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Roches Rouges : l’interview de Rodolphe Bonnet (1/2)
Le réalisateur de Roches Rouges, Rodolphe Bonnet, a bien voulu répondre à nos questions. Dans cette première partie, il parle notamment de la mise en route de son projet mais aussi -notamment- du casting. Même sans avoir vu le court métrage, c’est une vision intéressante sur le métier de réalisateur et sur le cinéma de genre qui vous est proposé. A lire absolument !
Bonjour Rodolphe. Est-ce que tu peux te présenter un peu à nos lecteurs qui ne te connaissent pas encore ? Nous dire qui tu es et quels sont tes goûts en matière de cinéma…
Rodolphe BONNET. 31 ans. Originaire de Lyon.
Mes goûts en matière de Cinéma : TOUT, du moment que le film est bon, même si honnêtement, j’ai une préférence pour le cinéma de genre. J’ai commencé « dans le Cinéma » en faisant un long métrage avec des potes. Le résultat était si mauvais que je me suis juré de réaliser avant tout un bon court métrage avant de repartir sur un long… ROCHES ROUGES est mon dixième court !!!
Comment est né le projet Roches Rouges ? D’une envie ?
Ca fait maintenant trois ans que j’essaye de monter un court qui s’intitule LA PAGE MANQUANTE. Entre les réécritures du scénar et les recherches de budget, des fois, je craque et je pars sur autre chose. Ca a donné ROCHES ROUGES, et avant ROCHES ROUGES, ça a donné LIBRE ECHANGE.
J’ai vu tes précédents courts. C’est ton projet le plus ambitieux. Combien de temps ça t’a pris ? Et comment monte-ton un projet comme ça techniquement et financièrement ?
Tu as vu tous mes précédents courts ? Menteur ! [NDLA : J’en ai vu quelques uns. Les courts métrages sont disponibles sur Dailymotion ou en libre téléchargement sur le site de Gerbille Prod]
L’avantage d’autoproduire un film, c’est qu’une fois que tu l’as écris, tu peux le tourner assez rapidement du moment que tu as suffisamment de thune.
Techniquement, on prépare le film de manière assez banale : j’ai déjà tourné avec pas mal de techniciens donc les principaux poste sont vite pourvus. Après chaque chef de poste sur le tournage (Lumière, Son, etc.) me dicte ses besoins en matériel et en personnes. Et moi, en tant que producteur, je leur dis comment s’en passer. Enfin, tout le reste, c’est ma première assistante qui gère…
Après, l’enfer, hormis le tournage, c’est la post-production. On a tourné le film il y a plus d’un an et on n’a toujours pas étalonné les images ni mixé le son à l’heure actuelle. C’est ça qui mine le moral parfois. Quand on veut faire les choses bien, sans argent, ça prend forcément du temps, car tout le monde qui travaille sur le projet le fait bénévolement sur son « temps libre ». D’un autre coté, ça évite de se précipiter et de foncer la tête dans le guidon. Un compromis entre les deux serait l’idéal. Au final, entre l’écriture et le master du film, plus de deux ans se seront écoulés.
L’idée du scénario t’est venue comment ? Qu’est ce qui t’a inspiré ? La fin, surprenante, était une évidence depuis le début ?.
Un film comme MASSACRE A LA TRONCONNEUSE marque les esprits car il modifie la façon de filmer l’horreur tout en s’ancrant dans la réalité. C’est un fait reconnu, le fait divers inspire le scénariste ! Des fois, il suffit d’écouter les nouvelles à la radio pour avoir des idées de films : par exemple, il y a un mois, j’ai entendu que, lors d’un accident de voitures qui s’est terminé en vraie boucherie, treize bras avaient été retrouvés alors qu’il n’y avait que six victimes. On peut, à partir de là, imaginer tout un tas de choses. Pour ROCHES ROUGES, je suis donc moi aussi parti d’un fait divers qui m’avait intrigué il y a plus de dix ans : quatre jeunes avaient disparu sans laisser de trace. Et ils n’ont jamais été retrouvés. Quand un jeune disparaît, tu te dis qu’il peut fuguer, se suicider, se faire enlever, tomber dans un puits et y crever mais quand quatre personnes disparaissent d’un coup en même temps, là tu commences à te poser des questions… Que s’est-il vraiment passé ? ROCHES ROUGES est mon interprétation trash de ce fait divers.
