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Critique : Le Sens de la Fête
Ils sont partout : Jean-Pierre Bacri, Eric Toledano et Olivier Nakache multiplient les apparitions dans les médias et lors d’avant-premières. Et nous avons en tête le succès colossal d’Intouchables.
Le Sens de la Fête, qui réunit aussi Jean-Paul Rouve, Gilles Lellouche, Vincent Macaigne ou encore Eye Haidara, permettra-t-il aux deux auteurs de réitérer l’exploit ?
LA CRITIQUE
En 2011, Eric Toledano et Olivier Nakache bousculaient le cinéma français avec Intouchables. 19 millions d’entrées en France, juste derrière Les Chtis et le Titanic de James Cameron et un César pour Omar Sy. Le film, très réussi, fut une déferlante. Leur long-métrage suivant, Samba, qui se voulait fonctionner de la même manière, mêlant drame sociale et vraie comédie drôle portée par des comédiens engagés, ne récoltait « que » trois millions de spectateurs. Six ans après Intouchables, le duo remet le couvert -littéralement d’ailleurs- avec ce qui a tout pour être un incroyable carton.
Le Sens de la Fête suit Max, organisateur de mariages depuis trente ans, lors de l’organisation d’une soirée dans un petit château en banlieue parisienne. Un mariage chic, à gros budget mais finalement assez classique : un orchestre, un diner, quelques animations, des gens heureux qui viennent célébrer leur union avec leurs proches. Et une équipe chargée de la restauration et de l’intendance qui doit gérer toutes sortes de problèmes, de manière la plus transparente possible pour les époux, du serveur absent à des problèmes de cuisine de toute dernière minute.
Véritable film choral où vont se croiser une ribambelle de personnages (Gilles Lellouche en chanteur de variété ringard, Jean-Paul Rouve en photographe has-been à l’époque des smartphone ou la toujours éblouissante Hélène Vincent dans le rôle de la belle-mère), Le Sens de la Fête est avant tout un rôle en or massif pour Jean-Pierre Bacri. Toledano et Nakache, une nouvelle fois scénaristes de leur film, lui ont cousu un costume à la main. Le comédien, sur qui tout repose et qui est de pratiquement toutes les scènes, s’en donne à coeur joie dans le rôle du vieux râleur de service au grand coeur (quand même !) qui a été repris jusqu’à la caricature. L’acteur est aussi parfait que son personnage est intéressant, sorte de vieux bougon en fin de carrière qui hésite à rendre les clefs de sa boutique. Autour de lui, des comédiens bien dirigés et des personnages parfois bien stupides, qui rappellent que Max a ce point commun avec Arthur version Alexandre Astier de Kaamelott : malgré l’énervement, il est le seul capable de gérer une telle bande de débiles d’incapables.
Eric Toledano et Olivier Nakache avaient déjà montré dans Intouchables qu’ils avaient le sens de la mise en scène à travers quelques belles séquences dont l’intro du film. Ici, ils remettent le couvert : jolie photo donc une séquences éclairée à la bougie (merci David Chizallet), longues scènes dans des couleurs façon The West Wing qui lorgnent avec le plan-séquence millimétré. On est loin des comédies potaches filmées de jour et au trépied, sans aucun travail sur l’image, auxquelles le cinéma français nous a convié récemment.
Et puis le film est vraiment drôle. Oubliant tout l’aspect social des précédents longs métrages, les réalisateurs et scénaristes plongent dans la pure comédie, usant du comique de répétition, de l’effet de surprises, de seconds rôles parfois débilissimes pour créer des situations toutes aussi réussies les unes que les autres. Vous pourriez râler que le film ne se contente de raconter « que » les coulisses d’un mariage mais il le fait bien. Il le fait d’autant plus bien qu’on sait les Français friands de divertissement. On entend souvent qu’on va au cinéma pour rire et que c’est bien suffisant. C’est ici évidemment le cas, avec une petite nuance : on sent pointer dans ce pur moment de rire l’envie de faire un film post 13 novembre, un long métrage vraiment feel good qui file la banane, qui nous fait nous sortir du quotidien pendant un peu moins de deux heures.
Ernest Hemingway écrivait que « Paris est une fête », phrase reprise sous forme de slogan après les attentats qui ont touché la capitale française. Nous avons le Sens de la Fête, et le film va -justement- dans ce sens. Et par les temps qui courent on ne va pas s’en plaindre.
Le Sens de la Fête, d’Eric Toledano et Olivier Nakache – Sortie le 04 octobre 2017