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Critique : Tueurs

Le cinéma belge se porte bien, merci. Et ce n’est pas Michaël R. Roskam ou Fabrice Du Welz qui diront le contraire, eux qui sont désormais courtisés outre-Atlantique.

Le petit nouveau s’appelle Jean-François Hensgens. Directeur de la photo sur Banlieue 13 Ultimatum, Le Serpent aux Mille Coupures ou la prochaine adaptation de Spirou et Fantasio, il signe avec Tueurs sa première réalisation et devient instantanément un réalisateur à suivre…

LA CRITIQUE

Belgique, années 1980. Un groupe de gangsters que la presse surnomme « les tueurs du Brabant » dévalisent des supermarchés et tuent sur leur passage. On leur attribue plus d’une quinzaine d’attaques, 28 morts, 22 blessés et l’équivalent de 150 000 euros volés. On ne sait toujours pas qui se cachent derrière ces meurtriers masqués, même si une identité a été dévoilée en octobre dernier, l’enquête suivant son cours. Toutes les théories ont été évoquées mais la plus probable serait que les coupables seraient liés à la police, la personne récemment identifiée ayant fait partie d’un groupe d’élite d’intervention de la gendarmerie.

Quelques semaines après cette révélation arrive sur les écrans Tueurs de François Troukens et Jean-François Hensgens qui s’empare du flou autour de cette histoire pour raconter sa propre version. Le film s’ouvre, après un court rappel des faits, sur la découverte d’un corps. Ce serait l’un des « tueurs fous », ce qui permet à l’enquête d’être relancée et à un ministre complice d’être mis sous les verrous. Puis on enchaine dans un parking. Une juge d’instruction suit les directives de l’un de ses indics pour le retrouver. Mais le mur en face d’elle explose. Des braqueurs sortent arme à la main. Ils s’enfuient, elle est assassinée. Que s’est-il réellement passé ?

Troukens et Hensgens vont nous raconter, en revenant en arrière, ce que faisaient ces braqueurs là et de quelle manière ils sont liés à la juge. On suit donc dans un premier temps la mise en place du braquage, notamment à travers une incroyable scène où un véhicule de transport de fond chute d’un pont, pour revenir à cette séquence de meurtre. Mais la mise en scène est suffisamment habile pour nous permettre de doutes. Les braqueurs ont-ils tirés ? Ou sont-ils les boucs émissaires de quelque chose de plus dense lié à l’affaire des « Tueurs du Brabant » ?

Donner le rôle principal, celui du chef des braqueurs, à Olivier Gourmet est une idée formidable tant le comédien habitué à des rôles moins musclés s’en donne à cœur joie, et sans avoir à cacher son accent belge. C’est en effet le point de vue de ce méchant accusé (peut-être) à tort que l’on va suivre. Et pour cause : François Troukens, co-réalisateur et scénariste, a lui-même un passé criminel. Ancien braqueur, arrêté puis relâché, il recommence à commettre des braquages en Belgique jusqu’au début des années 2000. L’homme a une vie complexe, entre écriture et vie criminelle, et maitrise forcément son sujet. Un peu comme Olivier Marchal en France mais de l’autre coté de la barrière.

La courte durée du film, il ne fait que 1h25, a un défaut : celui de bâcler certains personnages comme la jeune flic bruxelloise incarnée par Lubna Azabal qui aurait mérité plus d’épaisseur. C’est bien le seul. Le film est brutal, intense, rythmé surprenant, bien ficelé et sombre. Oui tout ça. En Belgique, les polars noirs sont plutôt l’apanage de la Flandre (et on pense à Michaël R. Roskam en particulier) mais Tueurs vient changer la donne.

Tout chauvinisme mis à part, Tueurs est une franche réussite portée par un duo de réalisateurs solides (Jean-François Hensgens, lui, a été directeur photo notamment sur Dikkenek et Le Serpent aux Mille Coupures) et des comédiens à fond. Et on ne peut s’empêcher de penser, une fois le générique défilant à l’écran, que la théorie avancée par François Troukens a quelque chose de vrai. Surtout maintenant que l’enquête belge a reprise. L’histoire nous dira s’il avait vu juste.

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