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Critique : Arès

Une tentative de film de science fiction français ? Voilà qui a toute notre attention.

Après avoir été montré au Marché du Film à Cannes, Arès réalisé par Jean-Patrick Benes avec notamment Ola Rapace, vu dans Skyfall, montrera son Paris dévasté dans les salles de cinéma le 23 novembre prochain. Mais avant cela, il bénéficiera d’une projection en avant-première dès ce vendredi au Comic Con de Paris. Et ce, en présence de l’équipe du film.

 

LA CRITIQUE

La science-fiction en France, c’est une histoire qui date depuis le tout début du cinéma, George Méliès pouvant être considéré comme le pionnier dans le domaine. Sauf qu’un siècle et quelques mouvements artistiques plus tard, le genre s’accroche comme il peut dans un système qui n’en veut pas. Il y a bien ça et là des tentatives, de Renaissance à Dante 01, mais rien qui n’ait réussi à faire sa place en attirant un public conséquent. Dans ce contexte fragile, la sortie d’Arès tient de l’énième anomalie à la gestation délicate que l’on a immédiatement envie de supporter, sans pour autant fermer les yeux sur les défauts éventuels du résultat…

L’univers mis en place dans Arès clame sa volonté de réalisme afin d’avoir le plus gros écho possible avec notre quotidien. Dès son exposition, il est clair que le film de Jean-Patrick Benes est pensé comme une allégorie politique avec une France qui a sombré, aux 15 millions de chômeurs, où les tentes de pauvres jonchent les rues des villes tandis que le corps humain est désormais considéré comme une marchandise. Paris est plus sombre que jamais, avec un climat ultra tendu où les manifestations s’enchaînent tandis que la police ne retient plus ses coups, et l’un des derniers centres d’intérêts communs réside dans un championnat de combat libre où les adversaires affichent fièrement le dopage offert par leurs sponsors. La victoire d’un combattant est la promesse de belles recettes pour la compagnie pharmaceutique derrière, et c’est dans ce contexte peu reluisant que le personnage principal va remonter sur le ring pour récolter des fonds afin de sortir sa sœur des mains de la justice.

Dès son pitch, Arès montre les deux composantes sur lesquelles il va reposer et il faut bien dire qu’elles ne sont pas dosées à égalité. La partie SF est une toile de fond, qui sait se faire évocatrice par les plans quasi-apocalyptiques qu’elle montre de Paris et ses quelques idées d’univers, notamment des écrans géants qui ont recouvert bien des murs de la capitale, allant jusqu’à briser la silhouette emblématique de la tour Eiffel. Petite production oblige, cette esthétique du futur n’a pas bénéficié d’un budget suffisant pour prendre toute son ampleur et on sent le système D opéré par les équipes de la direction artistique, qui mélangent des objets un peu rétro à d’autres futuristes pour donner une identité visuelle particulière à l’ensemble. Le résultat oscille entre le convaincant et le plus cheap, surtout dans les scènes posées dans un cadre social précaire. Heureusement, Jean-Patrick Benes a choisi une photo laissant la part belle aux ombres et à une lumière assez sculpturale, qui permet de masquer les détails malheureux et de donner plus de chair à ses personnages.

Et de chair, il va en être question tant le centre du film concerne avant tout la partie combat, avec la montée de puissance du héros dans un tournoi d’une violence extrême. Reposant sur des joutes à mains nues où tout est permis, le film n’y va pas avec le dos de la cuillère pour se faire extrêmement brut, crasseux et sanguinolent. Si la mise en scène ne démérite pas en offrant des luttes assez lisibles et percutantes, elle ne lésine pas sur un sound design assourdissant qui fait ressortir chaque coup plein pot histoire de faire ressentir chaque coup au spectateur. L’effet est sans doute trop chargé et devient presque agaçant au fur et à mesure du film, et surtout risque-t-il de faire fuir bien des spectateurs tant la violence abondante dans laquelle donne le film risque d’en dégouter plus d’un.

Surtout qu’elle se reflète sur le scénario dont elle occupe une majeure partie, sans parler du fait que la plupart des personnages ont un langage fleuri qui certes témoigne de leur désespoir et de leur situation, mais sonne un peu trop forcé dans l’envie de livrer une œuvre bad ass.
Non pas qu’Arès ne vise pas l’émotion, les deux nièces du héros et surtout l’adolescente étant là pour incarner l’espoir de cette histoire et le point de vue innocent qui va permettre à leur entourage de se révéler et de s’améliorer.

Seulement il est difficile de ne pas sentir une certaine complaisance dans la violence, les créateurs du film n’étant sûrement pas les derniers à apprécier un combat brutal et un monde sans concession y compris pour le public. D’un côté, ça affirme l’identité de l’œuvre et ses choix assumés, de l’autre, ça la coupe d’une majeure partie du public, pour une sortie en salles qui sera sûrement accueillit une fois de plus timidement.

Mélange curieux entre un film de free fight à la Scorpion et une science-fiction d’anticipation à la Renaissance, Arès a tendance à trop se reposer sur sa composante martiale pour montrer le moins possible les limitations de son budget. Incarné avec une envie indéniable, le résultat parvient à tenir la route, fait preuve d’un certain courage et a le mérite d’assumer ses choix, malgré un aspect un peu fauché. On imagine sans mal que ça aura beaucoup de mal à fédérer mais espérons que le film trouve sa place, peut être sur le marché international…

Arès, de Jean-Patrick Benes – En salles le 23 novembre 2016

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