Skip to content Skip to sidebar Skip to footer

Critique : Drunk

Et si on parlait d’alcool ? Non, pas Happy Hour, un vrai film consacré au sujet de la consommation, et même si la situation sanitaire actuelle impose d’être raisonnable à ce sujet. Ca s’appelle Drunk (comme « ivre) et c’est porté par le toujours impeccable Mads Mikkelsen.

LA CRITIQUE

On l’a tous vécu, ce moment où on a osé faire quelque chose en étant un peu bourré : faire une déclaration d’amour, dire certaines choses qu’on n’osait pas dire (en le regrettant parfois) ou envoyer ce fameux sms à l’ex qu’il ne fallait pas recontacter. Selon le psychologue norvégien, Finn Skårderud, l’homme souffrirait d’un déficit d’alcool de 0,5g par litre de sang. En résumé : pour être dans son état normal il faudrait avoir toujours un (tout) petit coup dans le nez. 

Cette étude existe vraiment et c’est le point de départ de Drunk, de Thomas Vinterberg. « Druk » a un titre en version originale plus intéressant puisqu’il signifie « pression », pas la bière mais être sous la pression, comme les personnages le sont pendant l’entièreté du film. Drunk, donc, raconte l’histoire de quatre amis, quatre profs, la quarantaine, un peu has been. Leurs vies sont plutôt banales voire merdiques, leurs mariages (quand il y en a) battent de l’aile, les étudiants ne s’intéressent pas à leurs cours. Et puis la crise de la quarantaine débarque, la remise en question : un de la bande d’ami évoque cette étude et le personnage de Mads Mikkelsen décide le lendemain de la mettre en pratique. 

Forcément, on le sait puisqu’on est nombreux à être passé par là : un petit verre dans la limite du raisonnable, et on commence à se sentir invincible tout en restant conscient. Après tout, Winston Churchill était constamment ivre, tout comme Hemingway ou de nombreux autres personnalités qui ont marqué le monde. Ses amis voyant que ses élèves, jusqu’ici amorphes, applaudissent son cours, décident donc de tenter l’expérience à quatre, tout en écrivant une thèse par dessus, histoire de se donner une bonne excuse pour ne pas se la coller juste pour se la coller, mais pour « étudier » tout ça, avec la même règle qu’Ernest Hemingway : ne pas boire après 20h ni le week-end. Evidemment, l’exercice est libérateur et fonctionne, ils décident donc de pousser la consommation d’alcool plus loin, allant à plusieurs paliers jusqu’à celui du black-out. 

Quand le film commence, on se rappelle forcément nos beuveries. Souvent drôle, joyeux, on suit ces amis à qui tout réussit en se disant que non, le film sera difficilement une apologie de l’alcool, le cinéma de Vinterberg, qui a mis tout le monde mal à l’aise dans Festen autant qu’ébloui dans Far from the madding crowd est plus intelligent que ça.
Et comme une soirée bien arrosée, il y a ce point de non-retour. Vous savez, ce verre qu’on vous propose, que vous regardez en vous disant « j’avais dit que j’arrêtais là », et vous savez au fond de vous que s’il est consommé, ce ne sera que le premier d’une longue deuxième série et surtout que votre état, la soirée et le lendemain, seront beaucoup moins sympathiques. C’est logiquement et malheureusement ce qui arrivera à nos protagonistes dans une suite nettement moins 
sympathique.

De fait, Vinterberg va nous faire nous interroger sur notre propre consommation d’alcool, questionner bien sûr sur « tiens, quand même, un petit coup et tout leur réussi » tout en rappelant subtilement que l’alcoolisme est un sujet sérieux et qu’on n’est pas là pour s’amuser.  Les sourires vont vite s’effacer pour laisser place à un malaise ambiant, Vinterberg marchant alors sur la corde raide, amusant parfois le spectateur, le déstabilisant souvent. Le quatuor principal, s’il est très attachant, bascule vite dans des personnages de gros cons dû à l’alcool et prenant des décisions plus que borderlines.

Mais au-delà d’une histoire de beuverie, Drunk est avant tout un film sur les relations humaines. Le personnage de Mads Mikkelsen est dans un mariage qui prend l’eau et l’alcool lui fait ouvrir les yeux sur son comportement tout comme celui de sa femme. Les scènes de repas, à la maison, sont d’ailleurs certaines des plus prenantes et émouvantes tant elles peuvent être criantes de réalisme.

La caméra toujours bien placée, une réalisation souvent étouffante au service de l’histoire, et surtout un casting impeccable, Mads Mikkelsen en tête, voilà tout ce que Drunk a à offrir et bien plus encore. On aurait pu croire à la vue de la bande-annonce qu’on allait voir un film nous donnant d’aller boire des coups avec Mads Mikkelsen et ses potes, mais Drunk est bien plus que ça, plus qu’une réflexion sur la consommation d’alcool, c’est une véritable réflexion sur les relations humaines, amicales et amoureuses, sur le regard des autres, sur la confiance en soi (un des thèmes majeurs du film) sans jamais tomber dans la facilité.

Drunk, de Thomas Vinterberg – Sortie le 14 octobre 2020

Voir les commentairesFermer

Laisser un commentaire