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Fearful Symmetry : Brüno

Notre rubrique régulière consacrée à la bande dessinée, Fearful Symmetry (titre en hommage à Watchmen, bien entendu) a l’avantage d’être écrite à quatre mains, ce qui peut donner plusieurs formules.

Il est donc possible que Basile et Guillaume échangent autour d’un album, que l’un présente quelque chose à l’autre, que l’un et l’autre fassent des choses dans leur coin mais aussi qu’ils s’attardent non pas sur une BD en particulier mais sur un auteur et ses publications.

Ce 10e tome de Fearful Symmetry à un auteur : Brüno. Et nul doute qu’ensuite vous irez faire un tour chez votre libraire pour lire au moins une histoire de sous-marin.

 

 

Guillaume
Chers amis clonewebiens, bonjour et bienvenue à nouveau dans cette magnifique chronique dédiée au 9e art.
Aujourd’hui nous innovons encore (oui, ça n’arrête pas sur ce site de guedin) et nous vous proposons de nous attarder non pas sur un album mais carrément sur un auteur tout entier, j’ai nommé le sieur Brüno.
Pas encore très connu du grand public, il l’est cependant de la critique et commence à se constituer une solide base de fans. Nous-mêmes, sommes en train de découvrir petit à petit l’oeuvre de cet artiste (il ne s’agira donc pas d’une liste exhaustive de tout ce qu’il a fait) et nous souhaitions vous faire part de nos bonnes surprises de lecteurs et attirer votre attention sur la qualité de ses productions.

Dis nous donc cher Basile, comment as-tu fait connaissance avec le monsieur ?

Basile
Comme souvent, avec un sous-marin… En l’occurrence, celui qui faisait la couverture du tome 2 de l’excellente série Commando Colonial.
Mais avant de pouvoir lire cette histoire de submersible, il m’a fallu commencer par le premier tome (logique, hein). Et grand bien m’en a fait car même sans sous-marin, Commando Colonial est une excellente série, du haut de ses trois tomes. À partir de là, mon amour pour le trait de Brüno était scellé.

Et toi mon cher ? Le premier Brüno ?

Guillaume
Ouh làà, ça remonte à… 2003. Avec le premier tome de Inner city blues. Comme toi la couverture m’avait marqué, mais ici point de sous-marin, seulement deux bandits afro américains, flingue à la main, chapeau mou sur la tête et patte d’eph au pied, entourés par de grosses bagnoles, des filles dénudées et des explosions : pas de doute, on était en pleine blacksploitation.

Il faut dire que Brüno, même s’il travaille souvent avec un scénariste, aime visiter des genres (certains diront des « sous-genres ») bien balisés et c’est par son trait si caractéristique que tu évoquais que ses albums prennent toute leur saveur (m’enfin, les scénars sont aussi béton, il sait s’entourer le bougre !).

Comment décrire ce trait d’ailleurs ? Moi, la première fois que je l’ai vu, ça m’a fait pensé à du graffiti, de la peinture urbaine. Et toi ?

Basile
Bonne question ! Je me suis trituré le cerveau à la lecture de Commando Colonial pour essayer de mettre une étiquette sur ce trait. Cartoon ? Néo-ligne claire molle ? Eh bien faisons fi de toutes ces appellations un peu ridicules, je crois que Brüno dessine tout « simplement » en ligne claire : le trait est épuré au maximum pour fluidifier la narration. On ne bute jamais sur une case ou un détail, tout s’enchaîne avec bonheur. C’est ce qu’on appelle un dessinateur de BD, un vrai. Et derrière la rondeur de ces bonhommes, décors et véhicules, on trouve de l’action parfaitement orchestrée, violente et explosive, pour mon plus grand bonheur. Dans Commando Colonial, on est véritablement happé à chaque embuscade, escarmouche, fusillade ou course poursuite.

Tu parlais de scénario, c’est vrai qu’il sait s’entourer mais il lui arrive de bosser seul également ! Est-ce que tu as une préférence pour un de ses collaborateurs en particulier ?

Guillaume
Alors j’avoue que je ne connais pas Appollo (mais tu vas peut être nous présenter l’intrigue de Commando colonial ?), j’aime bien Brrémaud avec qui il a fait Inner City Blues (enfin, il est vraiment très éclectique comme scénariste, disons que j’aimais bien le Brrémaud des débuts…), je n’ai pas lu Junk, le western que Brüno a fait avec Nicolas Pothier mais ce dernier est aussi l’auteur de l’excellente série Ratafia, donc ça laisse présager du bon, MAIS, mon chouchou, mon album préféré parmi la production brünesque, est celui qu’il a co-réalisé avec Pascal Jousselin : Les aventures de Michel Swing ! (paru chez Treize étrange)

J’explique le principe du bidule : au départ, tout a commencé sur internet, comme un cadavre exquis, les deux auteurs devaient dessiner à tour de rôle, une planche de la même histoire, sans scénario écrit à l’avance. Autant te dire qu’ils ne se gênaient pas pour finir sur des cliffhangers de dingue pour bien embêter le suivant. Et puis au bout de quelques semaines, ils ont complexifié le truc en tirant au sort avec un dé le nombre de cases à dessiner… Un vrai truc de malade, donc, mais plein d’énergie et de potacherie et au final, ma foi, l’histoire tient la route et on se marre vraiment (et en plus, ya un jeu de plateau à détacher dans le livre !).

