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Critique : John Dies at the End
Nous sommes au Paris International Fantastic Film Festival, ou PIFFF, pour sa deuxième édition. Ou plutôt Jean-Victor y passe désormais ses nuits.
Le festival qui s’est ouvert vendredi se tiendra jusqu’à la fin de la semaine et proposera une programmation aussi éclectique que possible bien que coincé entre L’Etrange et Gerardmer.
Les festivités se sont donc ouvertes sur John Dies at the End, un film au pitch barré puisqu’on va suivre deux ados découvrant une réalité alternative peuplée de démons après avoir pris une drogue appelé Soy Sauce.
Tout un programme dont la fin est même dévoilée dans le titre !
Le PIFFF, 2ème édition, c’est parti ! Et pour commencer en beauté, le festival semble avoir retenu les leçons de l’année précédente, dont le programme rachitique niveau qualité fût balayé d’un revers de la main par la tornade Detention qui éclata tout sur son passage. Un film bien scharbos qui sauvait à lui seul les festivités, et l’occasion de remettre le couvert sur une note similaire en ouverture de ces désormais 10 jours de cinéma bizarre. Voilà donc que Don Coscarelli, réalisateur aimé des cinéphiles déviants pour sa saga Phantasm , revient 10 ans après Bubba Ho-Tep avec John Dies at the End, un film qui semblait parfaitement correspondre au profil de film d’ouverture léger et schtarbé. Mais entre la volonté de satisfaire son public et le résultat, il se passe beaucoup de choses…
John Dies at the End, titre rigolo qui semble être le plus gros spoiler jamais vu dans un nom de film, c’est l’histoire de David Wong, un jeune adulte dont la vie coulait tranquillement jusqu’au jour où son pote John, le fameux, lui fit découvrir par des circonstances folles les effets de la sauce soja. Oui oui, la sauce soja, celle que vous mettez dans vos sushis. Le film ne précise pas de manière détaillée si on parle bien de cette sauce en question, mais elle en a le même nom, et est utilisée comme drogue qu’on s’envoie rapidos dans les veines pour partir en pur trip LSD, et bien plus encore.
C’est-à-dire que la sauce donne à celui qui la consomme la capacité de percevoir les éléments de l’au-delà, et de prendre conscience des manifestations des dimensions parallèles dans notre monde. En clair, vous gagnez le super pouvoir d’interagir avec tout un tas de choses bizarres et perturbantes, ou de causer avec les esprits défunts. Etant donné que ces capacités ne sont pas offertes au premier venu, nos deux adultes cools dans leurs baskets vont se retrouver un peu par hasard à devoir sauver le monde de l’apocalypse face à une manifestation surpuissante venu d’ailleurs, le tout étant en réalité raconté par le héros lors d’une interview avec un journaliste campé par Paul Giamatti.

Tout ça vous semble bordélique ? C’est normal, ca l’est.
L’ordre et la logique ne semblent pas être de mises pour Don Coscarelli dans un film qui donne le temps d’entrée avec une succession de scènes sans queue ni tête. Entre David qui raconte son calvaire pour tuer un homme avec une hache qu’il doit sans cesse ramener au magasin pour la changer et une intervention de nos deux ghostbusters en herbe face à un démon fait de viandes surgelées, John Dies at the End affiche clairement son ambition d’être une série B ou Z foutraque dans lequel l’absurde et le burlesque se côtoient au dépriment du rationnel, pourvu qu’on se fende la poire. Et des bonnes idées, le film en cultive quelques-unes, avec un chien prouvant plus que jamais qu’il est le meilleur ami de l’homme ou une moustache aussi farceuse qu’une chauve-souris.
Ca devient plus problématique quand on voit l’utilisation de ces inventions loufoques, qui permettent souvent d’alimenter une durée trop longue avant le prochain arrivage. Par exemple, le héros se retrouve soudainement à devoir téléphoner avec un hot dog. Ne cherchez pas à comprendre. L’idée est plutôt rigolote vu que le bonhomme a l’air malin avec son bout de pain et sa saucisse à l’oreille, sauf que la blague, dont le réalisateur semble particulièrement fier, va alors durer bien 5 minutes dans le film, sans que rien hormis du traitement narratif basique n’arrive. On pourra se contenter de ça ou pas, mais c’est la parfaite illustration du rythme du film, constamment en dents de scie. Là où un Detention était une avalanche ininterrompue de trouvailles visuelles et de clins d’œil à ne plus savoir quoi en faire, à tel point que le film mérite d’être revu pour tout déceler, John Dies at the End se repose sur chacune de ces idées au bout de 20 minutes de film, quand celles-ci décollent vraiment.
Pour donner une vague idée de l’expérience, c’est un petit peu comme si vous étiez sous une influence psychotrope assez forte juste un instant avant une longue rechute, au bout de laquelle on vous demande de repartir illico pour la même formule. Autant dire qu’au bout d’un moment, l’enthousiasme s’est quelque peu éteint, et l’on fini malheureusement par attendre que le tout se termine rapidement pour passer à autre chose tant le film n’arrive jamais à maintenir l’intérêt continuellement. Les petits plaisirs éparpillées qu’il contient sont sympathiques certes, mais elles sont vite noyées, et la tenue visuelle un peu cheapos sur les bords n’aide en rien. Pourtant, le tout transpire l’envie de bien faire du réalisateur qui se fait plaisir lors de quelques fulgurances pour mieux ronronner bassement dans d’autres, et finalement, son dernier bébé aurait gagné à être plus concis, plus nerveux et moins éparpillé.

John Dies at the End, c’est un petit peu comme une blague qui a l’air extrêmement drôle mais qui n’en finit pas : au bout d’un moment on perd le fil et la chute tombe à l’eau. Le dernier né de Don Coscarelli déborde d’amour pour le genre et affiche une sincérité intacte, mais le film se perd dans sa volonté de trop en faire, et dilue chacune de ses idées dans une recette trop molle et hétérogène pour que la sauce prenne. Le genre de film qu’on aurait aimé adorer alors que malheureusement non.
John Dies at the End – Pas de date de sortie en France
Réalisé par Don Coscarelli
Avec Chase Williamson, Rob Mayes, Paul Giamatti
John et Dave, deux jeunes losers attachants, vont tester le pouvoir d’une drogue surpuissante, la Soy Sauce », et découvrir une réalité alternative peuplée de démons…