En ce qui concerne la fin, le film commence en annonçant la couleur :
« 17 août 1997. France. Quatre amis quittent paris pour se rendre au lac des Roches Rouges. Ils n’arriveront jamais à destination. Encore aujourd’hui, leurs disparition reste inexpliquée ».
Avec ces cartons en début de film, certaines personnes me reprochent de raconter la fin avant de voir le film ! Mais ROCHES ROUGES est un survival, on sait que les persos vont crever comme des chiens… Le public attend que ça d’ailleurs !
La fin a donc une double justification. Premièrement, elle prouve que, finalement, il y a peut être encore quelqu’un de vivant quelque part, dans des conditions que je tairais pour ne pas spoiler, et ça c’est bien plus atroce que de savoir que cette personne est morte il y a dix ans. Deuxièmement, la fin me permettait de laisser planer un doute quant à la réelle identité d’un des bourreaux. Cette fin peut donc être interprétée par le spectateur (qui le souhaitera) comme un twist à part entière..
On y retrouve des éléments un peu déjà vu ailleurs, notamment les méchants ou le fait (classique du cinéma de genre) que les filles soient très jolies. Règle à respecter obligatoirement ou hommage ?
La relation entre Papa et Maman, les deux bourreaux du film, me fascinait. Cette histoire d’amour déjantée me permettait d’aborder les méchants du film de manière tout à fait normale, en le présentant comme un couple qui a ses problèmes. Malheureusement, le format court ne permet pas de développer comme on le souhaiterait la psychologie des personnages, et notamment des bourreaux, car c’est eux qui m’intéressaient vraiment. Je voulais vraiment apporter quelque chose de neuf grâce à leur relation ambiguë. Apparemment, ça ne transparaît pas si clairement que ça dans le film. Je ne voulais pas qu’ils soient perçus que « comme des gros blaireaux tout moches qui butent tout ce qui bouge ». J’espère quand même que ça se ressent !
Pour la question des filles, je ferais une réponse à la Pascal LAUGIER à propos de MARTYRS : je préfère filmer deux filles canons que deux barbus. Non, plus sérieusement, pour le rôle d’Emma (Sophie CHAMOUX), je souhaitais (attention à ce que je dis, je vais m’en prendre une, voir deux) une actrice plus « mignonne » que « belle », quelqu’un d’attachant, qu’on a envie de prendre dans ses bras. Pour le rôle de Marie (Linda MASSOZ), il fallait que l’actrice soit « belle ». Car le personnage de Marie est un gros stéréotype de « l’héroïne de base » qu’on voit dans les films ricains que je déteste : belle à mourir, croyante, innocente, etc. C’est pourquoi c’est elle qui ramasse le plus dans le film. Après, je n’ai bien évidemment pas choisi ces deux actrices uniquement sur leur physique !
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Et financièrement, comment ça se passe quand on débute ? Comment on trouve des sous ? Et qu’est ce que ça coutera au final ?
Quand on parle de budget dans le court métrage, ça veut tout dire et rien dire à la fois. Globalement, tu pourrais te retrouver à faire le même film avec 10 000 ou 50 000 euros. Tout dépend de qui est payé, qui se goinfre au passage, si on te prête du matos ou pas, si tu as des prestations en nature, etc.
ROCHES ROUGES coûtera au final 10 000 euros. Ca peut sembler beaucoup. Mais au final c’est rien. J’ai trouvé les sous assez facilement et rapidement : c’est mon pognon ! Des fois, je rêve que je ne suis qu’un réalisateur et que je fais des courts métrages avec de l’argent qui n’est pas à moi.
>> 2e partie
Retrouvez aussi sur le film : l’interview du réalisateur (partie 1 & 2), le témoignage d’Emmanuel Bonami, l’interview de Sophie Chamoux et mon avis sur le film.