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Critique : Mademoiselle Julie

Mademoiselle Julie est une pièce suédoise écrite en 1888 par August Strindberg. Elle a plusieurs fois été adaptée, notamment en 1972 avec Helen Mirren pour la télévision britannique ou en 1999 par Mike Figgis avec Peter Mullan.

La version qui nous intéresse aujourd’hui rassemble Jessica Chastain, Colin Farrell et Samantha Morton. Un casting pour un huis clos irlandais présenté au dernier festival de Toronto.

Mais que peut bien valoir le nouveau film de la réalisatrice Liv Ullmann, en salles ce 10 septembre ?

 

Devenue réalisatrice depuis 1992, l’actrice Liv Ullmann s’est décidée à passer enfin la barrière de la langue avec son quatrième long-métrage. Projet tout en Anglais avec un trio reconnu, Mademoiselle Julie est l’adaptation de la pièce de théâtre homonyme du suédois Strindberg. Coïncidence, il s’agit de sa quatrième au cinéma. Mike Figgis étant le dernier en date à l’avoir transposé sur le grand écran en 1999. Donc malgré que Liv Ullmann partage la même patrie que l’auteur de la pièce d’origine, elle s’émancipe du Suédois et de tenter cette aventure plus internationale avec un long-métrage élaboré pour un public Anglo-saxon et au casting cinq étoiles. Cependant, un bon produit de base et des bons acteurs ne font pas tout…

Faisant suite à une nouvelle traduction de la pièce de 2006 par Frank McGuinness, Mademoiselle Julie se déroule en Irlande en 1890 au soir de la Saint Jean. Après un court flashback en guise de prologue sur une jeune Julie errant dans sa vaste propriété familiale, entre en scène monsieur Jean (Colin Farrell), le valet du baron et père de Julie. Jean est promis à Kathleen (Samantha Morton), la cuisinière, mais va se retrouver embarquer dans un jeu de séduction répulsion avec Mademoiselle Julie (Jessica Chastain), solitaire et manipulatrice.

Voilà la question du casting réglée. En dehors de quelques entorses mineures à la règle à l’ouverture et en clôture de son film, Liv Ullmann prend ainsi le parti-pris du huis clos et séquestre ses trois acteurs dans la maison, voire plus particulièrement dans la cuisine, pièce centrale de l’action. Il faut alors faire extrêmement attention à son intention de mise en scène, car ce dont l’adaptation cinématographique de pièce de théâtre souffre le plus est du manque de considération des réalisateurs de l’importance de la mise en scène avec une caméra, un cadre, une photographie…

Et c’est là que le bas blesse concernant Mademoiselle Julie. En arrivant à convaincre Chastain, Farrell, et Morton à jouer dans son film, Liv Ullmann a oublié (consciemment ou non, on ne le saura jamais) que ses acteurs, aussi bons soient-ils, ne suffisent pas à eux seuls à soutenir sur leurs épaules un long-métrage de 2h13. Au théâtre, le comédien est libre de déambuler dans son décor, face au public, mais pas au cinéma. Il ne suffit pas de poser sa caméra et de laisser ses acteurs dérouler leurs répliques jusqu’à ce l’on coupe. Il faut savoir les mettre en valeur par le cadre, donner une logique et une intention à sa mise en scène et bien ce qu’il manque au film de Liv Ullmann.

La caméra est bien souvent immobile. Aucune trouvaille n’émerge pour faire transparaître quelque chose à l’image. Si les longs plans permettent aux acteurs un certain challenge de pouvoir incarner leurs personnages en continue pendant plus de trois minutes, le manque de mouvements ou de mise en valeur des comédiens témoigne cruellement d’une inspiration inexistante et d’une incompréhension totale du métier de réalisateur.

De cette situation incongrue découle un jeu du trio, au départ juste, qui progressivement va se transformer en interprétation du texte de Strindberg en roue libre. L’ennui n’aidant pas, il est alors difficile de savourer leur prestation. La faute revient à Liv Ullmann qui a complètement oublié de diriger son casting, le laissant déambuler devant sa caméra. Ce ne sera pas le final couru d’avance et prétendument amateur de belles peintures qui rattrapera l’affaire.

Pire encore, l’autre terrible faute de Mademoiselle Julie est l’utilisation seule et unique pour sa bande originale du trio au piano de Schubert et si attachée à l’imaginaire du Barry Lyndon de Stanley Kubrick. Et lorsque l’on assiste à des querelles d’amour entre riches et serviteurs dans la campagne irlandaise, il est déjà difficile de ne pas faire le rapprochement. En usant (et abusant sûrement) de ce morceau de musique classique, Liv Ullmann a placé son film en comparaison directe avec le chef d’œuvre de Kubrick. Forcément, il est compliqué de tenir la distance, surtout si l’on manque aux fondamentaux de la mise en scène cinématographique.

 

Mademoiselle Julie – Sortie le 10 septembre 2014
Réalisé par Liv Ullmann
Avec Jessica Chastain, Colin Farrell, Samantha Morton
1890, Irlande. Tandis que tout le monde célèbre la nuit des feux de la Saint Jean, Mademoiselle Julie et John, le valet de son père, se charment, se jaugent et se manipulent sous les yeux de Kathleen, la cuisinière du baron, jeune fiancée de John. Ce dernier convoite depuis de nombreuses années la comtesse voyant en elle un moyen de monter dans l’échelle sociale.

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