauf qu’on l’avait raté, et on ne remerciera jamais assez Stéphane Bouley de nous avoir poussé à un rattrapage fort utile pour un épisode d’Happy Hour !
On a retenu la leçon en tout cas puisqu’on était présent pour découvrir cette année See For Me, qui partage un mot dans son titre (super !) et surtout le même distributeur Program Store, adepte du genre. Et visiblement, c’est une formule qui marche !

Déjà, See for Me repose sur un concept simple et intriguant : une adolescente devenue aveugle fait du cat-sitting dans des familles fortunées, où elle en profite généralement pour voler quelques effets et les revendre. Alors qu’elle pense avoir tiré le gros lot avec un week-end dans une maison immense au beau milieu d’une forêt enneigée, la demeure va recevoir la visite d’une bande de cambrioleurs…

Pour s’en sortir, notre jeune héroïne va utiliser l’application See For Me, où un interlocuteur en visio-conférence aide l’utilisateur à se repérer via la caméra de son smartphone, et notre improbable duo va avoir fort à faire pour s’en sortir. Une idée qui rappelle le très bon Don’t Breathe qu’on aurait remis dans le bon sens, et les films partagent pas mal en commun tant on retrouve une vraie malice ici, déjà grâce à un metteur en scène qui sait pertinemment que le spectateur a un avantage considérable sur l’héroïne (puisqu’il voit !), et qui a pensé son découpage en fonction, essayant de ne pas trop en montrer pour rester au plus proche de son personnage, la filmant souvent de face pour obstruer ce qu’il y a devant elle, et trouvant des astuces du genre pour ne pas briser ce lien.

Surtout, là où ce genre de thriller peut vite s’essouffler avec des ficelles de scénario grotesques, See For Me parvient bien à rythmer son heure et demie, à l’aide de rebondissements préparés en amont sans être trop évidents et qui amènent le film sur un terrain moral trouble, renversant la vapeur à plusieurs reprises. On n’en dira pas plus pour vous laisser découvrir les surprises assez réjouissantes qui en découlent, et il faut aussi souligner l’intelligence d’écriture sur les personnages, notamment l’interlocutrice de notre héroïne, présentée en amont comme une joueuse de FPS, les jeux vidéo à la première personne, ce que le film va très vite mettre en perspective via sa nouvelle mission, où la caméra de l’iphone projetée sur son écran d’ordinateur semble perpétuer ses habitudes.

Une idée sans doute pas poussée à son plein potentiel, mais qui prouve la modernité des scénaristes qui traitent la chose en connaissance de cause tant le trait n’est jamais forcé.
Alors certes, See for Me possède à l’inverse quelques détails un peu gros, les personnages semblant aussi un peu sourds parfois pour faciliter certains déplacements, mais voilà un huis-clos ludique, sans prétentieux et plus tourmenté qu’il n’y paraît.

Vivement qu’on ait des détails sur une sortie française, car ce serait fort dommage qu’on l’ait vu seulement pour nous.

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