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Critique : Mud

Dans deux semaines, tous les regards seront rivés vers la Croisette et son célèbre festival.

Un an après avoir été montré au Festival de Cannes, le film de Jeff Nichols Mud arrive sur les écrans. Les mystères de la distribution sont impénétrables. Pourquoi avoir attendu toute une année et nous laisser l’impression qu’on le sort en vitesse juste avant l’édition suivante ?

Mais laissons Cannes et ses plages bondées pour les rives du Mississipi…

 

Si son premier film Shotgun Stories était passé inaperçu, Jeff Nichols a bien eu le temps de se faire connaître par Take Shelter, sensation lors de la semaine de la critique 2011 qui fût accueillie avec fracas lors de sa sortie en salles l’an dernier par une presse toujours aussi enthousiaste.
Pourtant, son petit dernier Mud a fait un passage plutôt timide lors du dernier festival de Cannes, le film plaisant énormément au public mais repartant complètement bredouille.
Arrivant presque un an après sur les salles françaises, cette histoire portée par Matthew McConaughey a-t-elle donc les épaules suffisamment larges pour perpétuer la réputation de son réalisateur après Take Shelter ?

Mud est le nombre d’un homme errant trouvé par deux enfants sur une petite île du Mississippi, l’un des grands fleuves américains. Un homme qui va les prendre sous son aile en leur demandant de l’aider à remettre sur pied le bateau échoué sur l’île, tout en gardant contact avec Jupiner, la femme de sa vie, présente sur terre. Sauf que très vite, le jeune héros va se rendre compte que tout n’est pas aussi rose que prévu et que son nouveau mentor n’est pas l’homme qu’il prétend être. Tout en étant assez éloigné du Michael Shannon tourmenté du précédent film, Mud recoupe avec beaucoup d’éléments propres à l’univers de son réalisateur.
Une question d’atmosphère et d’environnement, puisque le film nous plonge au cœur de l’Americana et de son folklore, avec ses habitants qui vivent au grès de ce long fleuve tranquille pourtant rempli d’énigmes. Il y a une vraie fascination autour de ces paysages chargés d’histoire et de mystères, que ce garçon traverse avec l’envie d’y vivre quelque chose d’exaltant et de fort quand son entourage familiale tombe en morceaux. Une envie de retrouver la foi dans l’humain, de partager et comme toujours, de se sentir vivant. En traversant sans cesse ces décors magnifiques, sublimés par une photographie à la fois naturaliste et chaude, on suit cette quête folle d’un gamin qui a soudain l’impression de faire partie intégrante du monde avec un rôle précis et important à y jouer, avant de mieux se prendre les pieds dans le tapis de la dure et cruelle réalité.

C’est grâce à son personnage principal jeune et quelque part insouciant que Mud créer un attachement immédiat. Comment ne pas se reconnaitre dans ce garçon candide ne demandant qu’à croire en l’humain et se retrouvant face à un réel décevant ? Au cœur de ses terres respirant la grande histoire américaine et l’aventure, Mud est donc un appel à l’évasion et à une plus grande simplicité, confronté à des problèmes urbains bien moins trépidants. Une richesse des sentiments et des sensations couverte par une mise en scène plus épurée que précédemment chez Nichols, qui s’autorise le steadicam pour une caméra plus légère, plus douce et moins brute que sur ses précédents. De la même façon que le Mississippi suit son cours en accompagnant ceux qui l’entourent, Nichols nous embarque naturellement en accordant sa réalisation avec le tempérament de ses héros et de son histoire. Tout en étant plus mobile car plus ouvert dans le théâtre de son action, Jeff Nichols parvient à créer l’équilibre judicieux entre l’atmosphère de son récit et l’énergie de ses protagonistes, joués par deux jeunes acteurs absolument bluffants et un Matthew McConaughey qui continue de nous surprendre après La Défense Lincoln et Killer Joe par un charisme que l’on ne soupçonnait pas durant ces longues années de comédie romantiques insipides.
La narration tire parfois un peu sur la corde, et le long métrage aurait peut être gagné à être un rien plus court, mais l’on sort de Mud galvanisé tout en étant apaisé, avec la sensation d’avoir assisté à une histoire qui s’inscrit d’emblée dans une mythologie déjà installée. Et c’est bien en cela que Jeff Nichols mérite toute notre reconnaissance.

Mud constitue une nouvelle étape dans l’exploration des mythes américains et de ses grands symboles amorcée par Jeff Nichols dès son premier film. Avec une ambiance envoûtante et des personnages forts, le réalisateur réemploie ses thématiques les plus chères pour mieux les soumettre à une forme de récit nouvelle dans sa carrière, celle du conte initiatique. Plus simple mais peut être aussi plus abordable, il nous prouve une nouvelle fois l’étendue de son talent, et montre qu’il compte bien s’installer durablement dans le paysage cinématographique américain.

 

Mud – Sortie le 1er mai 2013
Réalisé par Jeff Nichols
Avec Matthew McConaughey, Tye Sheridan, Reese Witherspoon
Ellis et Neckbone, 14 ans, découvrent lors d’une de leurs escapades quotidiennes, un homme réfugié sur une île au milieu du Mississipi. C’est Mud : un serpent tatoué sur le bras, un flingue et une chemise porte-bonheur. Mud, c’est aussi un homme qui croit en l’amour, une croyance à laquelle Ellis a désespérément besoin de se raccrocher pour tenter d’oublier les tensions quotidiennes entre ses parents. Très vite, Mud met les deux adolescents à contribution pour réparer un bateau qui lui permettra de quitter l’île. Difficile cependant pour les garçons de déceler le vrai du faux dans les paroles de Mud. A-t-il vraiment tué un homme, est-il poursuivi par la justice, par des chasseurs de primes ? Et qui est donc cette fille mystérieuse qui vient de débarquer dans leur petite ville de l’Arkansas ?

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1 commentaire

  • par Gaëlle
    Posté mardi 7 mai 2013 10 h 46 min 0Likes

    Je suis assez d’accord avec toi. c’est un très beau film dont on sort avec une belle impression. Ici encore Jeff Nicols filme avec minutie un processus, quelque chose en train de se faire avec une grande justesse.

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