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Critique : Anomalisa

Après avoir mis en scène Synecdoche New York en 2008, Charlie Kaufman revient à la réalisation.

Celui qui est connu pour avoir signé des scénarios pour Michel Gondry, Spike Lee ou George Clooney a choisi la stop motion pour raconter l’histoire d’Anomalisa et s’est pour cela associé à Duke Johnson. Le film est nommé aux Oscars en tant que meilleur film d’animation.

 

LA CRITIQUE

L’animation a toujours été vue non pas comme une technique mais comme un genre souvent destiné aux plus jeunes. Même si les contre-exemples sont légion, les longs métrages animés visent d’abord les enfants et parfois leurs parents en plus. C’est surtout au Japon que des dessins animés sont produits pour viser directement le public adulte. Aux USA, pour voir quelque chose visant un peu public de plus de 16 ans, il faut se tourner vers le petit écran et ses séries subservices.

L’incroyable Anomalisa fait donc figure d’OVNI dans le paysage. Il est pourtant à voir absolument.

Le film, issu de l’imagination de Charlie Kaufman, scénariste notamment d’Eternal Sunshine of the Spotless Mind, raconte l’histoire simple en apparence d’un homme débarquant dans une ville américaine pour tenir une conférence dans un hôtel. Ce spécialiste du service client va y prendre ses aises, rappeler une ex et faire la connaissance de deux jeunes femmes fans de lui. Il va flasher sur l’une d’elle.

Anomalisa prend son temps. On suit l’arrivée de Michael Stone à Cincinatti tout en douceur et on découvre avec émerveillement la qualité de l’animation de Duke Johnson. Avec le studio Starburns Industries à qui l’on doit entre autre une fausse bande-annonce pour La Grande Aventure Lego, l’épisode en stop motion de Community et la série Ricky et Morty, Johnson et Kaufman ont fait un incroyable travail, livrant un film en stop motion lorgnant vers le photo-réalisme quand la plupart des concurrents continuent à faire du « cartoony ». On comprend facilement pourquoi les internautes n’ont pas hésité à donner de l’argent à un tel projet tant la réalisation est incroyablement soignée (Kaufman a fait une campagne Kickstarter, récoltant 406 000 dollars alors qu’il en voulait 200 000).

Mais petit à petit, on va se rendre compte que les choses ne sont pas ce qu’elles sont, et qu’on est loin d’être devant une sorte de comédie dramatique. A l’instar d’Eternal Sunshine, le film va se révéler petit à petit être bizarre. Différents indices se glissaient déjà dans le récit depuis l’introduction : dès le début, le héros semble saoulé par toutes les personnes gentilles qu’il croise et toutes les voix sonnent bizarrement. C’est là qu’on comprend vraiment l’intérêt de la stop motion : l’impression 3D utilisée surtout pour les visages montre une puissance qu’il aurait été compliqué de mettre en œuvre en live, à moins de faire quelque chose d’encore plus bizarre voir inaccessible.

Tout ces indices n’ont qu’un seul but : montrer la banalité de la situation, le fait que n’importe qui peut s’y identifier et la dénoncer. Dénoncer le quotidien, son train-train et ce coté « on es tous les mêmes, personne ne cherchant à s’échapper de la réalité ». C’est finalement, à travers le personnage, un portrait acide de notre société que dresse Charlie Kaufman. Seuls les deux protagonistes principaux (et encore) offriront une lueur d’espoir au spectateur, notamment à travers un très long face à face dans une chambre dont une partie est une vraie scène de sexe, presque explicite, chose rare voire incroyable pour un film en stop motion !

Après Synecdoche New York avec Philip Seymour Hoffman sorti en 2008, Charlie Kaufman signe donc un second long-métrage de très haute tenue, aussi bien en terme d’écriture que de mise en scène. On surveillera également le travail de Starburns Industrie qui continue à grimper les échelons du petit monde de l’animation.

A la fois drôle, surréaliste, jubilatoire et déprimant, Anomalisa est une vraie réussite et l’un des meilleurs films de ce début d’année.

Anomalisa de Charlie Kaufman, en salles le 20 janvier 2016

 

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