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Critique : Survivor

Pour trouver un bon film récent dans la carrière de Pierce Brosnan, il faut remonter à The Ghost Writer de Roman Polanski sorti en 2010 (ou alors brièvement dans The World’s End d’Edgar Wright). Depuis, le comédien enchaine les projets étranges, à l’image du pas très bon November Man, ou de How to Make Love Like an Englishman qui échouera le 31 juillet directement en VOD, ce qui n’est jamais bon signe.

Le voici dans le rôle principal du nouveau film de James McTeigue (V pour Vendetta) qui, s’il a bénéficié d’une sortie salles outre-Manche où Arkaron a pu le voir, débarquera directement en DVD (aïe) le 2 juillet prochain sur le vieux continent.

 

LA CRITIQUE

Survivor – Sortie en DVD le 2 juillet
Réalisé par James McTeigue
Avec Milla Jovovich, Pierce Brosnan, Angela Bassett
Une américaine chargée du contrôle des visas à l’ambassade de Londres est accusée de trahison par son propre pays. En fuite, elle doit prouver son innocence et échapper à un tueur en série implacable…

Étrange carrière que celle de James McTeigue, qui après avoir officié en tant que premier assistant réalisateur sur de nombreux films, et notamment sur la trilogie Matrix, frappe un grand coup en réalisant un premier film qui fait beaucoup parler de lui : V pour Vendetta. Depuis, mis à part son travail honorable sur les segments de Mexico et Mumbai de la série Sense8, McTeigue n’a pas été capable de donner lieu à autre chose que des séries B tantôt oubliables (L’Ombre du mal), tantôt virant sur le navet (Ninja Assassin). Et force est de constater qu’avec Survivor, l’australien s’est dépassé, mettant en boîte une série Z d’une nullité affligeante en tous points.

Écrit par Philip Shelby, dont c’est le premier scénario, le film déroule une intrigue d’espionnage pachydermique, souffrant d’une introduction malhabile qui ne cesse d’enchaîner les faux départs. Après cette exposition assez rude, l’histoire embraye sur ce qui se résume à une course poursuite entre une responsable de la sécurité en ambassade et l’un des tueurs professionnels les plus recherchés au monde (également parmi les plus incompétents).

Affichant un retard d’une dizaine d’années sur le genre des techno-thrillers d’espionnage, Survivor enchaîne inlassablement les non-sens consternants pour faire ramper son intrigue sur quelques mètres de plus. Pour un réalisateur qui s’obstine à intégrer de nombreux plans de caméra de surveillance sur sa protagoniste, McTeigue prouve s’il en était encore besoin qu’il utilise des techniques narratives au petit bonheur la chance, ne développant jamais de justification diégétique à de tels choix. Pire, il se tire un missile dans le pied en mettant l’accent sur la surveillance technologique envahissante, pour finalement nous présenter une suite de péripéties qui auraient été évitées avec un peu de bon sens et surtout n’importe quel code narratif propre au techno-thriller.

Mais dans Survivor, les caméras de sécurité servent uniquement de décoration. Preuve en est, tout le scénario repose sur la séquence du coup monté, durant laquelle la protagoniste s’éloigne de son lieu de travail sous l’œil des caméras, tandis que son supérieur utilise ses identifiants pour effectuer des opérations illégales sur le système informatique. Tout cela pour dire : rassurez-vous, les ambassades américaines emploient des informaticiens tellement inaptes qu’ils sont incapables de comparer deux horodatages pour vérifier qui se trouvait ou non dans le bâtiment.

Face à de tels moments de bêtise crasse, difficile de garder son sérieux lorsque de nouvelles aberrations défilent à l’écran : l’héroïne, agent gouvernemental entraîné, garde sur elle un badge-traqueur pendant la moitié du film, les terroristes veulent tuer des centaines de millions de gens pour se faire du blé, un autre fabrique une bombe parce que sa femme est morte à cause des États-Unis (tous les new-yorkais sont à blâmer, c’est bien connu), et ce grand tueur à gage invincible campé par Pierce Brosnan se tourne la moustache invisible en s’auto-congratulant au lieu de faire son boulot.

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On se demande sincèrement ce que les acteurs viennent faire ici (et eux aussi visiblement), tant personne ne semble en avoir quoi que ce soit à faire de l’entreprise. Milla Jovovich est monolithique, Brosnan s’aventure dans le surjeu pantouflard, et toutes les autres têtes potentiellement reconnaissables disparaissent aussitôt. Il faut dire qu’il est bien difficile d’interpréter des personnages inexistants, car aucun d’entre eux n’a de personnalité réellement définie, ni par l’image ni par les mots. Ce sont tous des éléments-fonctions sans le moindre intérêt, servant un récit tout aussi insipide.

Formellement, McTeigue part dans tous les sens : entre l’introduction en Afghanistan qui aurait tout aussi bien pu être coupée, l’exposition au rythme catastrophique, les shakycams pendant les poursuites, et un final gériatrique, on sort du film halluciné que des producteurs puissent encore accepter de financer de telles inepties sans la moindre portée narrative ni artistique, et qui échouent à créer la moindre scène intéressante dans une industrie qui pourtant s’évertue à optimiser toujours plus la valeur de ses productions.

Encore hanté par le trauma du 11 septembre, qui pourtant est passé par beaucoup d’œuvres cathartiques puissantes, le dernier film de McTeigue se révèle très rapidement être une perte de temps absolue, une coquille vide tentant de s’emplir d’un sentiment national culturel américain déjà exploré ad nauseam au cinéma, et essayant vainement de singer ceux qui l’ont précédé. Survivor sortira directement en vidéo en France, et c’est tout à fait logique pour un film qui ne présente aucune qualité notable. James, c’est sympa d’être repassé, mais bon vent maintenant.

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