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Un Dimanche, Une Critique : Le 13e Guerrier

John McTiernan a réalisé quelques films cultes dans leur genre. On peut évoquer Piège de Cristal dans la catégorie des meilleurs films d’action, Octobre Rouge dans celle des meilleurs films de sous-marin. Ou encore de grands moments comme Predator ou Last Action Hero.

En fait, il n’y a pas grand chose à jeter dans la carrière de « McT » et surement pas son film de Vkings dont Basile va vous parler en ce dimanche de long weekend.

Un Dimanche Une Critique est en effet consacré au 13e Guerrier, disponible depuis quelques semaines dans une très belle édition blu-ray.

 

Le 13e Guerrier – Sortie le 18 aout 1999
Réalisé par John McTiernan
Avec Antonio Banderas, Dennis Storhoi, Vladimir Kulich
Contraint a l’exil par son calife, pour avoir séduit la femme d’un autre, Ahmed Ibn Fahdlan est envoie comme ambassadeur en Asie mineure. Une prophétie l’oblige a devenir le « 13e Guerrier » d’un groupe de Vikings partant porter secours au seigneur Rothgar, dont le village est régulièrement attaque par une horde de démons, mi-humains mi-animaux. Au cours de ce long périple vers le nord de l’Europe, Ahmed apprend la langue de ses compagnons et le maniement des armes. Sur place, il devra affronter ses propres peurs.

 

Cette critique est avant tout le récit d’une conversion récente. Mon premier souvenir du 13e Guerrier remonte à une lointaine diffusion télé (peut-être la première sur une chaîne gratuite, quoiqu’il en soit, c’était en 4/3 et en vf). Mes souvenirs bien flous se résumaient à un film sombre, dans lequel il ne se passe pas grand-chose et aux scènes d’action incompréhensibles. À l’époque, même si j’avais vu presque tous ses films, j’ignorais qui était John McTiernan.

Le temps aidant, j’ai fini par m’intéresser aux gens qui faisaient les films que j’aimais et à apprendre leur nom. Restait ce souvenir pas terrible, auquel venait s’ajouter la crainte légitime d’être à nouveau déçu lorsque je commençais à entendre parler de « massacre », de « film amputé », de « vision trahie ». Ainsi les rumeurs parlaient d’une version longue qui prendrait tout son sens, alors que le montage sorti en salles ne serait qu’une copie inachevée, même si parcourue de fulgurances.

Dans toutes ces discussions, je voyais surtout poindre l’essentiel : on parlait du film. Des cinéphiles que j’estime faisaient preuve d’un attachement particulier au 13e Guerrier, même dans sa version salles. Ce qui était suffisant pour attiser ma curiosité. Trois mois avant la sortie du blu-ray, j’ai (re)découvert un peu par hasard la bande-son de Jerry Goldsmith. Coup de foudre immédiat. Même si le film était un peu raté voire complètement insupportable, il fallait que je le revois pour en avoir le cœur net. Banco donc avec la sortie blu-ray en ce mois de Novembre. Entre temps, mon excitation et mon impatience n’ont fait que croitre, surtout après avoir lu des textes comme celui-ci.
Voici enfin le visionnage. 1h37 plus tard, je suis un converti. Oubliée, l’histoire des coupes au montage. En l’état, l’unique version salles est déjà un très grand film. Parcouru tout du long par un souffle épique et majestueux, le film réussit le tour de force à se pratiquement passer de scènes d’action. Il y en a bien trois, mais elles sont courtes, et prises individuellement, elles auraient peine à satisfaire les attentes qu’on peut avoir face à un film d’heroic fantasy. Seulement voilà, d’une part elles sont intégrées au film et ne peuvent être jugées à part tant l’ensemble est organique, et d’autre part, si elles génèrent une quelconque frustration c’est uniquement en réaction à une attente qui n’est pas nécessairement pertinente.

On ne retrouve pas la grâce chorégraphiée que permettrait un découpage plus posé mais les combats ne sont pas brouillons pour autant. Filmés caméra à l’épaule, certes, mais avec toujours un soin extrême apporté à la composition des cadres (j’ai notamment en tête la dernière séquence, qui se résume à une simple charge découpée en une succession de « tableaux »). À l’évidence, l’intérêt du 13e Guerrier est ailleurs. Et il n’y a pas à chercher bien loin, ce film vaut avant tout pour son ambiance extraordinaire.

Toutes proportions gardées, on serait même tenté de tracer un parallèle avec le récent Black Death de Christopher Smith. Deux films ancrés dans un certain réalisme, qui n’offrent que peu de combats et utilisent le contexte médiéval pour se livrer à une exploration du mal/de la sauvagerie, en démystifiant au fur et à mesure les éléments fantastiques pour se résumer à un affrontement entre simples humains. Nul besoin donc de moulinets d’épée dans tous les sens (même si c’est toujours agréable, quand c’est bien filmé) lorsqu’il s’agit d’offrir une aventure viscérale qui met les hommes à égalité face à leurs peurs fondamentales (que l’on soit un lettré rationnel comme Ahmed Ibn Fahdlan ou un guerrier farouche comme Buliwyf).

