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Critique : She Said

Après Spotlight ou Pentagon Papers, l’enquête journalistique transposée au cinéma de l’année s’appelle She Said. Le sujet n’est pas des moindres puisque le film est l’adaptation du bouquin éponyme des lauréates du Prix Pulitzer Jodi Kantor et Megan Twohey, ou le point de départ de l’affaire Weinstein et plus largement du mouvement #MeToo qui a changé la société.

Le film s’ouvre sur une présentation des deux journalistes, brillamment interprétées par Zoe Kazan et Carey Mulligan, dans leur quotidien de femme new-yorkaise. Toute l’introduction va d’ailleurs mettre en avant les femmes : celles qui doivent gérer un foyer ou une grossesse tout en menant de front un travail important. Jodi Kantor va apprendre que l’actrice Rose McGowan a été agressée sexuellement par Harvey Weinstein et, associée à Megan Twohey et avec l’aide de leur hiérarchie, elles vont enquêter sur les pratiques et les déviances du producteur, tout en découvrant qu’il a versé des compensations à ses victimes. La suite est l’Histoire, avec un H majuscule.

Le résultat, vous le connaissez. Peut-être l’avez-vous même lu en parallèle de l’article écrit par Ronan Farrow et paru à peu près au même moment. She Said va s’intéresser à l’avant. A l’enquête qui a mené à l’article, aux obstacles que les deux journalistes, d’une intégrité hors du commun ont pu rencontrer, au silence observé par les victimes suite aux compensations financières. Un parcours complexe qui, à l’écran, commence par une victime engagée en régie sur un tournage et qui finit le plan d’après pleurant et courant dans une rue irlandaise.

Le film s’intéresse aux victimes et leur offre, parfois, leur propre rôle. Ainsi, Judith Godrèche a prêté sa voix pour une conversation téléphonique et l’actrice Ashley Judd a accepté de jouer son propre rôle (!!), reprenant le témoignage qui fut l’une des principales bombes de l’article. Forcément, l’ensemble a des airs de Spotlight. Toutes ces enquêtes journalistiques se ressemblent un peu : on passe deux heures à voir des gens au téléphone, à manger du traiteur chinois tard la nuit dans des rédactions désertes, et à empiler les gobelets de café. Mais on assiste aussi à la construction de quelque chose d’important.

La réalisatrice Maria Schrader l’a bien compris : elle n’a pas besoin de grand chose pour captiver son public. La metteuse en scène de l’excellente série Unorthodoxe laisse parler son sujet, cherchant une mise en scène aussi sobre que ses cadres. Chaque évocation de Weinstein (ou de Trump, qui se fait entendre dans le prologue), chaque témoignage de victime est suffisamment glaçant pour ne pas avoir besoin de grand chose. Le tout est d’autant plus fort que Schrader reboucle à la fin sur les victimes évoquées dès le début, pour bien insister sur un point : leur parole est essentielle.

She Said ne révolutionne pas le genre par sa forme. Mais son fond est essentiel. Porté par deux fantastiques actrices, il mérite donc tout votre intérêt.

She Said, de Maria Schrader – Sortie en salles le 23 novembre 2022

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