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Critique : The Call
Les sorties et critiques ciné vont être bousculées dans les prochains jours par le Festival de Cannes. Tous les regards seront braqués sur la Croisette et entre films sortant « en même temps que » et grosses attentes n’arrivant que trop tardivement pour être projetées avec l’avance habituelle nécessaire pour écrire dessus.
Le rythme redeviendra normal le mercredi 29 mai avec notamment The Call, nouveau thriller de Brad Anderson -réalisateur de The Machinist et Vanishing on 7th Street- avec Halle Berry et Abigail Breslin…
Il suffit parfois d’un film pour asseoir une réputation, sans même être sûr que l’auteur derrière soit capable de porter celle-ci sur ses épaules et de l’assumer. C’est un peu ce qui est arrivé à Brad Anderson qui a fait son petit effet avec The Machinist, thriller parano pas piqué des hannetons mettant en vedette un Christian Bale tellement extrême dans sa démarche de performance physique rachitique qu’il manqua d’y laisser ce qu’il lui restait de peau. Si Batman a su rebondir, Anderson lui a accouché de deux films débarqués chez nous directement en DVD et s’est réfugié dans l’univers des séries TV, emballant des épisodes notamment pour Fringe, Treme ou Boardwalk Empire.
Mais le bougre revient sur le grand écran avec The Call et son Halle Berry qui semble refaite pour sa carrière après Cloud Atlas. Une seconde chance méritée ?
The Call ne part pas en remportant la palme de l’originalité vu que son script ressemble comme deux gouttes d’eau à Cellular. Oui oui, ce film avec Jason Statham qui kidnappait Kim Basinger dont le seul espoir résidait dans son interlocuteur à l’autre bout du fil qui n’était autre que Captain America ou Chris Evans, on ne sait plus.
Et bien The Call donc, c’est à peu de choses près la même chose. Remplacez Statham par un acteur au physique froid et un rien maladif, Kim Basinger par Abigail Breslin qui a bien grandi depuis Little Miss Sunshine et par Halle Berry en interlocutrice ange gardien.

Le truc, c’est que sauver des gens au téléphone, c’est à vrai dire le métier de la dame, cette dernière travaillant au service d’appel du 911 et servant d’intermédiaire entre les citoyens et les corps de métiers à même de les aider. Un numéro bien pratique qui était parti pour être le sujet central du film, le scénario s’intéressant à ce métier sous tension en premier lieu et à ces personnes dont le train-train quotidien est de répondre calmement à des situations parfois tendues comme peuvent l’être une femme venant de poignarder son mari ou une adolescente regardant une amie en pleine overdose. Manque de bol pour l’héroïne, elle va un jour tomber sur une ado se faisant attaquer chez elle et suite à une erreur technique minime, la petite va y passer. Traumatisée, notre Halle Berry va se retrouver dans une situation similaire plus tard, bien décidée à prendre sur elle pour ne pas réitérer ce funeste résultat. Tout ça, Brad Anderson prend le temps de vous l’exposer tranquillement dans ses 20 premières minutes tant il ne veut pas que vous perdiez une miette du passé de son héroïne pour qu’on s’accroche à elle et à notre fauteuil sans trop se poser de questions. C’est plutôt louable de sa part et sans pour autant briller derrière la caméra, le tout est assez dynamique pour que l’intrigue parte sur de bonnes bases, ou autrement dit pour que vous en ayez quelque chose à carrer. Du moins de l’héroïne assise derrière son ordinateur, car l’adolescente qui va faire un tour de manège sans rien demander à personne est-elle introduite en trois secondes, et est en plus jouée par une Abigail Breslin dont la puberté ne lui a pas fait de cadeau. D’un autre côté, petit boudin ou pas (je sais, c’est bas.), ça reste une pauvre âme innocente dans un coffre de voiture non ?
Concrètement, le récit de The Call possède une apparence de série tv assez forte, l’impression d’avoir à faire à un épisode de 24H Chrono flottant dans l’air à certains moments, ou aux Experts avec un budget un peu plus conséquent. Pas pour des raisons de découpage limité ou de cadrages plan-plan, mais par la dynamique d’un récit qui passe une bonne partie de son temps à aller et venir entre la gamine coincée dans un coffre de voiture et l’employée du 911 au beau milieu de son call-center foisonnant. La structure de cette partie là, dans laquelle les deux femmes tentent de trouver des solutions et subissent les faits et gestes du méchant psychopathe de service, alimentent sans trop se fouler l’intérêt de la chose, sous couvert de quelques rebondissements qui deviennent de plus en plus lourdingues et prévisibles au fur et à mesure qu’on avance dans le film et qui font malgré eux le sel de ce type de série B. En revanche, ça devient un peu plus embarrassant quand le récit opère une sortie de route (au sens littéral comme au figuré) et s’aventure dans le torture-porn et le thriller mal inspiré de Se7en pour la énième fois (on a arrêté de compter). Le dernier acte est en ce sens complètement foiré, entre des actes débiles et une succession de clichés qui provoque chez le spectateur une série de questions du genre « Sont-ils cons à ce point ? ». Ils le sont, et vont même jusqu’à terminer le tout en queue de poisson avec une fin ultra réac qui tombe bien trop comme un cheveu sur la soupe pour qu’on accepte de la digérer. Transfiguré, le film a alors oublié son rapprochement sur ces « héros du quotidien » que sont les employés du 911, et a flingué depuis trop longtemps les rares éléments qui maintenaient l’intérêt tant la surenchère et l’ineptie du scénario finissent par flinguer ceux à quoi on pouvait s’attacher.

Débutant comme l’illustration propre d’un fait divers façon les Experts en mettant suffisamment la main à la patte pour qu’on ait envie de suivre son histoire, The Call coupe rapidement court à tout ça pour tomber dans le thriller de bas étage multipliant les retournements de situation et les péripéties déjà vues mille fois tout en oubliant de leur donner une justification qui tient la route. Le résultat fait alors peine à voir autant qu’il ennuie, et confirme que The Machinist était une superbe anomalie pour son réalisateur.
The Call – Sortie le 29 mai 2013
Réalisé par Brad Anderson
Avec Halle Berry, Abigail Breslin, Evie Thompson
Une adolescente est kidnappée par un tueur en série. Pour la sauver, une opératrice d’un centre d’appel d’urgences va affronter ses propres peurs liées à une tragédie de son passé. Leur seul lien : un téléphone portable. Une course contre la montre commence… Chaque appel pourrait bien être le dernier.