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Rencontre avec Ralph Meyer
Après Gerardmer, Angoulême !
Guillaume était au festival de la bande dessinée fin janvier dernier. Peut-être y étiez-vous aussi suite à la parution du guide de survie. Et il est revenu les bras chargés d’interviews.
Après un bref compte-rendu de ce qui s’est passé sur place, vous allez pouvoir découvrir sa rencontre avec le dessinateur d’une des meilleures BD parue en 2012-2013 : Asgard. Ralph Meyer, qui signe ce diptyque avec Xavier Dorison, est un auteur français ayant auparavant collaboré avec Tome sur Berceuse Assassine, avec Fabien Vehlmann sur Ian et plus récemment sur le premier tome de la série XIII Mystery : La Mangouste.
Il revient ici pour nous sur sa collaboration avec son scénariste et leur manière de travailler.
Le deuxième tome d’Asgard est disponible chez Dargaud depuis le 25 janvier.
Bonjour les jeunes !
Oh, je vous sens perplexes et dubitatifs… n’auriez-vous pas vu passer un article sur le magnifique site de CloneWeb à la fin du mois de janvier qui vantait les mérites du festival international de la bande-dessinée d’Angoulême ET DEPUIS PLUS RIEN !?
Eh bien, calmez vos angoisses, les jeunes, voici enfin des nouvelles du neuvième art !
Faisons d’abord un point rapide sur le festival lui-même. Et force est de constater que pour une édition anniversaire, la quarantième, c’était tout de même assez décevant : des éditeurs absents et/ou peu motivés, des expositions décevantes, une logistique un peu dépassée et un palmarès sympathique, certes, mais pas très stimulant.
Bref, on attendait largement mieux, moi le premier (autrement, je ne me serais pas permis de vous en parler, vous le comprenez bien). Je ne vais pas m’attarder ici sur les points négatifs du festival et je vous renvoie au billet de Loïc Massaïa sur le site du9 pour avoir plus de détails.
Il y eut tout de même de bonnes choses dans ce festival : l’exposition Andréas, la vigueur des éditeurs indépendants et tout simplement la disponibilité des auteurs qui année après année, acceptent de se jeter dans l’arène et de jouer le jeu des dédicaces et des rencontres avec le public.
Et justement, cette année, j’ai eu la chance de rencontrer trois auteurs, chacun avec un statut différent, ce qui vous permettra d’apercevoir -un peu- la variété de la production actuelle (vous pourrez lire l’interview d’un dessinateur grand public, d’une auteure jeunesse et d’un auteur indépendant (et espagnol !)
Nous commençons aujourd’hui avec le dessinateur Ralph Meyer, en pleine actualité puisque le tome 2 du diptyque Asgard (écrit par Xavier Dorison) est sorti fin janvier chez Dargaud.
Ralph Meyer a un dessin assez dynamique, influencé aussi bien par les comics américains que par Jean Giraud. Il est depuis quelques années un dessinateur en vogue. Rencontre.
Asgard
Tome 1 : Pied de Fer – Tome 2 : Le Serpent Monde
Dessins : Ralph Meyer – Scénario : Xavier Dorison
Editeur : Dargaud
Résumé du tome 1 : L’an 800… Plusieurs drakkars de guerres et des navires de pêcheurs disparaissent sans laisser de trace dans les lacs de Scandinavie… Une jeune esclave, Sieglind, échappe par miracle au naufrage du navire de pêche où elle travaillait. Elle est recueillie par un homme étrange, Asgard, dit « pied-de-fer », un « Krökkentötter », ancien guerrier viking devenu chasseur à la prime sur les proies les plus extraordinaires. Né avec un seul pied, le viking aurait dû, selon la tradition, être tué dès sa naissance par son propre père. Mais, ce dernier s’est rebellé et a donné à son fils le nom du domaine des Dieux. Depuis, Asgard a mené une vie de combats et de fureur avant de devenir un « chasseur de monstres ». La présence de l’un d’entre eux dans les territoires du Noordland lui offre une nouvelle opportunité de gain énorme et peut-être de se refaire une place au sein de la cour du Jarl, le roi viking. Accompagné par un émissaire de ce dernier, par un prêtre scalde et une femme maître de pêche, Asgard et Sieglind embarquent à bord d’un drakkar avec un objectif simple : trouver et tuer la créature qui hante les eaux des fjords… Bien qu’expérimenté et bien préparé, Asgard va découvrir que la menace qui rôde dans les lacs gelés est d’une nature bien plus redoutable que les grands ours ou les reptiles géants des lointaines terres du sud. Partis chasseurs, Sieglind et Asgard vont devenir les proies… Et tandis que la traque conduit les deux héros aux fins fonds du grand Nord, l’affrontement entre le Krökkentötter et l’animal devient la lutte épique entre un homme assoiffé de vengeance contre le destin que lui a donné sa naissance d’invalide… et le fils des Dieux.
