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Un Dimanche, Une Critique : Hellboy II

Brièvement critiqué sur le site lors de sa sortie en salles en 2008, le 2e volet des aventures du personnage créé par Mike Mignola méritait mieux que cela.

Ca tombe bien, s’il y a un film mêlant à la fois grande aventure, fantasy, éléments steampunk et réalisation ultra soignée, c’est bien le film de Guillermo del Toro. Il rentre donc parfaitement dans le cycle initié par Arkaron. On en dira pas plus pour vous laisser découvrir cet excellent papier.

Ce 3e numéro de Un Dimanche, Une Critique spécial Aventure Steampunk est consacré à Hellboy II Les Légions d’Or Maudites.

 

Hellboy II Les Légions d’Or Maudites (Hellboy II The Golden Army) – sorti le 29 octobre 2008
Réalisé par Guillermo Del Toro
Avec Ron Perlman, Selma Blair, Doug Jones
Le Prince Nuada, héritier de l’ancien royaume des elfes, revient d’exile afin de réunir les morceaux d’une couronne qui lui permettrait de prendre le contrôle des légendaires légions d’or et de faire payer ses crimes à l’humanité. Lancée sur sa trace, l’équipe du BPRD, menée par Hellboy, doit l’arrêter avant qu’il ne soit trop tard…

 

C’est quatre ans après la sortie du premier Hellboy que Del Toro, fan invétéré du comic de Mike Mignola, nous offrait sa suite. Si le premier film s’apparentait au film de super-héros classique dans les grandes lignes, avec des pointes d’occultisme dans le scénario et des pointes de génie dans l’esthétisme, le second se permet cependant de s’éloigner considérablement des poncifs du blockbuster qui doit tout faire péter. Ou plutôt devrais-je dire, Hellboy II, c’est un peu le vilain enfant qui vient faire péter les autres blockbusters.

Le succès d’Hellboy permet au réalisateur (qui entre temps nous sortait le monumental Labyrinthe de Pan) d’enlever la ceinture de sécurité et –enfin– d’appuyer sur le champignon. Le film s’ouvre donc par une mise en abime qui subsistera en filigrane tout du long : le jeune Hellboy qui découvre l’histoire des légions d’or maudites par la bouche de son père se veut le reflet à peine déguisé du spectateur qui découvre l’histoire d’Hellboy et ces mêmes légions d’or par la caméra de Del Toro. Le premier tournant conséquent que prend le narrateur est d’inverser les rapports de force entre le conte et ce qu’on connait de la réalité. En effet, l’introduction du Prince Nuada a pour effet, par le biais d’une idée de mise en scène simple au possible mais ô combien efficace, de présenter l’univers dépeint comme fondamentalement différent du nôtre, avec l’apparition abrupte et éphémère du réel (le métro). En d’autres termes, le spectateur sait dès lors que ce qui est normal dans ce monde, ce sont les démons, les mutants, les elfes et les gobelins, et ce qui est étrange, c’est le monde des hommes. L’artifice du néophyte, employé par le premier film à travers le personnage de l’agent Myers, est donc totalement évacué, et la diégèse d’Hellboy II s’impose d’elle-même au spectateur. Cette idée sera tenue jusqu’à la fin du film, le protagoniste apprenant son appartenance au conte de manière plutôt douloureuse (son rejet par l’humanité). C’est alors que la phrase du Professeur Broom en début de métrage prend tout son sens : Hellboy sait que les légions d’or existent bel et bien parce qu’il se rend compte qu’il fait partie du même univers.

Ce parti pris se révèle être assez logiquement une fenêtre grande ouverte sur les meilleures fantaisies de ses auteurs. Ils n’hésitent de fait pas à transformer leur œuvre en tout sauf ce qu’on pourrait en attendre : on oublie tout aussi bien le conte tout public que n’auraient pas renié les studios, que l’histoire sombre et tourmentée plus proche des BD de monsieur Mignola que les fans attendaient. À la place, The Golden Army se trouve être un film de potes sur fond d’histoire d’horreur.

