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Critique : X-Men Dark Phoenix

Dix neuf ans après le premier volet initié par Bryan Singer, la saga X-Men touche à sa fin (il reste bien Les Nouveaux Mutants mais on ne sait pas encore ce que Disney va en faire). Dix neuf ans après la rencontre entre Malicia et Wolverine, les Mutants ont droit à une dernière aventure : faire face à Dark Phoenix.

Le film de Simon Kinberg sort dans les salles ce mercredi.

 

LA CRITIQUE

Autrefois étendard du genre super-héroïque, la saga X-Men est passé par bien des étapes, à tel point qu’on a cru la perdre plusieurs fois. D’abord avec l’embarrassant X-Men 3 – The Last Stand, qui clôturait la première trilogie de bien triste manière, avant d’être suivi par un premier spin-off sur Wolverine proprement catastrophique. Et malgré un retour en grâce avec X-Men First Class et Days of Future Past, l’histoire s’est répétée avec X-Men Apocalypse, en terminant la seconde trilogie là aussi avec un mauvais goût pas franchement bien senti, tandis que la concurrence de Marvel Studios se faisait impitoyable aux yeux du public.

19 ans après ses débuts, cette grande histoire vient trouver une dernière conclusion avec Dark Phoenix, censé mettre les points sur les i avant que Disney n’absorbe pour de bon les personnages et les greffe à son univers cinématographique Marvel. C’est donc la fin de l’ère Fox pour les mutants, et vu l’état boiteux dans laquelle on l’avait quitté en 2016, invoquer une créature capable de renaître de ses propres cendres n’était pas une mauvaise idée…

Certains s’offusquaient devant les trailers que l’histoire de Dark Phoenix avait déjà été contée dans X-Men 3. C’est vrai, mais ce n’est pas si grave en l’occurrence vu que le film de Brett Ratner était copieusement foiré, et qu’on est sur la deuxième chronologie de la saga avec les seconds interprètes des personnages, pour espérer finir tout ça proprement. Ici, le récit est centré sur Jean Grey, dont les pouvoirs de télékinésie et de télépathie sont difficilement contrôlables… Après avoir posé un traumatisme d’enfance et sa rencontre avec Xavier, l’introduction du film resitue le contexte des mutants au début des années 90, en les envoyant notamment dans l’espace pour une mission de sauvetage et leur place dans la société.

Même si Bryan Singer n’est plus à la barre (vu ses problèmes récents avec la justice), le sérieux avec lequel il abordait la saga à son meilleur transparaît durant la première demi-heure de film, qui renoue avec ce goût de réécrire la grande histoire sous le prisme des mutants, en travaillant la figure du Professeur Xavier, devenu une célébrité respectable aux yeux du monde, et qui joue de son influence auprès du gouvernement américain.
Une instrumentalisation qui n’est pas du goût de toute son équipe, le récit remettant en cause pour la première fois de la saga les agissements de cette figure réputée bonne, le poussant dans ses limites afin de créer une fois n’est pas coutume un peu de discorde dans tout ce beau monde.

Alors bien sûr, là n’est pas le cœur du sujet comme l’indique le titre du film, et c’est bel et bien Jean Grey qui va provoquer malgré elle le désordre autour duquel va graviter tout le film. Cela étant, les agissements de Xavier y seront rattachés, questionnant sa culpabilité par la même occasion.
Le glissement de Jean Grey vers la folie, ou du moins la perte totale de contrôle, n’est pas la partie la plus réussie, d’abord parce que Sophie Turner est une actrice au jeu assez limité, qui une fois sortie de la sobriété d’une Sansa Stark a bien du mal à exprimer le bouillonnement intérieur requis ici. Même si le récit tente d’appliquer un traitement similaire à celui du personnage de Malicia dans le tout premier film, le scénario est plus schématique, et l’incarnation de Turner peine à créer une réelle identification. Toute l’émotion va en réalité passer via les piliers de la saga, à savoir James McAvoy et Michael Fassbender, dont le passif et le talent seront mis en avant pour tenir sur leurs épaules l’identification requise pour le public, et donner le poids réel du chamboulement provoqué par l’adolescente incandescente.
Si Dark Phoenix n’est pas aussi bouleversant qu’il voudrait l’être, c’est sans doute dû au traitement scénaristique choisi. Les fans invétérés de Claremont & Byrne s’époumoneront sûrement devant l’adaptation assez libre faite de l’arc narratif original, puisque le basculement psychologique de l’héroïne est en partie dû à un paramètre extérieur, et les étapes chocs peuvent sembler très ténues par rapport à l’ampleur de l’œuvre adaptée.

