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Critique : Cartel

Cormac McCarthy écrivant pour Ridley Scott. Voilà un duo qui fait rêver.

Il faut ajouter à ces deux noms une brochettes d’acteurs tout aussi excitante : Michael Fassbender, Penelope Cruz, Javier Bardem, Cameron Diaz, Brad Pitt ou encore Bruno Ganz. Une affiche qui a tout pour faire des étincelles, d’autant que les premières images faisaient plutôt plaisir.

Mais aligner tout ces noms est-il suffisant ?

 

Peut-on avoir une carrière aussi inégale que celle de Ridley Scott ?
Capable du meilleur comme du pire, l’homme qui a traumatisé des générations très tôt dans sa carrière, en enchaînant coup sur coup Alien et Blade Runner, a acquis la réputation de cinéaste flexible, pouvant aussi bien livrer un péplum monumental (Kingdom of Heaven en director’s cut bien sûr) qu’un petit film déjà oublié de tous (Une Grande Année) ou encore un film de gangster aussi sympathique qu’ultra classique (American Gangster), le tout en même pas 3 ans !
Depuis, on a subi de plein fouet l’hécatombe Prometheus et il ne fallait pas moins que le premier scénario de Cormac McCarthy, auteur de No Country for Old Men ou La Route, pour donner à Cartel des airs de retour sur le droit chemin pour un réalisateur qui reste avant tout un excellent technicien nécessitant de bons scénarios pour avancer.

Cartel, ou The Counselor, possède en plus quelques similitudes avec No Country for Old Men, les deux histoires partageant le même goût pour les descentes aux enfers que rien n’arrête et les climats arides. La victime s’appelle Michael Fassbender, dont le personnage d’avocat va mettre le doigt dans l’engrenage sans pouvoir faire marcher arrière. Même si le visionnage du film vous apportera un peu plus d’informations sur l’engrenage en question et l’affaire de trafic de drogues autour, vous n’en saurez pas plus qu’en lisant ses lignes sur le degré d’implication du héros sans nom joué par l’acteur irlandais, qui se fait appelé « The Counselor » durant tout le film.
C’est un parti pris qui résume assez bien la construction du scénario qui se veut la plus dépouillée possible, et également la moins narrative qui soit. La majeur partie de Cartel s’avère être une succession de dialogues tournant autour du pot, dans lesquels on parle de tout mais surtout de rien, avec une succession de proverbes et de déclarations semi philosophiques dont la profondeur est égale à celle des personnages, tous réduits à des archétypes. Il suffit de voir la caractérisation du rôle de Cameron Diaz, jouant une femme cougar dans tous les sens du terme, pour comprendre l’enclume avec laquelle a été écrite Cartel, qui se refuse tellement à donner le moindre élément narratif qu’il tourne rapidement à vide quand bien même sa structure est tristement linéaire.
Peut-être dans une volonté de réalisme absolu, le film veut échapper aux dialogues expliquant simplement l’intrigue et fait donc la part belle aux sous-entendus et autres.
Reste que non seulement les acteurs ne semblent pas y croire, mais surtout ses élocutions verbeuses à outrance n’ont pas l’air naturelles une seule seconde et tombent vite dans une suite de poncifs pseudo philosophiques. Vous vous souvenez de la pub Dior où Brad Pitt récitait un charabia incompréhensible en face caméra noir et blanc ? Les dialogues de Cartel sont du même tonneau…

Avec un scénario aussi handicapant, difficile de faire des étincelles si l’on veut le respecter à la lettre. Autant dire que Ridley Scott ne s’est pas foulé sur ce coup-là, tant son petit dernier aurait pu être réalisé par n’importe qui. Sans aucun style, Cartel est une succession de champ/contre-champs tous plus rigides les uns que les autres, qui n’essaient jamais de faire autre chose que de l’illustration pure et simple de l’action en cours, à savoir des dialogues la plupart du temps. Excepté quelques scènes montrant l’organisation des cartels de drogue ou des passages clés de l’intrigue, la plupart du film est constitué de plans fixes sur des acteurs en train de causer lourdement. C’est statique au possible, ça ne bouge pas d’un poil, ça n’essai jamais de transcender le texte pour faire sens par le cadre ou le montage et au final, le dispositif basique de chez basique que l’on nous sert peut très bien se regarder les yeux fermés tant l’image importe peu. C’est d’autant plus triste que le film est en hommage à Tony Scott, le frère défunt dont la mise en scène acérée et expérimentale sur ses derniers films n’avait pas grand-chose à voir avec une œuvre aussi roublarde. Mais sous ses airs de thriller chaud comme la braise et noir comme la nuit, Cartel s’avère finalement très peu cinégénique comme en témoigne le cabotinage du casting et la prévisibilité extrême de l’ensemble.

La rencontre entre l’écriture au cordeau de Cormac McCarthy et la rigueur technique de Ridley Scott étaient censées faire des étincelles, mais le résultat fait peine à voir tant c’est la débandade la plus totale. Entre des acteurs 4 étoiles qui semblent jouer leurs propres rôles à l’exception de Cameron Diaz & Javier Bardem en totales roues libres et une intrigue massue qui martèle le spectateur de questionnements aussi vains que ridicules, Cartel échoue sur toute la ligne et s’avère être un long tunnel verbeux. A trop vouloir tourner autour du pot, on finit par l’oublier.

 

Cartel – Sortie le 13 novembre 2013
Réalisé par Ridley Scott
Avec Michael Fassbender, Penélope Cruz, Cameron Diaz
La descente aux enfers d’un avocat pénal, attiré par l’excitation, le danger et l’argent facile du trafic de drogues à la frontière américano-mexicaine. Il découvre qu’une décision trop vite prise peut le faire plonger dans une spirale infernale, aux conséquences fatales.

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