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Montré dans mille festivals depuis plus d’un an, disponible sur Disney+ dans certains pays, Nomadland arrive ce mercredi dans les salles. La filiale France du studio a fait le pari que le film devrait trouver ici son public. Sans doute à raison.
LA CRITIQUE
Tous les regards sont braqués sur Chloé Zhao. Un Lion d’Or à Venise, un Golden Globe et les Oscars de la Meilleure Réalisatrice et du Meilleur Film. Elle est la seconde femme à remporter la statuette après Kathryn Bigelow et la première de couleur. Et elle a signé pour un Marvel Studios, The Eternals. On vous le dit, tous les projecteurs sont braqués sur la cinéaste de 39 ans.
Son Nomadland raconte un pan de la vie d’un personnage incarné par l’éblouissante Frances McDormand, Fern (qui signifie Fougère, en français). L’usine qui fournissait des emplois à sa petite ville du Nevada a fermé et tout le monde est parti, au point que le code postal a été rayé des listings. Elle vit désormais dans un van aménagé et tente de survivre au gré des rencontres et des petits boulots.
Le film s’ouvre sur un panneau explicatif (et cette incroyable suppression d’un code postal, car la ville est devenue fantôme) et sur Fern, saisonnière chez Amazon. Les plans ultra soignés de Chloé Zhao montrent l’immensité du Nevada face à la petitesse de la vie dans le vanne mais aussi les innombrables difficultés du quotidien de l’héroïne. La galère, la pauvreté des cols bleus dans une partie de l’Amérique qui s’effondre. Il ne manque que la guitare d’un Dylan, d’un Springsteen ou d’un Woody Guthrie pour parfaire la tristesse d’un tel tableau.
Mais la tristesse et la compassion qu’on ressent -instantanément- pour le personnage sont compensées par la fraicheuse, la joie de vivre et l’optimisme qu’elle dégage malgré tout. Frances McDormand est incroyable dans le rôle et mérite tous les prix de la Terre. Le film va néanmoins prendre une tournure inattendue une fois le personnage introduit, puisque les nomades que va suivre Fern sont de vraies personnes que Chloé Zhao est allée filmer. Les équipes de tournage ont d’ailleurs dormi dans des vans aménagés comme Bob Wells et ses comparses. Nomadland prend alors des allures de documentaire à la Strip Tease (sans que ça soit péjoratif) pour nous montrer ce milieu de gens souvent pauvres mais toujours libres. L’adaptation du bouquin de Jessica Brudor nous fait découvrir un monde passionnant, où des gens trouvent une forme de liberté et d’évasion dans le nomadisme. On y croise des personnes en difficulté, certes, mais aussi d’autres en quête de solitude ou de reconnexion avec la nature. Ce qui frappe, c’est que malgré les problèmes et le manque d’argent, personne n’a vraiment l’air malheureux.
Nomadland reviendra à la fiction pure dans son dernier acte, n’oubliant pas que le film est d’abord la quête de son personnage pour se trouver une place dans ce nouveau monde. Un des personnages croisés sur la route compare les nomades dans leurs vans aux pionniers qui faisaient route vers l’Ouest. L’histoire de Fern n’est pas si différente, mais le monde a changé et il a besoin d’être redécouvert.
Très beau film, surprenant par bien des aspects, porté par une comédienne au sommet, Nomadland est la réussite attendue. Que fera ensuite Chloé Zhao ? Aura-t-elle les coudées franches pour réaliser une pure fiction super-héroïques ? Au vu de Nomadland, on espère qu’elle aura comme son héroïne, toute la liberté qu’il lui faut.
Nomadland, de Chloé Zhao – Sortie le 9 juin 2021