C’est donc une aventure sensorielle à laquelle nous avons droit (Rafik Djoumi, dans le lien donné plus haut, insiste bien sur la présence physique du décor, sur l’impact que l’environnement a sur les personnages), d’un script élégant aux dialogues soignées et jamais bourrins, sublimée par cette photo naturelle à la fois somptueuse et radicale qui constitue une rareté dans le cinéma d’action.

La remasterisation du blu-ray fait parfaitement honneur à cette image si particulière. Quant aux bonus, ils sont passionnants et très bien secondés par le livret signé Nicolas Rioult (pour une excellente analyse du disque, voir sur Forgotten Silver). Non seulement Rioult offre une exégèse très pertinente mais il lève également le voile sur les zones d’ombres qui entourent la production houleuse du film et dissipe les rumeurs d’un montage de 2h30.

Le 13e Guerrier (ou Eaters of The Dead pour les puristes) n’existera pas sous une autre forme que cette version sortie en salles. Mais parler simplement de « beaux restes » serait un bien grave euphémisme. Et finalement, tout le film se retrouve cristallisé dans sa fin, à travers ces deux prières. D’abord celle d’Ibn, qui énonce à voix haute ses regrets : toutes ces pensées qu’il aurait dû avoir et qu’il n’a pas eu, tout ce qu’il aurait dû dire et qu’il n’a pas dit et tout ce qu’il aurait dû faire et n’a pas fait. Bref, tout ce qu’aurait pu être le film. Puis, l’arrivée d’un Buliwyf chancelant, empoisonné, et condamné (la ressemblance physique entre Vladimir Kulich et John McTiernan lors d’un plan est même frappante) qui rallie ses hommes en entonnant d’une voix forte la prière viking des temps anciens. Cette séquence scelle définitivement ma conversion, il suffit de cette minute sous la pluie battante, avec le score colossal de Jerry Goldsmith et les voix tonnantes des guerriers qui acceptent leur destin pour se sentir transporté et électrisé. Et Ibn et Buliwyf de combattre de toutes leurs forces et sauver le village. À l’issue de cette formidable scène, l’amertume de la perte ne peut faire oublier les dernières paroles du chef viking : les braves vivent à jamais dans les palais du Valhalla. Il en est de même pour les films comme Le 13e Guerrier.

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3 Comments

  • par Olivier
    Posté dimanche 13 novembre 2011 11 h 25 min 0Likes

    Le matériau d’origine, qui n’est autre que la légende de Beowulf façon Michael Crichton, est pas mal non plus.

  • par paul
    Posté lundi 14 novembre 2011 18 h 37 min 0Likes

    Je me souvient de l’avoir vu au cinéma et de l’avoir aimé malgré ses défaut . Je me souvient aussi que déjà à l’époque on maugréait contre Crichton qui avait plus ou moins mis son nez dans la poste production et au montage et qui serait la cause principal des défaut du film.

  • par L'homme revenu du Valhalla
    Posté mardi 15 novembre 2011 1 h 49 min 0Likes

    Comme tu me fais plaisir Basile. Vraiment. Je défends le 13e Guerrier bec et ongles depuis ma tendre enfance et ma seconde vision de la VHS. Oui, seconde, parce que je me souviens de cette bande annonce qui m’avait tant fait envie, et de cette attente de la sortie en VHS (parce que j’habitais très loin d’un cinéma), et lorsque je l’eût finalement vu… Je fus déçu. Ma première grande leçon de cinéphile. Modérer ses attentes, et finalement accepter ce qui est bon. Reconnaître ce qui est mauvais. La seconde vision de ce film m’a fait tomber amoureux. Je l’ai aimé pour ses défauts et ses qualités. Oui, les scènes d’actions sont illisibles. Mais cette beauté de l’image et du son (quel score, dans la forêt, ou prés des chutes) et ce crescendo préparé depuis le début du film. On s’attend à un affrontement dés lors que les barbares sont à la poursuite du convoi du protagoniste. Il est alors en fuite. Et finalement, sous une pluie battante, à mi-chemin entre la vie et la mort, il accompagne ses frères d’armes dans ce chant chargé d’émotions, et il fait face. Rhaaaaaaa, je crois qu’on peut mourir pour des moments de cinéma comme celui-ci… Ou en tout cas, pour une critique comme celle-là ! Bon va falloir que je me le re-re-re-re-re-re-re-re[…]-re-re-visionne moi !!
    Merci !

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