Un film de potes, d’abord, en cela que la relation entre Hellboy et Abe se voit renforcée grâce à un parallèle dans leur relations amoureuses, et portée à un paroxysme dans une scène de cuite qui prend tout le monde à contre-pied, en particulier pour un tel film. Brisant ainsi l’image lisse de Sapiens et l’image rude du gros rouge, cette séquence permet, avec économie de dialogues à la clé, de rendre plus humains les « monstres », que les humains eux-mêmes.

On en arrive au second point : Del Toro s’écarte entièrement du super-héroïsme pour faire d’Hellboy un personnage dramatique qui renvoie aux meilleurs dilemmes théâtraux. Ceci est particulièrement évident dans deux scènes à la poésie trop rare : le choix du héros de faire disparaitre à jamais ou non une créature telle que le fondamental, et le choix prophétique de Liz de sacrifier ou non le monde au nom de son amour pour Hellboy. Ces deux passages, moments de cinéma inoubliables, donnent au film une puissance symbolique que ne renierait pour rien au monde l’homologue papier du démon.

Vous l’aurez compris, The Golden Army pourrait sans mal fonctionner sans son préquel. Pour redéfinir la dynamique d’équipe, cependant, les scénaristes ont choisi d’introduire le fabuleux personnage de Johann Krauss, ectoplasme de son état à double usage. Le premier est purement narratif et donne lieu à quelques scènes d’anthologie (les vestiaires pour l’humour et l’avant-dernier combat pour l’action) ; le second, quant à lui, va au-delà de l’histoire et est expliqué par le réalisateur lui-même : Krauss est l’image parfaite des bureaucrates d’Hollywood et d’ailleurs : rigide, impersonnel, sans visage. Heureusement, le personnage ne pouvait pas rester qu’un vecteur à critiques franchement osées de la part du cinéaste, et il trouve sa rédemption juste avant l’acte final : « au diable l’autorisation » de botter des fesses, allons-y quand même !

Afin d’enrober ce délice de subversion infiltré au cœur du système, Del Toro délivre une histoire fantastique intemporelle, et nous offre un produit-fini d’une grâce absolument magnifique : perfection plastique entre le conte de fées, le conte gothico-steampunk et le film horrifique, inventivité sans borne dans la création d’un bestiaire unique (le marché des trolls), scènes d’action d’un dynamisme irréprochable et audace à la limite de l’orgueil (le remake animé de l’introduction du Dracula de Coppola).

Hellboy II est un film qui ne prend pas le spectateur avec des pincettes : il lui promet une évasion totale et merveilleuse, et c’est ce qu’il lui donne ; d’office. Une plongée au cœur d’une fiction qui s’est émancipée de la tutelle pesante de la réalité. Le voisin parfait, dans votre vidéothèque, pour un film au résultat similaire mais au cheminement bien différent, tel que La Cité des Enfants Perdus.

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2 commentaire

  • par Olivier
    Posté dimanche 18 septembre 2011 12 h 57 min 0Likes

    Ce Hellboy contient autant le meilleur que le pire. La scène d’intro a fait l’objet de pas mal de critiques, faut dire que c’est pas une franche réussite. Aucune allusion non plus dans cette critique au fait que l’univers se distingue du premier, qui était plus lovecraftien. Le meilleur c’est évidemment le marché des Trolls. Rafik Djoumi disait qu’il retrouvait « l’esprit Star Wars » chez Jackson, moi c’est chez Del Toro que je le retrouve.

    Mais bon merci quand même pour cette lecture, en attendant Pacific Rim

  • par Klaatu
    Posté dimanche 18 septembre 2011 18 h 02 min 0Likes

    Ron pearlman ne veut toujours pas reprendre le role ?

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