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Étrange Festival : Meurs Monstre Meurs, Utoya 22 Juillet, Climax
Etrange Festival, 2e partie, avec … des films qui sortent en salles !
Très souvent, nous voyons en festival des films trop obscurs pour bénéficier d’une sortie décente, ou récente. Souvent ces films sortent tardivement et discrètement, voir pas du tout. Mais aujourd’hui tous les films évoqués sont prévus chez nous d’ici à début 2019, à commencer par Climax de Gaspar Noé qui sera partout au cinéma le 19 septembre prochain.
Notez enfin, en plus de tout cela, que les spectateurs du Forum des Images ont pu voir The Dark, Diamanto et The Field Guide to Evil dont nous vous parlions déjà ici.
Meurs, Monstre, Meurs, de Alejandro Fadel – Sortie le 15 mai 2019
L’an dernier, l’Etrange Festival avait vu son prix du public remis aux Bonnes Manières, une co-production franco-brésilienne s’attaquant à revisiter la figure du loup-garou.
Cette alliance entre producteurs français et cinéma latino continue cette année avec Meurs, Monstre, Meurs, un film argentin comptant dans ses rangs le producteur de Grace notamment, et d’aides à la région venues de chez nous. Tout ça pour raconter l’histoire d’une série de meurtres étranges dans le fin fond de la Cordillère des Andes, où un flic ne comprend pas comment les fermiers du coin ont pu commettre des actes aussi noirs.
Thriller psychologique à tendance fantastique, le long-métrage d’Alejandro Fadel bénéficie d’une ambiance poisseuse et hallucinée, le récit plongeant de plus en plus dans le doute alors qu’on réalise combien aucun personnage n’est vraiment bon, le peu de civilisation présente dans ses terres poussant ses habitants à ne faire preuve d’aucune compassion entre eux.
Relevé par quelques fulgurances visuelles impressionnantes, le chef opérateur se faisant clairement plaisir sur les jeux de lumière de nuit, le film perd peu à peu le pouvoir de fascination et de mystère qu’il peut opérer en plongeant dans un rythme lénifiant, où l’intrigue se délaie dans ses dialogues à rallonge avec des personnages multipliant les interrogations lourdingues.
Tournant vite en rond, en semblant passer devant plusieurs portes de sorties potentielles, le tout s’achève dans 20 dernières minutes assez grotesques, qui vont au bout de l’idée de représentation d’une créature jusque-là suggérée, ce qui risque de mettre à mal beaucoup de spectateurs concernant leur incrédulité tant les velléités de faire un monstre au caractère résolument sexuel tombe dans le grand n’importe quoi.
On ne pourra pas renier un cinéaste qui va au bout de son délire, lui permettant d’acquérir une certaine singularité, qui nécessitera de s’accrocher pour aller avec lui.[trx_video url= »https://youtu.be/xXadQWEy9F0″ ratio= »16:9″ autoplay= »off » align= »center » top= »inherit » bottom= »inherit » left= »inherit » right= »inherit »]
Utoya, 22 Juillet, de Erik Poppe – Sortie le 12 décembre 2018
Le 22 juillet 2011 sur la petite d’île d’Utoya en Norvège, le monde a connu une tragédie qui l’a frappé de plein fouet. Déjà sous le choc d’une explosion au beau milieu d’Oslo en plein après-midi, le pays va assister impuissant au massacre de 69 personnes dans un camp d’adolescents pour la Ligue des jeunes travaillistes, perpétué par un seul homme déguisé en policier et tirant à vue.
Le film d’Erik Poppe tente de faire vivre ce cauchemar à la seconde près, puisqu’on y suit une jeune femme présente sur l’île au moment des faits, et qui va devoir se frayer un chemin pour survivre durant les 72 minutes de la tragédie.
Intégralement filmé en plan séquence, Utoya 22 juillet fait tout pour être une expérience intense et douloureuse, privilégiant avant tout l’immersion du spectateur au collant au plus près son personnage principal totalement perdu dans le chaos.
Si le résultat fonctionne, c’est avant tout via son procédé, qui n’épargne pas le spectateur qui passant de nombreuses scènes dans des petits endroits où sont planqués les victimes, attendant la moindre occasion de fuir le plus loin possible les coups de feu, qui résonnent tous comme un martèlement terrible via un sound design incisif.
Ce qu’il y a d’éreintant ici, c’est bel et bien l’attente au plus près des visages et des martyrs, livrés à eux-mêmes sur un territoire relativement petit et dont il était quasi impossible de s’extirper.
Forcément, on pourrait se demander l’intérêt de s’infliger un tel calvaire, mais le réalisateur Erik Poppe a le mérite de ne jamais tomber dans le voyeurisme graphique et l’étalage d’hémoglobine, ramenant d’ailleurs le tueur à une silhouette menaçante dont la présence pèse plus au son qu’à l’image. Ne collant pas totalement à la réalité puisque l’héroïne que l’on suit est totalement fictive, ce que le film ne manque pas d’ailleurs de préciser, l’idée est plus de rappeler au public l’enfer total qu’a été un tel fait divers, et les raisons uniquement politiques qui en sont à l’origine.
