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Critique : Ma Vie de Courgette
Présenté en Work in Progress lors d’une précédente édition du Festival d’Annecy, Ma Vie de Courgette y sera cette année en sélection officiel, concourant pour le fameux Cristal.
Réalisé par Claude Barras dont c’est le premier long-métrage et écrit par Céline Sciamma nommée aux Césars pour Tomboy et Bande de Filles, le film est également présenté à Cannes dans le cadre de la Quinzaine des Réalisateurs. Il sortira en octobre prochain.
LA CRITIQUE
Publié en 2002, le roman Autobiographie d’un courgette de Gilles Paris avait fait sensation par la dureté de son propos sur le système social français prenant en charge des enfants le plus souvent maltraités par leurs parents afin de leur donner une véritable chance de se sortir de leur triste situation. Adapté une première fois à la télévision avec « C’est mieux la vie quand on est grand » de Luc Béraud, le livre de Gilles Paris trouve une nouvelle incarnation en 2016, cette fois-ci sur le grand écran, avec film d’animation de Claude Barras.
Mais attention, ce film est plus sombre qu’il n’y paraît…
Ma Vie de Courgette nous raconte ainsi, avec la traditionnelle technique d’animation du stop motion, les mésaventures du pauvre Icare, surnommé Courgette par sa mère alcoolique et violente. Depuis que son père est parti faire le tour du monde avec une poule, il va se réfugier le plus souvent au grenier où sa mère dépressive ne peut l’atteindre. Un jour, un plus grand drame survient et l’innocent Courgette est placé dans un centre d’éducation, avec d’autres enfants de son âge. Chacun à son histoire, sa triste petite histoire qui témoigne de cette jeunesse sacrifiée par des adultes inconscients et parfois criminels.
Avec son double discours, à la fois léger mais tout en abordant des sujets extrêmement graves, on ne sait pas par quel bout prendre Ma Vie de Courgette. Dans la salle, certains rirons à cet humour sur le fil du rasoir, d’autres laisseront une larme couler le long d’une joue. Le design de ses personnages difformes, par leurs larges têtes et leurs grands yeux, et ce ton très sombre et réaliste, presque fataliste, nous met en permanence au bord de la sinistrose sans pour autant tomber complètement dedans. Il y aura toujours une petite attention de la part de Claude Barras ou de Céline Sciamma qui en signe le scénario pour nous remonter le moral vers une note persistante d’optimisme.
Contrairement au livre original, Barras et Sciamma ont choisi de s’adresser plus directement à un jeune public. En effet, l’ouvrage de Gilles Paris était plus dur et comportait des passages plus sombres, édulcorés ou contournés de manière intelligente dans Ma vie de courgette. C’est une réalité qui y est dépeinte. Il ne faut par chercher à se la cacher. Cependant, il faut savoir comment pouvoir l’aborder avec les enfants qui découvriront ce très émouvant long-métrage.
C’est une belle histoire qui vous attend pendant un peu plus d’une heure. On pense aux 400 coups ou au plus récent personnage de Zep, Titeuf, dans ce film qui plaira à tous les publics. Ses dialogues sonnent étonnamment juste sur la manière dont s’expriment les enfants. Et que parfois, une méchanceté ou un coup bas d’un gamin à un autre dissimule une blessure encore plus terrible chez le premier. Ma vie de courgette est rempli de belles petites séquences et de running gags aussi drôles que touchants, donnant au film une légèreté salvatrice. Claude Barras parvient à nous transmettre cette double impression d’une œuvre à la fois très intimiste et proche de ses protagonistes que décontracté et plaisant, à bonne distance de ces enfants abandonnés au destin.
Son plus beau message reste encore que si l’on ne choisi pas sa famille, des amis qui nous ressemblent peuvent remplacer nos liens brisés et qu’il existe encore des personnes de bonne volonté. Avec Ma vie de courgette, Claude Barras réalise un premier long-métrage d’animation où pudeur et dureté extrême se cachent derrière un doux sourire. Une pépite à découvrir absolument.
Ma Vie de Courgette, de Claude Barras – Sortie le 19 octobre 2016
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