Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

Un Dimanche, Une Critique : Cours, Lola, Cours

Après avoir passé un week-end à vous parler de l’oeuvre des Wachowski à travers un gros dossier en marge de la sortie de Cloud Atlas, on a voulu aller encore un peu plus loin.

Cette fois, on s’arrête sur un film du troisième réalisateur du film sorti mercredi dernier : Tom Tykwer. Le metteur en scène allemand a tourné quelques long-métrages chez lui avant de s’essayer à la production américaine (avec Le Parfum ou encore l’Enquête). Celui qui nous intéresse est son troisième, celui qui a révélé Franka Potente au grand public quelques années avant La Mémoire dans la Peau.

Un Dimanche Une Critique est consacré à Cours, Lola, Cours.

 

Un concept tenant sur une ligne (un high concept, donc), trois-quatre acteurs et quelques figurants, 80 minutes, un rythme insoutenable et surtout d’innombrables idées de mise en scène regroupées, réorganisées, revivifiées pour modéliser un joli coup de poing en pleine figure d’un cinéma européen mollasson sur l’interface idéelle d’un fou furieux et ambitieux, mais aussi sincère et explorateur.

Difficile d’appréhender le film de Tom Tykwer dans sa totalité, puisqu’il s’agit au premier abord d’une mutation étrange et dérangeante qui ne laisse de répit qu’au terme de sa durée particulièrement courte et exténuante. Ce qui est sûr, c’est qu’il s’agit d’un test. Une expérience de laboratoire qui a bien tourné et qui fait preuve de l’ambition du savant fou de découvrir ce qu’il peut faire de sa créature et jusqu’où il peut pousser ses contraintes formelles.

Dans cette optique, Lola rennt revendique son appartenance à un cinéma expérimental couillu et un peu naïf qui tranche avec les œuvres ultérieures du cinéaste, comme son Parfum, tout aussi rentre-dedans pour qui s’accorde le temps d’observer, mais bien plus dosé dans sa narration. Cours Lola, Cours propose ainsi un bal exaltant d’outils narratifs qui joueraient inlassablement aux chaises musicales, au risque de perdre quelques participants en route.

Le but, on l’a compris, est d’utiliser toutes les possibilités du médium pour raconter son histoire… mais quelle histoire ? Certains diront qu’il s’agit d’un petit thriller simpliste et formellement surchiadé qui n’a rien à dire. C’est une façon de voir les choses, et il faut avouer que les interprétations sur le propos du film se révèlent assez souvent malhabiles, tant les portes grandes ouvertes par la structure du récit ne se refermeront jamais, quelles que soient les explications du réalisateur lui-même d’ailleurs. La vie, les choix, le test d’endurance et de volonté, au final, qu’importe, à chacun d’y voir ce qu’il souhaite, car tout ce qu’on peut faire de manière certaine, c’est se délecter de l’exercice stylistique qui nous est offert.

Qu’importe le propos ultime donc, et retenons simplement le découpage en (prologue, puis) trois actes/deux entractes, à mi-chemin entre les sketches, les flashbacks, les rêves et même le théâtre, l’intégration de l’animation au récit, l’organisation vidéo-ludique de l’intrigue, etc. Tant de procédés génialement combinés qui viennent accélérer un rythme déjà effréné et créer une expérience hors du commun.

Cependant, comme c’est souvent le cas dans les projets d’émancipation des normes narratives, le fond de l’œuvre peine à trouver une résonance marquante au-delà d’un propos universel finalement basique une fois l’enrobage dégusté. La complexité de fabrication du système par lequel est racontée l’histoire empêche, d’une certaine manière, d’opérer de réelles digressions substantielles comme le feraient Lynch ou Malick (à ceci près que le premier a probablement réalisé l’un des seuls films alliant ces deux aspect à la perfection : Mulholland Drive), avec une structure moins frénétique et vivace, mais plus complexe dans son agencement global.

Qu’est-ce donc que Lola rennt ? C’est un tourbillon d’énergie cinématographique éreintant aux motifs stylistiques apparents, et qui témoignent d’une passion et d’un talent qu’il est difficile d’ignorer. L’ensemble est tellement insaisissable que la poésie et l’émotion ne s’installent jamais. Cela viendra ultérieurement, avec l’expérience, pour la première fois dans son segment bouleversant de Paris, Je t’aime, et plus tard aussi…

 

Cours Lola, Cours (Lola rennt) – sorti le 7 avril 1999
Écrit et réalisé par Tom Tykwer
Avec Franka Potente, Moritz Bleibtreu, Herbert Knaup
Lola a vingt minutes pour trouver 100 000 deutschemarks et sauver la vie de son ami Manni…

Voir les commentairesFermer

Laisser un commentaire