Séance de rattrapage. Chaque fin d’année, on profite des fêtes pour voir des films dont le bouche à oreille a été conséquent et qui sont encore en salles ou disponibles en VOD. C’est le cas d’Une Bataille Après l’Autre, évité à sa sortie car pas du tout convaincu ni par sa promotion (et en particulier par son horrible bande-annonce) ni par sa trop longue durée. Pourtant, en voyant fleurir des notes dithyrambiques sur Letterboxd et en lisant le titre dans de nombreux classements de fin d’année, l’envie a changé. A raison vu l’incroyable résultat.
Ghetto Pat et Perfidia Beverly Hills (ce sont leurs noms) font partie d’un groupe qui se rebelle contre le gouvernement en libérant des émigrés mexicains retenus dans des camps, en faisant exploser des bureaux de politiciens et en s’attaquant au réseau électrique. Ils ont une relation qui débouche sur la naissance d’une petite fille. Des années plus tard, alors qu’elle est devenue une jeune adulte et que sa mère a pris le maquis, elle est obligée de fuir avec son père looser : le militaire qui avait arrêté sa mère l’a retrouvée.
Paul Thomas Anderson raconte différentes batailles, les unes après les autres. La première est citoyenne et politique. Le film s’ouvre sur l’attaque d’un camps militaire par le groupe rebelle, les French 75 et surprend par son action. La séquence est brutale et rythmée, et on prend vite parti pour eux face au pouvoir en place. PTA ne s’en cache pas : c’est un film anti-raciste et anti-fasciste, et donc naturellement anti-Trump, appuyé par la mise en avant d’une société secrète de suprémacistes blancs et par un général de l’armée, un cinglé prêt à tout et brillamment interprété par Sean Penn. C’est aussi un film qui montre qu’il existe une résistance, et donc de l’espoir, face à l’adversité.
C’est dans ce contexte engagé et très encadré (le mouvement French 75 est particulièrement organisé mais il n’est pas le seul) qu’on va suivre une histoire de famille : celle d’une jeune fille qui a grandi sans sa mère, qui s’occupe d’un père totalement à la ramasse. On va découvrir qu’elle a hérité de la force de caractère de sa mère (et la comédienne, Chase Infiniti, découverte dans Présumé Innocent, est incroyable). Le père, lui, va devoir remonter très vite la pente qu’il descendait pour mieux la sauver. Et Leonardo di Caprio est une nouvelle fois impérial, incarnant un personnage tout en nuance et loin du bouffon que cherchait à vendre la promo. Étonnamment, on pense à Terminator 2 : le méchant inarrêtable, le parent qui cherche à protéger à tout prix sa progéniture… Il y a un peu de James Cameron dans la construction du récit de Paul Thomas Anderson.

Cette petite histoire au sein de la grande montre la maestria de PTA. Superbement filmé (on pense en particulier à l’art de filmer des poursuites, en particulier la dernière), porté par des acteurs à fond, Une Bataille Après l’Autre marque aussi par sa bande originale, des compositions impeccables de Jonny Greenwood (le guitariste de Radiohead) à la sélection parfaite de chansons (Ella Fitzgerald, les Jackson 5, Steely Dan). Et on ne peut s’empêcher de penser au choix de la chanson finale. Tom Petty et ses Heartbreakers chantent American Girl. Et on se prend à rêver d’une Amérique porté par des personnages comme la fille américaine dont la bataille ne fait que commencer.
Well, she was an American girl
Raised on promises
She couldn’t help thinkin’ that there
Was a little more to life
Somewhere else
After all it was a great big world
With lots of places to run to
Une Bataille Après l’Autre, de Paul Thomas Anderson – Sortie en salles le 24 septembre 2025 – En blu-ray le 28 janvier 2026