Mais je crois qu’en plus de la série écrite avec Appollo, toi, tu as lu une histoire que Brüno a réalisée tout seul, enfin, presque, puisque c’est la réécriture d’un classique de la littérature… Qu’en as-tu pensé ?

Basile
Pour Commando Colonial, je dois dire que la collaboration avec Appollo est absolument parfaite. C’est une série B de qualité où l’on suit les pérégrinations de deux agents français du 2e Bureau durant la Seconde guerre mondiale. Mais au lieu d’agir dans des théâtres d’opérations classiques usés jusqu’à la corde dans toutes les histoires sur cette période, nos deux héros font dans l’exotique et s’occupent des… colonies françaises ! D’où le titre, eh oui. Le premier tome se passe par exemple à Madagascar.

Et comme je l’ai dit, les scènes d’action sont à la hauteur mais les dialogues ne sont pas en reste non plus ! On s’attache très vite aux personnages de Maurice et du Major Rivière, fait assez rare dans les productions « action » de ces dernières années.
Quant à Junk, c’est un cadre un peu plus classique : une ancienne bande de desperados se réunit après de longues années à l’initiative de leur chef qui veut démasquer le traître. Je n’ai lu que le premier mais c’est de la très bonne came là encore.

Enfin comme tu l’as dit, Brüno a fait cavalier seul sur Nemo, sa reprise de 20 000 lieues sous les mers. Ici on passe à une esthétique davantage années 30 / totalitaire (Nemo est souvent représenté dans des cases rouges, noires et blanches et arbore un uniforme assez nazi). Si le début est très fidèle au bouquin de Verne, vers le milieu ça s’éloigne assez radicalement de l’histoire originelle. Brüno s’approprie complètement l’univers et le personnage nihiliste de Nemo pour conclure sur une fin résolument noire. C’est graphiquement sublime, que ce soit dans les ambiances claustrophobes du sous-marin, lors des affrontements avec les navires de guerre de la marine ou à travers les paysages sub-aquatiques. Entre Commando Colonial et Nemo mon coeur balance. Je conseillerais plutôt de commencer avec le premier (vu que chaque tome est autoconclusif) pour ensuite découvrir avec bonheur le second. À noter que Nemo est sorti en 4 tomes couleurs puis en intégrale noir et blanc. Je préfère la couleur personnellement.

Guillaume
Puisque tu parles de couleur, j’enchaîne avec le résumé de Inner city blues (oui, souvenez-vous du 3e paragraphe) : au coeur des années 70, on suit le parcours de différents mafieux new yorkais autour d’un deal de drogue assez important.
Il y a trois albums pour trois niveaux de lecture : les hommes de main, le lieutenant, le chef. Les trois récits se croisent et s’entrecroisent pour au final n’en former qu’un.

Il y a de nombreuses références à la culture (black) de cette période-là et le scénario assez simple gagne en épaisseur par cette multiplication des points de vue et le découpage de Brüno qui alterne scènes d’action/scènes bavardes/scènes silencieuses avec fluidité (et on sent bien qu’il se fait plaisir à dessiner de grosses berlines américaines, des paysages urbains ou des go-go danseuses lascives).
Un très bel hommage à la blacksploitation, je le répète.

En conclusion, très cher ?

Basile
Et bien je dirais que les amateurs d’action, d’ambiance et d’aventure feraient bien de s’intéresser à Brüno. Et ceux qui seraient un peu arrêtés par la rondeur faussement bonhomme de son trait doivent laisser leurs préjugés au vestiaire, car sa ligne sert ses histoires à merveille. Pas besoin de faire du réaliste pour impliquer le lecteur. J’insiste encore mais Commando Colonial est l’une des meilleures bd d’action de ces dernières années. En conclusion, je dirais que Brüno est un type qui sait dessiner ET qui sait s’entourer (car combien de fois on rage devant ces dessinateurs dont le talent est gâché dans de piètres scénarios immédiatement oubliables ?).

Michel Swing
de Brüno et Jousselin
Consultable partiellement en ligne ici.
Edition complète : Treize Etrange

Commando Colonial
de Appollo et Brüno
3 tomes, édition Poisson Pilote

Némo
de Brüno
4 tomes et 1 intégrale, édition Treize Etrange

Junk
de Brüno et Nicolas Pothier
2 tomes, édition Treize Etrange

Inner City Blues
de Brüno et Ammari-B
3 tomes, éditon Vent d’Ouest

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2 Comments

  • par The_Geek
    Posté samedi 18 juin 2011 10 h 54 min 0Likes

    en voyant le titre du FS du mois j’ai cru que la rubrique aller parler du film de Sacha Baron Cohen O_o -> Facepalm…

  • par Larcloub
    Posté samedi 18 juin 2011 12 h 06 min 0Likes

    Il faut aussi parler de l’influence de la musique dans son dessin, avant tout la musique noire et en particulier le Funk, la Soul et le Jazz, qui influencent grandement la coolitude de son trait (à mon sens). Dans les magnifique scènes de boîte de nuit qu’on trouve dans Biotope et surtout Inner City Blues, jamais les boules à facettes n’ont autant étincelé, et sa représentation de la musique est juste hallucinante ! Elle prend vie à travers son dessin, il arrive à retranscrire l’énergie d’un groupe qui joue en Live et à nous la faire ressentir uniquement grâce à son trait, un véritable tour de force !
    Et ses scènes d’action, hyper visuelles, possèdent une intensité rare, son découpage fait vraiment des merveilles !
    Merci encore d’avoir mis un coup de projecteur sur cet homme ultra talentueux et éminemment sympathique ! Continuez comme ça !

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