Pour son premier passage derrière la caméra, l’habituel producteur et scénariste Simon Kinberg n’allait pas faire des miracles, et cela se ressent à multiples reprises aussi bien dans l’intensité des scènes que dans le rythme, qui patine pas mal durant son deuxième tiers.
Mais lui jeter la pierre serait aussi forcé, puisqu’il y a des bonnes choses.
A l’heure où la formule Marvel Studios est érigée comme un véritable modèle à suivre absolument, Dark Phoenix ne ment pas sur son titre, et affiche une sobriété de tous les instants qui fait plaisir à voir. Il n’y a pas une seule blague forcée de tout le long-métrage, qui semble mettre un point d’honneur à traiter son script à hauteur de personnages, pourvu que leur évolution et leurs doutes tiennent l’histoire de bout en bout, en essayant de ne jamais céder à la surenchère boulimique qui avait ruiné l’opus précédent. Pourtant, le film sait aussi offrir du spectacle, à l’instar de son sauvetage cosmique en ouverture plutôt réussi, et d’un final assez généreux qui met une nouvelle fois en avant les capacités diverses de ses héros, jouissant par ailleurs d’une violence surprenante pour le genre.
Bon, rien qui ne tâche l’écran ou tente de rivaliser avec Deadpool, mais à la façon de l’attaque du manoir dans X-Men 2, on ressent les impacts, la colère et la puissance des personnages face à des sbires qui vont en prendre littéralement plein la gueule, Magneto utilisant le métal de bien des façons pour triturer le corps de ses adversaires, tout comme Cyclope s’en donne enfin à cœur joie dans la saga et blaste à peu près tout ce qui bouge avec ses yeux lasers.

Quand bien même le film patine en cours de route ou s’offre quelques aller-retours pas franchement nécessaires, il est aussi indéniable qu’il traite son sujet sérieusement et ne fait preuve de la moindre once de cynisme, tout comme il oblitère totalement la mode aux clins d’œil complices.
Amateurs de fan service en tout genre, ne comptez pas sur Dark Phoenix pour flatter votre égo. Le projet ici est de raconter son histoire, ni plus ni moins, avec le plus grand sérieux du monde, le scénario réservant quelques surprises de taille, devant lesquels il a l’honneur de ne pas reculer.

Que la réalisation manque cruellement de personnalité, c’est un fait, et il ne fallait pas compter sur Hans Zimmer pour relever l’ensemble, tant le compositeur pompier ressert une nouvelle fois la soupe, noyant le long-métrage sous une nappe sonore continue qui finit évidemment en claquage de caissons de basse lors des scènes d’actions. Passé une ouverture au piano plutôt discrète, n’espérez pas la moindre mélodie de sa part, le bougre ayant même viré le thème mythique de John Ottman, que ce dernier avait tenu de main de maître de bout en bout, même dans X-Men Apocalypse !
La pauvreté de la plume de Zimmer fait peine à entendre, sachant que même un compositeur moins chevronné comme Henry Jackman s’en était autrement mieux sorti avec First Class.

Si vous ne vibrerez plus sur la musique de la saga, X-Men Dark Phoenix vous proposera de renouer avec l’intime et l’humanité qui l’ont caractérisé une dernière fois.
Sans la puissance démentielle d’un X-Men 2, le spectaculaire d’un Days of Future Past ou la malice d’un First Class, mais avec suffisamment de sérieux et d’honnêteté envers son histoire, sans rien à vendre derrière si ce n’est le film devant lequel vous êtes, espérant juste vous impliquer émotionnellement une ultime fois dans cet univers génial trop souvent malmené, et son casting fortement attachant.

Au final, tant pis si le phénix n’a pas achevé son ultime résurrection. Son cœur battant possède encore quelques beaux restes pour la fin.

X-Men Dark Phoenix, de Simon Kinberg – Sortie le 5 juin 2019

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