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Critique : Destroyer

C’est l’une des grosses sorties d’une semaine très encombrée, entre Lego 2, le Chant du Loup ou tous les films que vous devez encore rattraper : la scénariste et réalisatrice Karyn Kusama revient après nous avoir soufflé avec The Invitation.

A-t-elle réussi à maintenir son cap ?

 

LA CRITIQUE

Difficile de prédire la carrière de Karyn Kusama qui, après un début percutant avec Girl Fight, se retrouvait à enchaîner ces projets étranges qu’étaient Aeon Flux et Jennifer’s Body.
Du coup, lorsqu’on a découvert The Invitation en 2015, la surprise était totale et on était en droit d’attendre avec une excitation certaine son prochain film. Visiblement, on n’a pas été les seuls, puisque Nicole Kidman se paie la tête d’affiche de ce Destroyer, qui s’est transformé en véritable véhicule promo pour l’actrice, y livrant une performance promise comme étant renversante.
De quoi confirmer le retour de la réalisatrice ?

Kidman joue ici une flic à Los Angeles pour qui la vie n’a pas été tendre, et qui est désormais crainte par tous ses comparses, comme étant un élément incontrôlable, imprévisible et dangereux.
Un meurtre en bordure de ville va motiver son personnage pour mener l’enquête coûte que coûte, celle-ci étant liée à son passé périlleux dans un gang…
Et pour couronner le tout, cette anti-héroïne est la mère d’une adolescente délaissée, et va tenter de remettre la vie de sa progéniture sur le droit chemin, un exercice délicat compte tenu du train de vie foutraque de sa tendre mère.

Vous l’aurez compris, avant d’être un polar à l’intrigue tendue, Destroyer est avant tout le portrait d’une âme déchue, qui a dépassé toutes les limites, franchit tous les tabous et bravé les interdits pour mieux en payer le prix. Un point de départ alléchant, dont la construction va reposer sur une structure alternée, avec un film qui jongle constamment entre l’avancée dans l’enquête, riche en rencontres musclées, et des flash-backs sur l’ancienne vie de cette flic dont elle ne s’est jamais remise. Un schéma narratif conçu pour maximiser les enjeux au fur et à mesure du film et créer des révélations émotionnellement chargées, à un détail près, et de taille : le film vend la mèche quasiment d’entrée de jeu ! En évoquant très vite l’issue de son infiltration dans le gang et les conséquences qui ont mené le personnage principal à un état aussi piteux, Destroyer donne trop de cartes à son spectateur pour que la surprise perdure tout du long, et l’on se demande donc pourquoi le film met autant de temps à illustrer ce qu’on a déjà compris sans faute vu que les personnages étalent les faits dans des dialogues auparavant !

Plus que de tuer la surprise dans l’œuf, ces choix étranges ont tendance à peser sur le rythme général en ralentissant la progression de l’intrigue tant le récit se répète, y compris dans une seule intrigue.
Chaque rencontre avec un témoin potentiel se déroule souvent de la même manière, chaque scène avec la progéniture de Kidman souffre du même syndrome, et on a presque l’impression que le scénario de Destroyer meuble comme il peut pour tenir sur 2 heures, là où il aurait gagné à être plus concis pour être aussi impactant et chargé en suspense que prévu, surtout que son ultime révélation risque de faire passer l’ensemble pour une vaste fumisterie chez bon nombre de spectateurs.

Alors si le scénario déçoit, et s’avère trop pataud, il reste porté par une comédienne qui se donne à fond. Les louanges lues çà et là concernant Nicole Kidman sont compréhensibles compte tenu de la noirceur du rôle, et surtout du registre bien éloigné des habitudes de l’actrice, qui insulte et parjure à peu près tout ce qui bouge ici en tirant une tronche de 3 mètres de long.
Il faut cependant pointer du doigt un maquillage omniprésent, pour ne pas dire envahissant, qui prend parfois le pas sur la performance tant il trône sur son visage et limite parfois ses expressions.
Difficile par conséquent de totalement s’identifier à un personnage au visage aussi étrange pour de mauvaises raisons, sans parler de son comportement loin d’être sympathique. Karyn Kusama emballe le tout correctement, mais ne parvient concrètement jamais à donner le panache et la violence nécessaire à un tel récit pour le faire décoller, et l’émanciper des codes rabâchés mille fois du genre ou de ses maillons superflus. A l’image du maquillage de son interprète principale, la réalisatrice s’est sans doute trop impliquée sur la base d’un script aux contours grossiers, qui aurait demander plus de subtilité pour qu’on y adhère pleinement.

Destroyer, de Karin Kusama – Sortie le 20 février 2018

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