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Critique : Justice League

Ca aurait dû être le blockbuster le plus important de l’année. Nous aurions dû être matraqué par le marketing entre produits dérivés, affiches géantes partout dans les villes françaises.

Mais ce ne fut pas le cas. Justice League est sorti ce mercredi 15 novembre 2017 dans une indifférence quasi-générale.

Que s’est-il passé pour qu’on en arrive là ? Certes, le film a eu mauvaise presse aux USA. Et des problèmes de production, le remplacement de Zack Snyder par Joss Whedon à la réalisation. Mais d’autres longs métrages se sont relevés de ce genre de galère (coucou Rogue One). Pas Justice League, qui est bien la catastrophe annoncée. Un vrai gâchis quand on connait les personnages iconiques, sur le papier plus intéressants que la concurrence.

Justice League, le film, commence par une introduction réussie. On est à Gotham. Batman prend en chasse un malfrat (incarné par Holt McCallany, Bill Tench dans la série Mindhunter) sur les toits de la ville. Et l’espoir pourrait être permis tant cette scène est de qualité. Ben Affleck fait une nouvelle fois l’affaire dans le costume de chauve souris et l’ambiance sombre des pages de la BD prend vie à l’écran. Ce sera tout. La suite : Batman a peur de ne pas être à la hauteur face aux paradémons qui apparaissent dans son sillage et il veut monter une équipe basée sur les héros aux super pouvoirs sur lesquels il a des dossiers.

Après une scène où Wonder Woman empêche un braquage à Londres, on enchaine donc avec Bruce Wayne parti en quête d’Aquaman. Tout le film se révèlera être au niveau de cette scène dans un bar islandais : un beau gros bordel, parfois incompréhensible. Dans cette séquence, Wayne s’adresse à la foule disant qu’il cherche Aquaman. Mais le montage nous montre que Arthur Curry est face à lui. Pourquoi faire ce discours ? Y a-t-il eu deux scènes différentes remontées en une ? On sait que Bruce connait l’identité de celui qu’il cherche alors pourquoi tenter de nous donner l’impression que ce n’est pas le cas ? Pourquoi dans la séquence suivante, Wayne révèle à l’Atlante qu’il est Batman sans sourciller ? C’est incompréhensible, injustifié et foutraque à l’image du film.

La suite est du même tonneau. Wayne se met en quête d’Aquaman et on nous présente Barry Allen, nous faisant comprendre qu’il sera sa prochaine cible. Sauf que le milliardaire arrête sans raison sa fameuse quête de héros (pour laquelle il s’est laissé pousser la barbe mais en fait non) pour reprendre ses petites activités et enchainer des tunnels de dialogue avec Diana. Là aussi, on commence à sentir les reshoots de Joss Whedon. Techniquement, le film est réalisé par Zack Snyder et son style visuel, qu’on aime ou pas, se sent tellement dans chaque plan que quand une séquence tournée par Whedon débarque à l’écran, on la remarque comme le nez au milieu de la figure. Le réalisateur d’Avengers, qui a intégré de longues scènes d’échanges entre les personnages ainsi que toute la sous intrigue concernant Superman, ne fait que filmer des champs contre champs sans saveur et qui n’en sont donc que mieux repérés par le spectateur. Il est probable que dans la version originale du film, Wayne parte seul en quête des héros mais que Whedon a cherché à y intégrer plus tôt Wonder Woman pour insister sur l’esprit d’équipe.

On peut comprendre tout ces changements, et tous les plans abandonnés de la bande annonce, quand on obtient un résultat qui se tient. Rogue One avait ce mérite. Gareth Edwards a terminé le film avec un coup de main et des séquences ont été entièrement reshootés, changeant le sens initial des scènes mais le spectateur non-averti ne se rend compte de rien. Ici, tout est visible, et tout est laid à l’instar de l’arc concernant Superman. Dès le départ, ça ne part pas bien puisqu’on nous vend un monde affaibli par la mort de l’Homme d’Acier, où les gens n’ont plus d’espoir. C’est oublier un peu vite la mauvaise caractérisation du personnage dans les films précédents, qui a détruit une ville pour finir autant adulé que haï. Superman, la lueur d’espoir de l’humanité ? Pas dans l’univers de Zach Snyder. Mais passons. Dans le long-métrage, Batman pense avoir besoin du Kryptonien pour venir à bout du grand méchant de l’histoire et veut lui rendre la vie. C’est bien joli mais Superman ne servira au final à rien, si ce n’est à donner des coups de poings dans la tronche de Steppenwolf pour que Wonder Woman lui mette le coup de grâce. C’est tout ? Pas vraiment, il faut aussi noter qu’Henry Cavill avait l’obligation contractuelle de garder la moustache qu’il s’était laissé pousser pour le prochain Mission Impossible pour les reshoots de Whedon. Elle a donc été gommé numériquement, ce qui se voit sur chaque plan, la production ayant sans doute oublié qu’une grosse moustache déforme un visage.

On passera sur le méchant sans intérêt et la fin du film calquée sur l’Ere d’Ultron pour évoquer néanmoins quelques petites notes d’espoir : Gal Gadot est toujours parfaite en Wonder Woman et Ben Affleck fait le taf en Batman, au point qu’on a vraiment envie qu’il garde le rôle pour le futur film de Matt Reeves. Les nouveaux personnages sont trop bâclés pour être évoqués longuement : Aquaman fait de la figuration, et son passage à Atlantis est réduit au ridicule, Flash nous rappelle que son alter-ego télévisuel est plus intéressant et Cyborg est largement mieux introduit dans le récent film d’animation Justice League War. On peut aussi mentioner Danny Elfman qui a fait ce qu’il a pu en un délai très court pour remplacer la bouillie sonore de Junkie XL par quelque chose de plus mélodieux, s’amusant notamment avec le thème légendaire qu’il avait créé pour Batman il y a vingt ans.

A ce stade, et vu le résultat final, Warner Bros n’a pas beaucoup de choix. Soit le studio doit complètement rebooter ce foutoir pour repartir sur des bases saines. Soit ils tentent de travailler d’avantage les films solo des personnages réunis dans Justice League et qui, soyons honnête, ont du potentiel. On est donc curieux de voir le travail de James Wan sur Aquaman. Mais idéalement, Warner Bros ouvrirait les yeux pour se rendre compte d’une évidence : leur branche animation fait un boulot que n’est pas capable d’égaler ceux travaillant sur le live. La vraie Justice League a été portée à l’écran par Bruce Timm et consort avec brio et la relève a été assurée ensuite (Young Justice, la récente et chouette série Justice League Action). Pourquoi ne pas leur donner un budget plus conséquent et admettre que le salut des personnages est dans l’animation ?

Justice League, de Zack Snyder – Sortie le 15 novembre 2017

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