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Critique : Le Grand Jeu

Après avoir mis un point final à l’incroyable The Newsroom et signé le scénario de Steve Jobs pour Danny Boyle, Aaron Sorkin a décidé de passer derrière une caméra.

Pour cela, il s’est entouré de Jessica Chastain, Idris Elba, Kevin Costner et Michael Cera mais aussi de la directrice de la photo danoise Charlotte Bruus Christensen et du très à la mode Daniel Pemberton (Tout l’Argent du Monde) à la bande originale…

 

LA CRITIQUE

Passer de scénariste à réalisateur, c’est une transition qui n’est pas toujours vouée au succès tant la maîtrise de l’écriture ne garantit pas celle de la caméra. Toujours est-il que quand le scénariste en question est considéré comme l’un des meilleurs en activité, l’intérêt est décuplé et pour cause : Aaron Sorkin a fait les beaux jours des séries TV The West Wing ou The Newsroom, mais surtout a-t-il écrit The Social Network. Et aussi Steve Jobs ou Moneyball, excusez du peu. Ayant travaillé avec des metteurs en scène comme Danny Boyle ou David Fincher ce qui est sûrement une bonne école, il y avait de fortes chances que le passage derrière la caméra de Sorkin ne soit pas anodin, surtout que le bougre porte une biographie sur grand écran qui n’attendait que ça…

Le Grand Jeu, c’est celui de Molly Bloom, une jeune femme talentueuse qui arrêta malgré elle la compétition sportive au niveau olympique suite à un accident terrible. Par un concours de circonstances et d’opportunités saisies à temps, la belle va construire un empire sur des soirées poker très luxueuses et risquées, dans lesquelles vont se croiser des stars hollywoodiennes.
Le destin en décidant autrement, les autorités vont finir par s’intéresser à sa petite affaire qui brassait des millions de dollars chaque semaine, ce qui permettra à la belle d’écrire un livre de son histoire, dont voici le film.

Que Le Grand Jeu sorte aujourd’hui tient à vrai dire presque de l’évidence compte tenu les grands thèmes qui parcourent le film : il est question d’une femme qui va se démener à la seule force de sa volonté pour se faire une place dans un monde majoritairement masculin, où la raison et la logique finissent toujours par voler en éclat tant l’appât du gain l’emporte sur toute considération morale et rationnelle. Si le script et sa structure rappellent les biopics sur des personnalités ayant construit un empire avant de voir sa chute comme sait si bien les faire Martin Scorsese par exemple, ce que la promo du film n’a pas manqué de signaler avec la comparaison au Loup de Wall Street, Sorkin tire son épingle du jeu justement dans la présence d’un premier rôle féminin pour mieux voir comment Molly Bloom a dû façonner son image, voir même la transformer, afin d’acquérir la crédibilité nécessaire pour survivre dans un tel milieu.

Le réalisateur/scénariste essaie d’ailleurs de donner du mieux que possible la mesure féminine de ce parcours, en montrant l’influence des hommes qui l’entourent, et comment cette héroïne tentait de garder une véritable humanité dans ces eaux troubles où le succès importe plus que tout le reste.
Comment réussir à rester intègre quand tout n’est que tentation et corruption, là est le grand mystère qui entoure le personnage principal, et ce qui le distingue des autres personnalités portées à l’écran par Sorkin. Car ce parcours n’est pas tant celui d’une business woman qui transforma l’essai, mais celui d’une femme qui se fit une place en tant que telle. Le film ne manque pas d’ailleurs de le signaler dans un final émotionnel un peu mal troussé, qui tombe à vrai dire comme un gros cheveu sur la soupe tant le film est une avalanche ininterrompue d’informations entre la voix-off du personnage très présente et les dialogues ciselés de Sorkin qui n’a rien perdu de son amour pour le très verbeux.

Du coup, le long métrage peine visuellement à transcender son sujet, et constitue une illustration certes très rythmée, à l’image de certains passages au montage dense, mais pour autant assez plate et assez ennuyeuse. Outre son scénario, le film repose avant tout sur les épaules de Jessica Chastain, qui nous ressert la partition de la femme forte et implacable qui cache tant bien que mal ses fêlures. Un rôle qui lui va comme un gant il est vrai, et qu’elle tient toujours admirablement, mais qui fait redite avec le récent Miss Sloane, et n’apportant donc aucune surprise la concernant.

Ce sentiment de déjà-vu pèse ainsi dire sur tout le film, malgré sa dimension féminine intéressante.
Sans doute trop redondant, notamment dans sa partie judiciaire très classique, Le Grand Jeu ne parvient jamais à dépasser le cadre ultra balisé du biopic avec la montée en puissance et la chute, et sa réalisation parfois hasardeuse (vous aimez les faux raccords ?), en tout cas académique, ne l’aide en aucun cas.

En ressort un film parfois inutilement assommant, sauvé par la nature de son personnage.

Le Grand Jeu, d’Aaron Sorkin – Sortie le 03 janvier 2018

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