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Critique : Detroit

Accompagnée de Will Poulter, Kathryn Bigelow était de passage à Paris il y a quelques jours pour présenter Detroit en avant-première.

La réalisatrice de Point Break revient derrière la caméra cinq ans après Zero Dark Thirty et huit ans après son Oscar pour Demineur cette fois avec John Boyega (Les Derniers Jedi), Jacob Latimore (Le Labyrinthe) ou encore Hannah Murray (Game of Thrones)…

 

LA CRITIQUE

Nous sommes le 23 juillet 1967 à Detroit, Michigan. La police américaine débarque dans un bar clandestin, symbole de la population noire de la ville. Les habitants ne tardent pas à réagir et à se retourner contre les forces de l’ordre. Nous sommes quatre ans après la Marche de Martin Luther King sur Washington et le fameux discours « I have a dream » et rien n’a changé. La population noire américaine est toujours victime de racisme au quotidien, parfois de la part de la police.

Le film de Kathryn Bigelow s’ouvre sur cette descente de police et les émeutes qui ont suivi. La réalisatrice promène une caméra portée parfaitement maitrisée pour donner un aspect presque documentaire à ces évènements, 50 ans après qu’ils se soient vraiment déroulés sur le sol américain. Et petit à petit, elle va recentrer son récit sur un lieu en particulier, l’Algiers Motel dans lequel a notamment trouvé refuge deux des membres du groupe de musique The Dramatics. De l’autre coté de la rue, Melvin Dismukes (John Boyega) a pour consigne d’assurer la sécurité d’un magasin. Tout va déraper quand un client du motel va tirer à blanc. Les forces de l’ordre vont alors riposter à balles réelles puis prendre d’assaut le lieu.

A leur tête, le profondément raciste Philip Krauss, personnage fictif né de la conjugaison de plusieurs vrais protagonistes. Ce monstre va interroger, maltraiter, tabasser voir tuer les clients de l’annexe de l’hotel. Les prenant à tour de rôle dans des pièces séparées, il veut le faire avouer qui est l’auteur des tirs et à qui appartient l’arme, accompagné par deux complices. Bigelow ne mâche pas sa mise en scène. Les images sont aussi brutales que la réalité. La force des coups, la pression morale et la monstruosité du personnage brillamment incarné par Will Poulter ne peuvent laisser indifférent. Il y a un tel réalisme dans ce qu’on voit à l’écran qu’on affronte viscéralement avec eux l’épreuve.

Poulter est très bon dans le rôle, tout comme Algee Smith et Jacob Latimore, mais il faut surtout souligner la performance de John Boyega, qui n’a que très peu de lignes et fait passer les pensées de son personnage uniquement dans sa gestuelle. Melvin Dismukes est un agent de sécurité noir qui se retrouve du mauvais coté de la barrière. Et on sent dans chaque geste, dans chaque respiration et mimique du comédien que son personnage aurait aimé faire quelque chose, intervenir, sauver les autres afro-américains qui se font tabasser. Mais son uniforme et la complexité de la situation de son point de vue vont l’empêcher de bouger.

Les évènements ont « fêté » leur cinquantième anniversaire en 2017. Cinquante ans et une situation qui a bien du mal à bouger. On ne peut s’empêcher de penser à ce qui s’est récemment passé à Charlottesville, ou aux réactions du Président Américain actuel quand il s’agit d’une population noire. De fait, le film de Kathryn Bigelow est un coup de poing. Un de plus pour faire bouger les consciences, pour nous faire nous rendre compte que l’Amérique d’aujourd’hui ressemble malheureusement trop encore à celle d’hier.

Detroit est un film fort, puissant, porté par une réalisatrice qui donne tout pour nous faire vivre les évènements tragiques de la ville de la manière la plus immersive possible. Aussi dur qu’important.

Detroit, de Kathryn Bigelow – Sortie le 11 octobre 2017

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