Comment est né le projet Asgard ? Est-ce que c’est Xavier Dorison qui vous l’a proposé après votre collaboration sur XIII ? Est-ce une idée de Dargaud ? Est-ce que ça vient de vous ?
En fait, lorsque Dargaud, et notamment Yves Schlirf, nous a réunis pour qu’on travaille sur la Mangouste, on s’est très très bien entendu autant professionnellement qu’humainement et on a vite eu envie de retravailler ensemble. On avait été contacté par un autre éditeur qui nous a proposé de travailler dans un univers « viking ». Le projet n’a pas abouti mais pour nous, l’envie est restée d’utiliser tout ce qu’on avait mis en place. Donc a récupéré le projet et on l’a montré à Dargaud qui était emballé et c’est comme ça que c’est parti.
C’était donc un projet qui vous tenait à cœur ? Vous y pensiez depuis longtemps ?
C’était plutôt une commande à la base, on n’avait pas pensé nécessairement à traiter ce genre-là. Mais en y réfléchissant, en commençant à développer le scénario, l’envie est venue et voilà !
Comment se passe votre collaboration avec Xavier Dorison ?
Très bien. C’est un travail main dans la main sur toute l’élaboration du bouquin. Moi je peux intervenir sur son scénario comme lui peut intervenir sur ce que je lui propose comme mise en scène, jusqu’à la couverture.
C’est vous qui faites le découpage ?
Oui, je reçois une mise en scène sous forme littéraire et c’est moi qui refais tout sous forme visuelle. Après, je peux toujours ajouter une case ou en enlever une pour m’approprier le travail de Xavier et essayer de rendre ça le plus fluide possible.
L’histoire d’Asgard rappelle fortement celle de Moby Dick, d’Herman Melville, je me demandais si l’éditeur vous avez clairement demandé de retravailler ce classique ou si c’était le scénariste qui avait choisi ce biais-là pour parler des vikings ?
Disons qu’on est dans un récit de genre : c’est la traque d’un gros monstre et en effet Moby Dick est un peu le récit originel pour le genre. Et dans le premier tome, la référence à Moby Dick est nette, en effet parce qu’on est dans la traque obsessionnelle comme celle du capitaine Achab. Sauf que, dans le tome 2, je pense qu’on quitte cette référence parce que le capitaine Achab dans Moby Dick, finalement, il ne bouge pas : il reste le même du début à la fin de l’histoire et c’est son obsession qui va entraîner sa fin.
Là, on est dans un autre schéma : Asgard est un personnage qui évolue : on part d’un personnage obsédé par son monstre et en colère contre les dieux, contre tout le monde vers un personnage plus apaisé, qui doit sa transformation au personnage de Sieglind. Donc là, on quitte complètement le récit de Moby Dick.

Concernant la préparation graphique, et en commençant par les décors, est-ce que vous vous êtes rendu sur place, en Scandinavie ?
Non, j’ai travaillé d’après énormément de photos. Des amis à moi étaient partis justement dans cette région et m’ont rapporté pas d’images et quelques vidéos.
Et en ce qui concerne les personnages ? Asgard a tout de même une barbe qui rappelle celle d’Achab, sa jambe infirme aussi…
Oui, oui, c’est vrai, en effet.
