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Critique : Dallas Buyers Club

Matthew McConaughey enchaine les rôles. Le comédien avait multiplié les blockbusters et les comédies romantiques jusqu’à ce que William Friedkin lui permette d’exploser dans Killer Joe. A l’affiche l’année dernière de Mud, vous avez pu le voir cette année dans Le Loup de Wall Street et dans la série américaine True Detective où il partage la vedette avec Woody Harrelson.

Cette fois, le comédien se laisse filmer par Jean-Marc Vallée dans Dallas Buyers Club. Il y incarne un séropositif à qui il ne reste plus longtemps à vivre et qui entreprend de monter un « club » de malades prêts à avoir recourt à des traitements alternatifs, pour contrebalancer l’impuissance du corps médical.

Le film, six fois nommé aux prochains Oscars, est dans les salles depuis ce mercredi.

 

Derrière Dallas Buyers Club, il y a Jean-Marc Vallée, un réalisateur québécois qui ne cesse de voyager pour faire ces films puisque les trois précédents (C.R.A.Z.Y, Victoria & Café de Flore) venaient aussi bien du Canada, de France et du Royaume-Uni.
Une fois cela pris en compte, on ne s’étonne plus trop de le voir derrière ce drame tiré d’une histoire vraie qui semble être un cadeau fait pour les Oscars tant le sujet est d’actualité. Le club du titre, c’est celui crée par un cowboy texan macho au possible qui va malheureusement s’avérer séropositif, et découvrir que certains médicaments illégaux aux Etats-Unis sont bien plus efficaces qu’un remède promu par l’Etat aux effets destructeurs…

Enième candidat à toutes les récompenses du moment, Dallas Buyers Club a construit la majorité de sa réputation sur son interprète principal, Matthew McConaughey.
Et en l’état, il est difficile de contester cet engouement général tant à vrai dire le comédien y est pour beaucoup dans le film (avec Jared Leto) en revenant devant la caméra, et un réalisateur très discret mais dont la sobriété aide aussi.
En soit, il faut dire que le film n’impressionne jamais par la forme dont il fait preuve : on frôle l’académisme s’inspirant un peu du ciné indé dès qu’il s’agit de découpage pur, avec une tendance au naturalisme assez forte. Des cartons noirs sur plans plus simples tu meurs, un montage qui joue énormément sur les transitions fortes en cut abruptes, des ellipses assez fréquentes mais toujours indiquées textuellement…
Nous sommes face à une œuvre qui ne prend jamais aucun risque quant à la manière de raconter son histoire, parce que celle-ci est vraie et d’actualité, notamment en ce qui concerne la cause homosexuelle. C’est quelque part ce qui rend le film périssable : une telle retenue dans la forme l’empêche de sortir de la masse des drames « inspirés d’une histoire vraie » qu’on se cogne tous les ans. D’un autre côté, il ne détourne jamais l’objectif de la dureté de son sujet tout en parvenant à résumer parfaitement le combat de son héros et la cause défendue sans tomber dans un didactisme forcé.
Autrement dit : Dallas Buyers Club fait les choses noblement, pour être accessible au plus grand nombre sans altérer les faits énoncés.

Ceci dit, la force de l’intrigue et du fait original repose entièrement sur un personnage à l’identité forte, un homme qui revendiquait haut et fort virilité, hétérosexualité ou homophobie avant que le destin le plonge dans ce qu’il dédaignait tant.
Il faut un acteur pour jouer ça avec justesse, et Matthew McConaughey s’y donne à la perfection, profitant du rôle pour opérer une transformation caméléon comme seul Hollywood sait nous en offrir. Rachitique, avec la peau sur les os et une carrure très sèche, on a du mal à reconnaître l’acteur sur qui nous n’aurions jamais misé quoi que ce soit il y a quelques années. Aux antipodes de sa stature de beau gosse aux pectoraux huilés, le comédien va jusqu’au bout de la logique entreprise avec La Défense Lincoln et entretenue jusque-là par des rôles forts comme dans Killer Joe ou Mud.
Sa force de caractère, alliée à l’excentricité blafarde d’un Jared Leto grimé en transsexuel physiquement amoindri, permet au drame joué sous nos yeux de ne jamais sombrer dans des élucubrations larmoyantes dégueulant de démagogie et de bons sentiments.
C’est là aussi où Jean-Marc Vallée rattrape le manque d’identité latent de sa réalisation : en laissant ses acteurs s’exprimer sans meubler autour d’eux. Un style dépouillé raccord avec l’univers exploré même si on peut aussi voir la démarche comme une manière détournée de s’effacer derrière ses comédiens pour moins en faire.
Quand on repense aux excès musicaux et ampoulés de Café de Flore, on se dit malgré tout que c’est un plus pour cette histoire et qu’à défaut d’être inoubliable par sa fabrication trop sage, le film reste d’une intégrité totale.

Drame calibré pour les cérémonies, qui évite le pathos habilement grâce à son casting de caméléons accomplis, Dallas Buyers Club ne marquera pas les esprits outre mesure par le supplément d’âme qui lui fait peut être défaut. Reste un très beau moment de jeu, et une histoire forte qui ne manquera pas de faire écho encore aujourd’hui, en ayant la gentillesse d’éviter un quelconque terrorisme affectif.

 

Dallas Buyers Club – Sortie le 29 janvier 2014
Réalisé par Jean-Marc Vallée
Avec Matthew McConaughey, Jennifer Garner, Jared Leto
1986, Dallas, Texas, une histoire vraie. Ron Woodroof a 35 ans, des bottes, un Stetson, c’est un cow-boy, un vrai. Sa vie : sexe, drogue et rodéo. Tout bascule quand, diagnostiqué séropositif, il lui reste 30 jours à vivre. Révolté par l’impuissance du corps médical, il recourt à des traitements alternatifs non officiels. Au fil du temps, il rassemble d’autres malades en quête de guérison : le Dallas Buyers Club est né. Mais son succès gêne, Ron doit s’engager dans une bataille contre les laboratoires et les autorités fédérales. C’est son combat pour une nouvelle cause… et pour sa propre vie.

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