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Un Dimanche, Une Critique : Platoon

Quelques semaines seulement après la sortie blu-ray d’Apocalypse Now, c’est au tour d’un autre film de guerre de sortir sur ce support haute définition.

Dans celui-ci, nous sommes encore au Vietnam mais Charlie Sheen dans le rôle principal (après son père Martin dans Apocalypse Now) mais aussi Willem Dafoe et Tom Berenger.

Vous l’avez compris, Danny a décidé de consacrer ce numéro de Un Dimanche, Une Critique à Platoon d’Oliver Stone, sorti en 1987.

 

 

Platoon – Sortie le 25 mars 1987
Réalisé par Oliver Stone
Avec Charlie Sheen, Tom Berenger, Willem Dafoe
Septembre 1967: Chris Taylor, dix-neuf ans, rejoint la compagnie Bravo du 25ème régiment d’infanterie, près de la frontière cambodgienne. Chris, issu d’une famille bourgeoise s’est engagé volontairement et, plein d’idéal entend bien servir son pays. Mais la réalité est tout autre et ses illusions vont tomber les unes après les autres. Il sera également temoin de la rivalité sanglante qui oppose deux officiers qu’il admire. « J’ai eu l’idée de « Platoon » en décembre 1969 à mon retour du front. Mais personne ne voulut produire ce script « trop dur, trop noir et deprimant ».

 

La guerre du Vietnam, Oliver Stone la connaît, il y était. Cela lui a d’ailleurs servi pour écrire le scénario de ce qui est considéré comme un véritable succès critique et comme une œuvre marquante dans la filmographie du cinéaste, qui s’est retrouvée bardée de récompenses reçues aux Oscars et aux Golden Globes. Et même si le film est très américain dans le sens où il parle d’une guerre livrée par les Etats-Unis et est vue du côté américain, il développe des thématiques fortes, profondes et universelles.

La mise en scène d’Oliver Stone est efficace sans être tape-à-l’oeil, sobre sans être plate et même parfois lyrique mais réussissant malgré tout à ne pas faire perdre en crédibilité son propos, le tout porté par une bande-originale dont le thème de l’Adagio pour cordes de Samuel Barber reste l’élément marquant.
Il arrive à bien nous faire percevoir à quel point les personnages se retrouvent plongés dans une nature franchement inhospitalière, pas seulement parce qu’il s’agit de combattre un ennemi pouvant surgir à tout instant mais aussi parce qu’ils doivent composer avec la flore et la faune local, devant rester vigilant sur ce qu’il est bon ou non de faire dans ces conditions. Ils subissent également la moiteur et la chaleur mais aussi la pluie battante, le réalisateur réussissant à nous faire ressentir les conditions climatiques éprouvantes que nous constatons sur l’écran.

Le film est aussi soutenu par un casting de têtes connus et de seconds rôles talentueux livrant une interprétation sonnant juste, incarnant des personnalités aux caractéristiques clairement définies et profondément humaines avec leurs failles, leurs faiblesses et leurs convictions, ce qui rajoute un point de plus au réalisme d’un scénario qui donne un aperçu de la dureté de cette guerre.

Du début à la fin, nous suivons le parcours de Chris Taylor, campé par Charlie Sheen, dont les pensées nous seront présentés en voix-off afin de mieux cerner son état d’esprit évoluant au cours du métrage. Issu d’un milieu aisé, cultivé, maladroit car « débutant » et donc peu à l’aise, il accumule les fautes et garde une certaine distance par rapport à la situation, représentant l’état d’esprit de quelqu’un de civilisé (donc comme le spectateur) dans cet environnement, chose frappante dès les premières scènes.
Le personnage de Charlie Sheen est entouré d’individus qu’il perçoit d’abord d’un point de vue extérieur car ne faisant pas partie du même niveau social qu’eux. Lui est venu par conviction plutôt que par nécessité, là où les autres sont ici car n’étant considérés que comme stagnant au bas niveau de la société, ni plus ni moins que de la chair à canon en somme, luttant pour des enjeux les dépassant et qui peuvent être résumés en une simple phrase : « c’est politique ».

Nous n’avons donc que leurs façons de voir les choses pour constater les événements, n’ayant jamais aucune explication sur la façon de penser du camp d’en face. Il suffit de remarquer que lors de la scène où les soldats arrivent dans un village, aucun sous-titre de traduction n’est présent, le spectateur restant totalement « dépendant » du traducteur incarné par Johnny Depp, tout comme peuvent l’être les militaires présents.

Au fur et à mesure que le personnage de Charlie Sheen s’endurcit et finit par les côtoyer, il finit par être totalement des leurs, notamment grâce à la scène où lorsqu’il reçoit sa première balle au cours d’une de ses nuits de garde qui finit par le rendre inconscient (et meurt de manière symbolique), le faisant devenir, une fois « ressuscité », plus proche d’eux. Il adopte, ou en tout cas comprend, leurs points de vue sur la situation. En revanche, on pourra peut-être reprocher à Oliver Stone d’avoir de temps en temps insisté sur l’évolution de Chris Taylor par les dialogues qu’il peut avoir avec ses camarades, comme si le spectateur était incapable de comprendre sa modification psychologique par lui-même.
Quoi qu’il en soit, le spectateur et Taylor comprennent que, dans l’endroit où ils se trouvent, les repères sociaux habituels sont brouillés. Le recul qu’ils pouvaient se permettre est effacé et les détails politiques, le bien et le mal, les jugements moraux sont les grands questionnements de ces soldats sans repères. Le seul ancrage qu’ils peuvent avoir est celui qu’il leur est donné, à savoir combattre l’ennemi.

Le duel entre le sergent Elias (Willem Dafoe) et le sergent Barnes (Tom Berenger) représentent plus qu’un simple duel entre deux hommes aux fortes personnalités, car ce n’est pas parce que l’un de ces deux leaders mourra que son idée partira avec lui. Il s’agit de deux façons de penser, deux formes d’idées qui s’opposent, deux forces en présence tellement puissantes et incompatibles qu’elles ne pouvaient que s’affronter, l’un voulant encore respecter les lois et considérant la guerre perdue d’avance, l’autre désormais capable de tuer en justifiant ses actes par le conflit.
Cet affrontement entre ses deux hommes est aussi un combat interne, d’abord dans l’esprit de Chris Taylor, puis parmi les différents individus sous le commandement d’Elias et Barnes. Plus qu’une lutte contre quelque chose d’extérieur, il s’agit donc de plusieurs luttes intestines repérables grâce à différents niveaux de lectures. La conclusion de tout ceci sera une révélation que le personnage de Charlie Sheen et le spectateur découvriront simultanément.

La scène finale où Chris Taylor, blessé, rentre chez lui tout en observant de l’hélicoptère le Vietnam de haut, semble être la manière de nous montrer qu’il reprend son point de vue extérieur et se remet de nouveau à notre niveau, car bien que la guerre soit terminée en tant que telle, elle sera toujours présente quelque part en lui.

Platoon est certes un film de guerre, mais davantage une histoire humaine mettant l’Homme dans une situation difficile afin qu’il se retrouve face à lui-même et puisse se rendre compte véritablement de qui il est.

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