Par sa radicalité, le tout se vit comme une expérience viscérale, entourée de quelques cartons précisant le contexte, qui ne cherche pas à intellectualiser ou mettre en perspective les faits.
L’idée est de les faire vivre, de la façon la plus brute et directe possible, afin que le spectateur en tire les leçons nécessaires.
Un manifeste politique et surtout pacifique donc, retraçant une atrocité sans nom comme pour produire un électrochoc et créer une répulsion immédiate sur les dérives de certains courants idéologiques qui mènent à une telle cruauté.
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Invasion, de Shahram Mokri – Sortie le 31 octobre 2018
Shahram Mokri est une étoile montante du cinéma Iranien, son précédent film Fish & Cat étant notamment reparti du festival de Venise avec un prix félicitant « son contenu innovant », qui lui avait valu un beau succès dans son pays. Quoi de plus normal pour le film suivant que de reprendre la même recette et de l’affûter ? Et quelle est-elle, cette recette ?
Invasion part d’un pitch assez simple : dans un centre sportif, la police et les témoins d’un meurtre orchestrent la reconstitution de ce dernier pour déterminer si le suspect numéro 1, présent lui aussi, est bien coupable.
Et tandis que tout ce beau monde va se mettre en activité, le bougre en question et ses acolytes vont en profiter pour remettre le couvert afin de terminer ce qu’ils ont commencé !
Forcément, on se dit que les jeux de faux-semblants et de miroirs vont y aller à gogo, mais ce serait trop simple. Reprenant ce qui avait fait la particularité de Fish & Cat, Invasion complexifie son dispositif déjà bien zinzin en y ajoutant des boucles temporelles et en liant le tout visuellement par un unique plan séquence tout du long !
Etant donné que les personnages ont tendance à répéter la reconstitution de base, l’ensemble devient vite un labyrinthe narratif total, où les manigances se perdent dans une œuvre qui profite de la linéarité présumée par sa caméra omniprésente pour mettre à mal les repères du spectateur et le pousser à reconsidérer perpétuellement le fil de l’histoire.
Au premier abord assez dépouillée, la réalisation prend donc de l’ampleur au fur et à mesure que l’impressionnante scénographie brouille nos sens, le film semblant au bout d’un moment se réécrire perpétuellement sous nos yeux. Cela est loin d’être toujours simple à suivre, d’autant que l’austérité qui caractérise le jeu de tout le casting n’est pas engageante, mais le tout mérite de s’accrocher tant il est plaisant de comprendre les rouages de cette machination infernale, qui ferait pâlir d’envie Christopher Smith. Et ne parlons même pas de Nolan, il tremblerait de jalousie devant.
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Climax, de Gaspar Noé – Sortie le 19 septembre 2018
Tous à couvert, le cinéaste le plus fêlé de France est de retour !
Après son expérimentation « porno mais pas trop mais en fait si » Love, le trublion du cinéma tricolore, comme il aime à se l’imaginer, est de retour avec un film tourné en deux semaines dans un hangar ! Au programme : une soirée entre danseurs qui terminent de préparer un spectacle.
Et tandis que les festivités démarrent et que chacun explique dans son coin avec qui il aimerait bien s’envoyer en l’air, tout ce beau monde va partir en bad trip total à cause d’une sangria enrichie en substances illicites.
Là encore rempli à ras bords de plans séquences plus tapes à l’œil les uns que les autres, et portés par le travail toujours remarquable du chef opérateur Benoît Debie, Climax est conçu comme une descente aux enfers, où les vieux démons de l’humain viennent court-circuiter les illusions du vivre ensemble pour voir ses personnages se détruire dans un pétage de câble collector. Tout est bien sûr fait pour que le spectateur se joigne à la transe et délire lui aussi devant ces visions hallucinées et anarchiques, confrontant perpétuellement les principes d’autodestruction et de survie en transformant les uns en agneaux et les autres en loups sanguinaires.
Un objet cinématographique une nouvelle fois unique dans l’Hexagone, qui plie quelque peu sous l’égo surdimensionné d’un Gaspar Noé pas peu fier de son travail, au point de le revendiquer un peu trop et de donner par moment dans l’esbroufe, notamment quand il envoi le générique de fin au beau milieu du film, explosant l’immersion qu’il cherche à créer…
Enfin, que ce bon vieux Gaspar se rassure, personne ne fait des films comme lui, et même si Climax dure tout de même trop longtemps pour son propre bien, il est une nouvelle expérience à vivre en salles impérativement et qui défrisera bon nombre de spectateurs.
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