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Critique : Vampire, de Shunji Iwai

CloneWeb était la semaine dernière au Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg, représenté par Jessica, qui a eu l’occasion de voir de nombreux films.

Nous avons décidé cette fois, plutôt que de vous livrer de nombreuses et courtes critiques au quotidien, de prendre le temps de revenir plus longuement que d’habitude sur quelques uns des longs métrages diffusés en avant-première.

On commence par Vampire, réalisé par le Japonais Shunji Iwai mais avec un casting américain.
Le film a été récompensé par la Mention Spéciale du Jury.

 

 

Vampire – Pas de date de sortie en France
Réalisé par Shunji Iwai
Avec Kevin Zegers, Amanda Plummer, Yû Aoi,
Simon est un jeune homme discret qui enseigne la biologie dans un lycée et n’hésite pas à aider ses élèves avec leurs problèmes personnels. Il s’occupe également de sa mère atteinte de la maladie d’Alzheimer. Mais d’un autre côté, Simon cherche à rencontrer par Internet des adolescentes souhaitant se suicider. Prétendant vouloir mourir lui-même, il organise des séances de suicides collectifs pour satisfaire son besoin obsessif de boire du sang

 

Comme chaque année à l’époque de la rentrée, pléthore de festivals viennent secouer les restes de torpeur estivale. A croire que le retour de la grisaille est propice aux ambiances fantastiques puisque se déroule chaque année depuis 4 ans, à la même période que l’Etrange Festival parisien, le Festival Européen du Film Fantastique de Strasbourg. De par toutes ces similitudes, il est bien évident que la programmation des films en compétition se redouble en bonne partie, et nombreux sont les films diffusés au FEFFS dont vous avez déjà pu lire les compte-rendus dans ces pages. Quelques exclusivités valent cependant le détour.

Le Vampirede Shunji Iwai compte au nombre de celles-ci. Le réalisateur japonais, dont la filmographie reste assez obscure pour le public français si l’on excepte le segment réalisé pour le film choral NEW YORK,I LOVE YOU en 2009, se lance dans une production américano-canadienne pour proposer sa version du mythe du vampire, une source d’inspiration décidément féconde ces derniers temps. Le film s’ouvre sur la rencontre de deux jeunes gens qui, visiblement, ignorent tout l’un de l’autre. Un trajet en voiture nous permet de comprendre que leur entrevue n’est que le prélude à un suicide en tête à tête. Mais l’on comprend tout aussi vite que Simon n’a aucune réelle intention de mourir. Et de fait, après avoir vidé la jeune fille de son sang, il abandonne son corps dans un congélateur. La plupart de son temps, Simon le consacre à son travail de professeur de biologie et à sa mère, atteinte de la maladie d’Alzheimer et pour laquelle il met au point d’ingénieux et étranges mécanismes afin de l’empêcher d’errer sans surveillance. Le reste de son temps, il devient le Vampire en question, surfant sur des sites de discussion en ligne à la recherche de jeunes filles qui veulent mourir et qu’il euthanasie soigneusement pour satisfaire son besoin compulsif de boire du sang humain.

Tout est d’ailleurs résumé dans le titre, lapidaire, du film : qui est donc ce Vampire ? Simon indéniablement. Et pourtant, aucun lien de parenté évident entre lui et l’aristocrate maudit de Bram Stoker, rien de commun non plus avec les créatures outrageusement raffinées d’Anne Rice, et encore moins avec le dernier avatar scintillant du vampire en date. Le Vampire c’est en fait le surnom que donne la presse à celui qu’elle décrit comme un froid tueur en série, qui ne laisse derrière que des cadavres exsangues. Mais la compassion dont Simon fait preuve à l’égard de ses victimes, le soin avec lequel il procède à son rituel clinique, l’éloignent encore de cette description.

Le film tout entier cherche à saisir l’identité de son protagoniste, à mettre en scène non pas tant sa soif de sang que sa soif de contrôle. Personnage évoluant entre deux mondes, celui des encore vivants _le policier et sa sœur_ et celui des presque déjà morts _sa mère, les jeunes filles_, enfermé dans sa solitude et son obsession. Il est en proie à un resserrement permanent, rendu particulièrement sensible par la réalisation, très esthétisante, du film. Tant par les décors, oscillant entre des intérieurs hermétiquement clos et des extérieurs incertains où se mêlent nature et urbanité, que par le traitement du son, avec un mixage qui choisit la mise en valeur de certains sons, ou de l’image, avec des cadrages atypiques et une profondeur de champ réduite due à l’utilisation du Canon EOS 5D, le réalisateur parvient à mettre au jour les doutes et la fragilité de son personnage et de tous ceux qu’il côtoie.

Au final, si le film, qui a les défauts de ses qualités, se perd parfois dans des dédales atmosphériques qui ralentissent considérablement la narration, il n’en demeure pas moins très beau à regarder mais aussi et surtout captivant pour la relecture qu’il propose du vampire, sorte de nouveau démiurge, puisque c’est bien la vie et la mort qu’il distribue à tour de rôle en donnant ou prenant le sang.

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