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Critique : L’Idéal

En 2007, Jan Kounen offrait son premier grand rôle dramatique à Jean Dujardin en portant à l’écran -avec l’aide de Nicolas & Bruno aux dialogues- le bouquin de Frédéric Beigbeder intitulé 99 Francs.

Neuf ans plus tard, l’écrivain est passé derrière la caméra pour en adapter la suite. Nouveau style, et nouvel acteur puisque c’est désormais l’humoriste Gaspard Proust qui s’y colle…

 

LA CRITIQUE

Presque une décennie plus tard, Octave Parango est de retour. Il est de retour sur le grand écran sous les nouveaux traits de Gaspard Proust dans L’Idéal. Tandis que Jean Dujardin dézinguais le monde de la pub devant la folle caméra de Jan Kounen, Proust se charge de celui de la mode et des cosmétiques, directement filmé par Frédéric Beigbeder lui-même. Car, petit rappel et pas des moindres, ce dernier est l’auteur des romans 99 francs et Au secours pardon (devenu ce L’Idéal au cinéma) qui s’inspiraient librement de sa propre vie.

C’était donc en toute logique que l’écrivain-réalisateur retrouve l’acteur principal de son premier long-métrage, L’Amour dure trois ans, sorti en 2011. Cette fois, c’est à la suite du dérapage médiatique du mannequin égérie de la plus grosse société de la mode que ce nouvel avatar d’Octave Parango a pour mission de trouver sa remplaçante, grâce à ses talents pour repérer les futures stars des podiums.

Bien sûr, le ton misanthrope habituel est toujours de mise. Les coulisses de la beauté est forcément bien moche à travers les yeux d’Octave Parango qui nous énumère à toute vitesse les codes qu’un corps parfait doit respecter, afin que celui de n’importe qui le prenne comme exemple inatteignable. Une source génératrice de frustration et, immanquablement, vectrice d’achats des produits de la marque qui nous impose cet idéal qui fait vendre. Dans cette grosse multinationale, Audrey Fleurot en petite forme, pas nécessairement à l’aise avec son rôle se voulant au départ guindé pour ensuite briser les règles en suivant le personnage d’Octave. La vraie bonne idée de casting de L’Idéal est clairement l’excessif personnage féminin au jeu pourtant très masculin de Jonathan Lambert en parodie transsexuelle d’Anna Wintour.

Néanmoins, si le propos est plus universel que celui de 99 francs, compte tenu de la situation encore inégale des femmes dans le monde vis-à-vis des hommes, le film semble moins percutant, moins corrosif que son aîné. La faute, peut-être, à sa mise en forme et son habillage. Bien que le long-métrage s’écarte volontairement du livre qu’il adapte, il se rapproche un peu trop de la mise en scène riche de propositions inédites et farfelues de Kounen. En 2016, le discours cynique en voix off de Gaspard Proust qui commente ses propres actions à l’écran fait redite et en moins bien. Fan du travail de Jan Kounen, Frédéric Beigbeder réalisateur aurait sans doute dû prendre également ses distances de 99 francs. Cela lui aurait permit à L’Idéal de trouver sa propre voix, plutôt que de finir dans son ombre. Car des passages ambitieux visuellement comme celui des montagnes russes se font trop rares et épisodiques dans un film qui veut faire mieux avec moins.

Pour une comédie, le long-métrage n’est vraiment drôle que par moments. Il égraine les poncifs machistes et féministes en enfonçant les portes ouvertes sous couvert de quelques effets de montage ou en surimpression à l’écran. Il faut dire que le personnage d’Octave Parango a changé à plus d’un titre. Le côté rentre-dedans de l’hipster sous coke de 99 francs s’est assagi. Celui qu’incarne désormais Gaspard Proust nous donne plus l’image d’un pur produit de la classe bobo. Plus solitaire et trop désabusé, Octave est moins intéressé et donc moins intéressant à suivre. Or, les personnages secondaires, eux aussi, moins réussis ne parviennent pas à combler ce manque. La fin moralisatrice, en forme de rédemption où Frédéric Beigbeder se donne le beau rôle, n’arrangera pas à la lourdeur de l’ensemble, donnant l’impression d’un manque de sincérité dans ce vœu pieux de révolutionner cette société (essentiellement occidentale) dominée par un patriarcat ancestral.

Balourd et facile, L’Idéal de Frédéric Beigbeder arrive bien en deçà du très efficace 99 francs de Jan Kounen.

L’Idéal, de Frédéric Beigbeder – En salles le 15 juin 2016

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