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Critique : Titane

Attention, spoilers.

Le cinéma de genre (comme l’animation) a une relation étrange avec le Festival de Cannes, sorte d’amour-haine qui voit récompensés ceux qui ont le luxe de se retrouver en concours, quand un très grand nombre se retrouve bien trop souvent hors compétition. D’Apocalypse Now à Parasite en passant par Dheepan ou Pulp Fiction, le genre est ponctuellement palmé à Cannes. Mais c’est la première fois qu’une réalisatrice de genre décroche l’ultime récompense (et seulement la seconde femme à l’avoir après Jane Campion et sa Leçon de Piano).

Cette récompense devrait donner des ailes aux jeunes réalisatrices et autres scénaristes qui veulent se lancer dans l’aventure. Oui, vous pouvez décrocher une énorme récompense après seulement deux longs métrages. Mais, s’il vous plait, faites-le bien.

Titane suit Alexia, une jeune femme qui se déhanche sur le capot de voitures dans des salons pour mâles libidineux venus reluquer des carrosseries. Mais celle qui a un gout prononcé pour le métal suite à un accident de voiture (et l’inclusion d’une plaque de titane dans son crane) tue. Fuyant la police, elle se déguise en garçon, prenant l’identité d’un jeune disparu. Se noue alors une relation étrange avec le père de celui-ci, qui croit reconnaitre son fils.

De ce pitch résulte un film étrange, bancal et tentant de mélanger beaucoup de choses trop différentes. Titane s’ouvre dans une ambiance de nuit, de chrome et de néons. Alexia tue, couche, et tue encore pour mieux baiser avec une voiture qui a frappé à sa porte. Oui, vous avez bien lu. La scène elle-même n’est pas gênante, si ce n’est peut-être un plan se voulant subversif où la réalisatrice nous montre que Boumbo a éjaculé de l’huile de moteur. Si le long-métrage avait pris une dimension fantastique un peu chelou dans lequel la jeune femme aurait eu une relation avec des automobiles, on aurait pu admettre ce passage. Mais Titane va prendre un chemin bien différent.

Le film s’éloigne donc complètement de son introduction pour, très brièvement, basculer dans le thriller. Soit. Alexia va-t-elle, au fil de son périple, continuer à tuer ? Rien de tout cela, une fois que Vincent Lindon apparait à l’écran, le long métrage devient un drame familial banal dans lequel le comédien, absolument fantastique, s’offre quelques fulgurances. Tout s’effondre alors. La mise en scène a beau être soignée, les comédiens parfaitement dirigés, l’héroïne introduite pendant les 20 premières minutes du film s’efface complètement pour tenter de nous montrer la relation étrange entre un père et « son fils ». Mais l’écriture du personnage de Lindon en fait un débile profond, incapable de se rendre compte que ce n’est pas son fils mais une jeune femme qu’il a face à lui.

Devenue soudainement pompier et envoyée au feu sans aucune forme de procès, le personnage esquissé dans le premier volet reviendra ponctuellement. Pour redevenir la tueuse qu’elle était la nuit et un garçon le jour ? Que nenni. Par contre, comme elle est enceinte de la voiture (!!!), elle doit faire face à une grossesse bizarre. Titane enchaine alors les scènes gênantes jusqu’à un dénouement incroyable de ridicule. Julia Ducournau cité David Cronenberg (Crash) ou John Carpenter (Christine) mais ce n’est pas suffisant, elle se perd tellement dans l’écriture qu’on se demande à la sortie ce qu’on a pu voir.

Certes, le film n’est pas sans qualités visuelles, sans acteurs impliqués et sans quelques scènes réussies. Certes, la récompense est formidable pour l’avenir du cinéma de genre en France et elle ouvrira sans doute mille portes à des réalisatrices en devenir. Ca ne fait pas pour autant de Titane un bon film.

Titane, de Julia Ducournau – Sortie en salles le 14 juillet 2021

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