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Critique : Suzume

Après les formidables (mais néanmoins ressemblants) Your Name et Weathering with You, Makoto Shinkai revient au cinéma avec Suzume – すずめの戸締まり, Suzume no tojimari. Sélectionné officiellement à Berlin, montré en avant-première à Paris en présence du réalisateur, son nouveau long métrage a bousculé le box office japonais pour faire encore mieux en terme d’entrées que ses précédentes réalisations. Et pour cause : Suzume est un grand film.

Suzume est une jeune fille vivant avec sa tante dans l’Ouest du Japon. Stalkant un beau garçon, elle va découvrir que sa mission est de fermer des portes se trouvant dans des endroits en ruine pour empêcher le mal de frapper la région. Mais suite à un incident, l’homme se retrouve transformé en chaise (!) et seul un chat pourrait l’aider à retrouver son apparence. Suzume va alors traverser le pays en quête de l’animal, multipliant les rencontres et fermant elle-même les portes pour éviter que le Japon soit encore victime de tremblements de terre.

Une nouvelle fois, Makoto Shinkai mélange habilement le monde réel avec des éléments fantastiques, ici pour mieux mettre en avant l’histoire du Japon face aux séismes. L’héroïne est une orpheline parce que ses parents sont décédés dans la catastrophe de 2011. Son voyage l’emmènera vers l’Est du pays, lieu de la catastrophe. Un moyen pour elle, évidemment, d’affronter son passé et refermer ses blessures.

Comme il l’a expliqué lors d’un échange avec le public lors de l’avant-première parisienne, Makoto Shinkai a été profondément marqué par l’incident de Fukushima. « Le fond du film est une tragédie mais je voulait aussi faire un film joyeux, qui fasse rire le spectateur et qu’il soit porteur d’espoir.« 
Le résultat affronte donc frontalement la catastrophe. « Le sujet des catastrophes naturelles est important pour moi et on le retrouve dans tous mes films même si ce n’est pas le sujet de mes films. Je veux juste raconter le Japon contemporain, et le sujet vient vers moi. Douze ans se sont passés depuis le séisme, une durée courte pour les sinistrés et en même temps c’est très long pour oublier. J’ai une fille de douze ans, elle n’a pas connu ce drame. Je voulais donc faire un divertissement pour la nouvelle génération et ceux qui ont vécu l’incident.« 

Une histoire dure, donc, mais portée par des personnages drôles. L’héroine est, une nouvelle fois, très réussie. En bonus, elle est accompagnée par une chaise qui parle et se déplace, provocant de vrais moments d’hilarité. Le réalisateur l’explique : « l’histoire de Suzume étant triste, je voulais à ses cotés un personnage mignon. J’ai créé cette chaise à trois pieds, à la façon de marcher très particulière. L’absence d’un pied est un ressort comique mais c’est aussi une manière de montrer qu’on peut vivre normalement même avec quelque chose qui manque, comme l’héroïne peut vivre sans sa mère.« 

Le Japon est donc un personnage à part entière, jusque dans la réalisation. « Le film est en cinémascope, je rêvais d’utiliser ce format très cool. Pour montrer l’ampleur du voyage, les largeurs des îles et les paysages le cinémascope me paraissait la meilleure solution. » L’animation est une nouvelle fois sublime, Makoto Shinkai poussant les curseurs de la 2D un peu plus loin qu’auparavant (cette lumière !), toujours en réutilisant au détail près de véritables décors.

La somme de tout cela est un film aussi drôle qu’émouvant, qui jongle habilement entre la modernité et les traditions japonaises, évoquant avec style un évènement dramatique. On n’en mène pas large à la sortie de la salle. Alors nul doute que le film de Makoto Shinkai a touché le Japon en plein coeur.

Suzume, de Makoto Shinkai – Sortie en salles le 12 avril 2023

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