Mais on est loin du cliché des vikings blonds avec des casques à cornes…
Oui, je crois que cette image vient du registre humoristique à la base. Je ne voulais pas spécialement être ultra juste historiquement pour le visuel mais j’avais la volonté que cela ait l’air juste, qu’à partir du moment où on commence la lecture, on se dise « Ok, ça va, j’y crois. C’était peut-être pas exactement comme ça mais j’y crois ».
Et cette idée de réalisme, on la retrouve aussi dans le monstre : là où vous auriez pu vous lâcher et faire une créature mythologique ou un dragon, vous êtes resté sur un animal réel.
Oui, tout à fait, parce qu’on est sur une supposition pendant un long moment qui est : est-ce qu’on est face à un monstre mythologique ou simplement face à une aberration de la nature ? On a joué pendant tout un temps sur ces deux niveaux. Donc il fallait que le monstre soit très impressionnant par son gigantisme mais en même temps, dans son design, il devait rester complètement crédible par rapport à une murène classique.
Ce dessin c’était donc par souci de réalisme ou pour proposer quelque chose de nouveau ? Par exemple, il y a très peu de blonds parmi les personnages (et il y en a notamment un qui finit mal) et l’héroïne principale, Sieglind, est brune. C’est un code que vous avez voulu cassé ?
Oui et non. Sieglind est une esclave donc elle ne fait pas vraiment partie de la communauté des vikings. C’était donc un code facile pour montrer le décalage de ce personnage.

Il y a un mot qui semble aussi correspondre à cette histoire c’est le mot « brièveté ». On est surpris de voir qu’elle ne compte que deux tomes, chose rare dans l’édition de bandes dessinées aujourd’hui, et on est aussi surpris de voir ces albums sortir à des dates aussi rapprochées (10 mois d’écart).
Pour la longueur, il se trouve que Xavier a écrit l’histoire et qu’on s’est rendu compte, en terme de pagination, et ça prenait 2 albums, c’est aussi simple que ça. Pour les dates rapprochées, j’ai vraiment mis les gaz sur le deuxième pour réduire au maximum les délais de sortie. C’était un challenge intéressant. Ça a des contraintes, en termes de vie privée par exemple, mais en terme de dessin, c’est assez merveilleux parce qu’on est dans une dynamique forte ; ce qu’on a en tête on arrive à le dessiner assez rapidement, c’est une sensation très agréable.
Surtout que le tome 2, c’est une course poursuite, les chasseurs deviennent chassés, il y a aussi une urgence. Vous avez tout dessiné dans l’ordre chronologique ?
Oui, je procède toujours comme ça.
L’univers d’Asgard est-il définitivement clos ? Vous n’y retournerez plus, même si le succès est au rendez-vous ?
À priori… Réutiliser ce personnage, pourquoi pas ? Mais ce ne sera pas pour raconter quelque chose qui sera après mais peut-être pour raconter le moment où il quitte la hilde et le moment où il devient chasseur. Le prochain projet qu’on essaie de mettre en place avec Xavier, c’est plutôt un western. On est très excités avec ça ! (rires)
Surtout que la fin d’Asgard est ouverte, très ouverte même, on peut imaginer plein de choses donc ce serait peut-être dommage de faire une suite…
Tout à fait. Je trouve que – enfin, c’est mon avis, hein – je trouve qu’on a réussi une belle fin et ce serait bête de faire quelque chose derrière. Réussir une fin, c’est très très compliqué dans un récit et quand on en a une bonne, il faut la préserver !

Recherche graphique pour le futur western Meyer/Dorison

Ex-libris Asgard
1 commentaire
par MR.AKA
En tant que grand fan du neuvième art, je me réjouis d’une telle revue avec compte rendu et interview, bonne initiative. Par contre « avec le dessinateur d’une des meilleures BD parue en 2012-2013) », faut quand même pas exagérer, l’histoire est trop simple pour pas dire simpliste, j’ai été un peu déçu pour ma part. VIvement la suite…