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Pas facile d’adapter Le Petit Nicolas au cinéma. Laurent Tirard et son successeur s’y sont cassés les dents en pensant pouvoir en faire une simple comédie française. L’œuvre de Goscinny et Sempé méritait bien mieux, comme un film d’animation taillé pour donner vie aux dessins tout en gardant l’originalité des textes. Voici donc Le Petit Nicolas version 2022, sous-titré « Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ».
René Goscinny et Jean-Jacques Sempé ont écrit plus de deux cents histoires différentes mettant en scène Le Petit Nicolas et sa chouette bande de copains, sorties regroupées en différents romans. Tout le monde sait qui sont Eude, Alceste ou le Bouillon mais on sait moins comment est née cette oeuvre toujours aussi rafraichissante des décennies après sa création. Le film de Benjamin Massoudre et Amandine Fredon permet de répondre à cette question, en livrant une oeuvre presque hybride.
En effet, Le Petit Nicolas adapte à la fois les histoires courtes et bien connues tout en racontant la rencontre entre ses deux créateurs. Le film bascule d’un univers avec l’autre avec beaucoup d’aisance, grâce à une belle trouvaille : celle de faire du héros la conscience de ses auteurs. Un peu à la manière d’un Jiminy Cricket, Nicolas va donc apparaitre sur le bureau de ses créateurs pour mieux leur parler, leur poser des questions sur leur enfance et ensuite basculer dans son monde à lui. Ces différents niveaux de lectures, qui s’entrecroisent, sont vraiment réussis. On (re)découvre à travers quelques points de biographie qui étaient les deux génies bien connus et ce qu’ils ont traversé pour arriver à leur création. Le film est drôle, Goscinny oblige, mais aussi très émouvant quand il évoque la mort tragique de l’auteur en 1977. Mais il fait aussi beaucoup rigoler, tant le vocabulaire fleuri de René Goscinny n’a pas vieilli d’une minute.
Sempé adore Paris et a dessiné la ville sous toutes ses coutures. La voir s’animer en reprenant son trait est un ravissement. Les réalisateurs-ices ont fait un gros boulot pour reprendre les traits du dessinateur tout en les faisant s’animer. En plein cadre quand il s’agit des parties « biopic » et plus proche de ses illustrations, avec des couleurs qui disparaissent, quand il s’agit d’évoquer Le Petit Nicolas et ses aventures (les illustrations de Sempé pour les histoires étaient, pour la plupart, en noir et blanc). Et le tout est souligné avec beaucoup d’aisance par Laurent Lafitte (Sempé) et -évidemment- Alain Chabat, le Goscinny des années 2000, au doublage du génial auteur.
Après trois longs métrages « live » qui n’étaient ni fait ni à faire, Le Petit Nicolas retrouve ses lettres de noblesse avec la très chouette oeuvre de Benjamin Massoudre et Amandine Fredon. Nul doute que là où il y est, René Goscinny doit bien se marrer.
Le Petit Nicolas – Qu’est-ce qu’on attend pour être heureux ?, de Benjamin Massoudre et Amandine Fredon – Sortie en salles le 12 octobre 2022