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Critique : Us

Jordan Peele revient avec un nouveau long métrage dans les salles mercredi 20 mars prochain.

Le réalisateur, qui avait surpris tout le monde avec Get Out, retourne au film horrifique avec Lupita Nyong’o, Winston Duke ou encore Elizabeth Moss dans les rôles principaux…

 

LA CRITIQUE

Personne ne l’attendait vraiment sur ce terrain-là et pourtant, Jordan Peele a fait forte impression en 2017 avec son premier long-métrage horrifique Get Out.
Un succès surprise qui l’a mis en odeur de sainteté à Hollywood, où il enchaîne les projets puisqu’il a participé à la création des séries The Last O.G. ou Weird City récemment, tout comme il s’est attaqué au retour de The Twilight Zone. Et si le calendrier du bonhomme n’était pas assez chargé, le voilà qui revient avec Us, deuxième film forcément très attendu au tournant…

Une famille américaine noire part en vacances et se retrouve un soir en prise avec quatre individus dans leur allée, pour une visite qui va vite dégénérer.

Home Invasion, bonsoir ! Jordan Peele pose son film un peu plus lentement que ça en réalité, et installe ses personnages et leur entourage avant de les plonger dans le cauchemar, mais il lui faut moins de 30 minutes pour rentrer dans le feu de l’action, et sa stratégie diverge alors de Get Out.
Là où son précédent film se posait en thriller paranoïaque qui partait en sucette progressivement, en grattant le vernis du paraître social et de l’hypocrisie raciale tout en crescendo, Us lâche les chiens très vite pour aller directement dans le vif du sujet.
Peele n’en oublie pas ses modèles, qu’il cite à tort et à travers en début de film notamment dans un prologue assez réussi dans une fête foraine qui va vite perdre son capital féérique, ou en évoquant le Jaws de Spielberg ou les Oiseaux d’Hitchcock au détour de quelques plans explicites comme pour rappeler qu’il n’oublie pas les maîtres.
Toujours est-il que lorsqu’il part dans la chasse à l’homme en terrain familial, tout le potentiel cérébral du film fout le camp bien plus vite que prévu.

Somme toute assez simple dans son déroulement, Us surprend par les formidables possibilités qu’il laisse entrevoir, et qui n’aboutissent pas. Le principe du film basé sur des doppelgängers était la promesse de jouer avec les nerfs des personnages perdus dans leur maison, éclatant totalement le cocon familial en brisant chaque repère et en poussant la paranoïa à son maximum, les parents et leurs enfants ne pouvant plus être sûrs de l’identité de la personne en face.
Sauf que non : toujours vêtues de leurs tenues rouges et opérant comme des freaks qui préfèrent effrayer leurs cibles qu’assouvir leur but initial, les menaces du film restent très identifiées tout du long, et jamais Peele ne semble vouloir jouer la carte du doute, du quiproquo malheureux ou de la rencontre hasardeuse. En découle un jeu du chat et de la souris basique qui amuse un temps mais lasse assez vite tant ses ressorts narratifs sont d’une banalité totale pour le genre, qui fournit au moins un film par an de cette trempe à tous les festivals de cinéma qui veulent bien l’accepter.

Alors oui, Peele a plus d’un tour dans son sac, et son histoire est un peu plus compliquée que prévu.
L’origine de la menace intrigue forcément, et peut alimenter la peur par sa proximité paradoxalement étrangère. Un voile obscur qui ne tiendra pas longtemps puisque Us finit par tout expliciter, donnant même dans de l’épilogue avec voix off qui ferait presque office de mode d’emploi, veillant à ne laisser aucune zone d’ombre sur ses antagonistes, ruinant au passage toute leur capacité d’évocation. Il était tout naturel d’attendre un fond politique à Us, mais ce dernier est confondant de simplicité et d’évidence, s’érigeant comme une parabole sur l’Amérique de Trump et les raisons de son avènement, auscultant les ténèbres d’un peuple qui se referme sur lui-même.

La démarche est louable, avec cette envie de faire une horreur sociale contemporaine en accord avec son époque, mais l’exécution passe pour de l’enfilage de perles en bonne et due forme, surtout que certaines péripéties tiennent sur des règles qui n’existent plus la scène d’après, voir même celle d’avant, pour un ensemble cousu de fils blancs et de facilités scénaristiques grossières.

Ça n’enlève rien à l’ambition formelle, avec une photographie soignée et l’envie d‘éviter les effets horrifiques de bas étage, et donc de prendre le genre très au sérieux, mais le résultat s’avère bourrin et passe trop souvent à côté de son formidable potentiel.

Us, de Jordan Peele – Sortie le 20 mars 2019

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